Député et président du conseil général des Landes, également président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, Henri Emmanuelli, l’une des grandes voix de l’aile gauche du Parti socialiste, dit les vives inquiétudes que lui inspire la situation politique au lendemain des élections municipales, à l’occasion d’un entretien avec Mediapart pour l’émission Objections.
Évoquant le choix de Manuel Valls comme premier ministre, il estime qu’il s’agit « d’un coup de barre à droite » à un « moment où il aurait sans doute fallu autre chose ». Selon lui, la décision d’Europe Écologie-Les Verts (EELV) de ne pas participer au gouvernement est un événement politique important parce qu’elle entraîne « un rétrécissement de la majorité ». Ce coup de barre à droite lui apparaît si préoccupant qu’il réserve encore la position qu’il prendra lorsque le premier ministre sollicitera le vote du Parlement après sa déclaration de politique générale. N'envisageant pas de voter "non" pour rester fidèle à sa famille politique, il n’exclut pas de s’abstenir : « Moi, mon vote n’est pas acquis, je vais attendre de voir ce qu’il dit. »
Henri Emmanuelli s’insurge par ailleurs contre le fait que, plus que jamais, « toutes les décisions sont prises à l’Élysée » et que l’on vive en France dans « une sorte de monarchie républicaine » avec « des coups de force permanents, avec des lobbys qui agissent par pression ». « Il faut aujourd’hui bouger ces institutions : ce n’est plus possible ! » estime-t-il.
Mais surtout, le dirigeant socialiste plaide pour une autre politique, à l’échelle européenne, et une autre politique économique en France. Dénonçant « l’orthodoxie budgétaire » qui prévaut à Bruxelles, il estime que l’Europe serait mieux avisée « de se préoccuper de la déflation ». Et dans le cas de la France, il fait valoir qu’il plaide depuis longtemps pour une autre politique économique.
Mais ses critiques les plus acerbes, c’est à l’actuelle direction du Parti socialiste, emmenée par Harlem Désir, qu’il les réserve. Faisant valoir que les adhérents du PS n’ont jamais été consultés sur les orientations actuelles « qui sont regrettables » – « on ne leur a jamais demandé leur avis », dit-il –, il ajoute avec sévérité : « Le Parti socialiste n’existe plus, ni en attaque, ni en défense (…) Le Parti socialiste est devenu un parc à moutons. » Estimant que « le Parti socialiste est dans un état comateux » et que sur « le plan du rassemblement de la gauche, il n’a pas du tout joué son rôle », il plaide pour un sursaut : « Un congrès extraordinaire ou une démission du premier secrétaire ne me paraîtrait pas inopportun », conclut-il.
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