Quantcast
Channel: Mediapart - France
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2562

Affaire Tapie : la parade judiciaire de Stéphane Richard

$
0
0

Mis en examen pour « escroquerie en bande organisée » dans le cadre de l’information judiciaire qui a été ouverte à la suite de l'arbitrage Tapie, et par ailleurs renvoyé devant la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) pour cette même affaire, Stéphane Richard a peut-être trouvé une parade pour desserrer, au moins pour un temps, l’étau judiciaire dans lequel il est pris. Selon nos informations, il a en effet décidé de contester son renvoi devant la juridiction financière et a décidé de déposer une question prioritaire de constitutionnalité.

Selon de bonnes sources, l’audience de la Cour de discipline budgétaire et financière qui devait juger l’actuel PDG d’Orange, Stéphane Richard, pour le rôle qu’il a joué en qualité de directeur de cabinet de l’ex-ministre des finances, Christine Lagarde, ainsi que deux autres hauts fonctionnaires, Jean-François Rocchi (à l’époque des faits, président du Consortium de réalisation – le CDR, c’est-à-dire la structure de défaisance qui a accueilli en 1995 les actifs douteux de l’ex-Crédit lyonnais) et Bernard Scemama (à l’époque, président de l’Établissement public de financement et de restructuration – l’EPFR, actionnaire à 100 % du CDR), devait se tenir à partir du 7 avril.

Mais les avocats de Stéphane Richard ont mis au point une parade judiciaire. D’abord, ils ont effectivement soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), afin de contester le renvoi de leur client devant la juridiction financière. Cette QPC fait d’abord valoir que certaines règles de fonctionnement interne de la CDBF pourraient être frappées d’inconstitutionnalité. Elle fait de plus valoir que la juridiction, qui va juger Stéphane Richard pour d'éventuelles entorses aux règles de la comptabilité publique, est présidée par le premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud. Or, ce dernier a eu à connaître du dossier de l’arbitrage en faveur de Bernard Tapie, du temps où il était président (PS) de la Commission des finances de l’Assemblée nationale. C’est à cette époque, en particulier, que la Commission des finances, à l’automne 2008, a tenu de nombreuses auditions pour comprendre dans quelles conditions les trois arbitres avaient alloué un dédommagement de 405 millions d’euros à Bernard Tapie. La QPC ferait donc valoir que le premier président de la Cour des comptes ne peut pas juger sereinement l’affaire, alors qu’il a joué un rôle fort dans les joutes politiques que l’affaire a déclenchées. En quelque sorte, la QPC soulèverait la question d'un possible manque d'impartialité de Didier Migaud.

Dans les prochains jours, le Conseil d’État va donc devoir dire s’il transmet cette question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ou s’il la rejette.

Dans leur mémoire en défense présenté à la Cour de discipline budgétaire, les avocats de Stéphane Richard, mis en examen pour « escroquerie en bande organisée » dans le volet non ministériel de l’affaire, usent d’un autre argument. Ils font valoir que la Cour de discipline peut difficilement juger leur client, alors que l’information judiciaire n’est toujours pas close, et que les responsabilités respectives des différents protagonistes de l’affaire ne sont pas encore définitivement établies.

Bref, les conseils usent de nombreux moyens de droit pour tenter d’écarter cet obstacle de la Cour de discipline budgétaire. Ils s’y emploient avec d’autant plus d’énergie qu’ils n’ignorent pas que l’obstacle pourrait être très périlleux pour Stéphane Richard : selon de très bonnes sources, les réquisitions présentées par le ministère public devant cette juridiction pourraient en effet être d’une extrême sévérité.

La Cour de discipline budgétaire et financière a, quoiqu'il en soit, dès à présent, réagi à la parade de Stéphane Richard puisque l'audience du 7 avril a été annulée et une nouvelle audience a été programmée pour le 12 mai. Cette audience devrait, de surcroît, n'examiner que les questions de procédure soulevées par la QPC et non pas l'affaire sur le fond.

Le PDG d’Orange devrait franchir ce 26 mars, dans l’après-midi, un autre obstacle avec beaucoup plus de facilité : celui de sa reconduction à la tête de l’opérateur téléphonique, dont l’État, avec 27 % du capital, est toujours le premier actionnaire. Depuis le début du scandale Tapie, le ministre des finances, Pierre Moscovici, a toujours joué un rôle hautement protecteur pour les personnalités mises en cause. La veille de la première audition de Christine Lagarde devant la Cour de justice de la République (CJR), en mai 2013, il n’a pas hésité à faire pression sur les magistrats, affirmant que la France maintiendrait son soutien à la patronne du Fonds monétaire international, quelle que soit l’incrimination que la justice pourrait retenir contre elle. Et dans le cas de Stéphane Richard, avec l’appui de l’Élysée, il lui a aussi apporté constamment son appui, même après sa mise en examen. En toute logique, les jours de Stéphane Richard à la tête d’Orange ne semblent donc pas comptés. En revanche, ceux de Pierre Moscovici à la tête de Bercy le sont. Mais cela, c’est une autre histoire…

A lire aussi sur le blog de Tuxicoman : Manuganu, un bon jeu de plateforme sur Android


Viewing all articles
Browse latest Browse all 2562

Trending Articles