« Je veux pousser un coup de gueule ! »
Jean-Pierre Sueur, sénateur PS, président de la commission des lois de la Haute Assemblée, est un homme en colère. En 2011, il a rédigé un rapport sur les sondages, avec son collègue UMP Hugues Portelli, dont les grandes lignes ont été adoptées dans une proposition de loi votée à l’unanimité par les sénateurs. Publication rigoureuse des marges d’erreur, renforcement de la commission de contrôle, ce texte réglementait plus strictement la réalisation et la publication des enquêtes d’opinion.
À l’époque le président de la République, Nicolas Sarkozy, n’avait pas souhaité que le texte soit soumis à l’Assemblée nationale, mais le président du groupe PS, alors principal parti d’opposition, un certain Jean-Marc Ayrault, avait promis à Jean-Pierre Sueur de faire inscrire l’examen de cette proposition de loi dans une niche parlementaire.
Depuis lors, les sondages se sont multipliés, et ils foisonnent en ce moment à l’occasion des élections municipales. On continue sans sourciller de prédire des victoires à un point d'écart au second tour alors que les marges d’erreur sont de deux à quatre points ! Le président de la République a changé, Jean-Marc Ayrault est devenu premier ministre, mais la proposition de 2011 est toujours ensablée, et les sondages arbitrent plus que jamais les grands moments et les grands choix de la vie politique, comme s’ils étaient des vérités scientifiques.
Pourquoi cet enlisement ? « On me dit que l’ordre du jour de l’Assemblée est beaucoup trop chargé, explique Jean-Pierre Sueur. Je dis que c’est anormal, et qu’il faut absolument qu’on vote cette loi. Aujourd’hui, on a une loi sur les sondages qui date de 1977, elle ne correspond plus à la réalité. Avec Hugues Portelli nous nous battrons jusqu’à ce que cette loi passe ! »
L’invité d’Objections se fait plus précis quand on lui demande l’origine réelle de ce blocage : « Il y a une pression très forte de la part des instituts de sondage, et comme nos amis les sondeurs connaissent beaucoup de monde dans la classe politique… J’ai entendu des gens de droite comme de gauche me dire que ce n’était pas réaliste, en reprenant ce que disaient les sondeurs. Si je devais les montrer du doigt je crois qu’il faudrait désigner pas mal de monde ! »
Retrouvez ci-dessus l’entretien intégral avec Jean-Pierre Sueur, dans “Objections”, émission animée cette semaine par Michaël Hajdenberg et Hubert Huertas.
A lire aussi sur le blog de Tuxicoman : Vous êtes sous contrôle