Pour organiser son come back en 2017, c’était un passage obligé. Voilà qui est fait. D’après des documents consultés par Mediapart, Nicolas Sarkozy a versé – ou bien fait verser – les 516 615 euros qu’il devait au Trésor public après le rejet de son compte de campagne présidentielle par le Conseil constitutionnel. C’est en octobre dernier que l’argent a été débloqué.
Le contribuable Sarkozy, domicilié dans l’hôtel particulier de Carla Bruni au cœur du XVIe arrondissement de Paris, avait reçu deux « titres de perception » dès septembre dernier, expédiés par la direction générale des finances publiques à Bercy. Le premier visait le recouvrement de l’amende infligée à l’ancien chef d’État par les « Sages » (qui sanctionnait le dépassement du plafond de dépenses autorisées), pour un montant de 363 615 euros exactement.
Mais en plus, Bercy réclamait 153 000 euros correspondant à l’avance de frais consentie par l’État au candidat UMP en tout début de campagne, et que Nicolas Sarkozy était prié de rembourser.
Objectivement, l’ancien président de la République aura donc réglé ses dettes en un temps record, sans doute pour éviter de traîner un boulet infamant. La décision du Conseil constitutionnel du 4 juillet 2013, qui avait suivi celle encore plus sévère de la Commission nationale des comptes de campagne, a en effet révélé aux Français les trucs et astuces d’un compte de campagne irrégulier, sinon bidonné (lire notre compte-rendu de l’époque).
Ces informations ont en fait été obtenues de Bercy par un militant de la transparence (déjà très actif dans « l’affaire des sondages de l’Élysée »), Raymond Avrillier, qui s’est appuyé sur le droit d’accès aux documents administratifs (reconnu par une loi de 1978) pour réclamer à la direction générale des finances publiques qu’elle lui communique les pièces de ce dossier sensible. C’est le 16 janvier seulement que les copies réclamées lui ont été adressées.
Pour faire respecter ses droits, Raymond Avrillier aura dû faire appel à la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada), chargée de faire appliquer la loi de 1978, afin de passer outre le refus initial opposé à ses requêtes par un haut-fonctionnaire de Bercy, Bruno Bézard, qui les avait estimées – à tort – couvertes « par le secret professionnel » (lire notre article).
Reste à savoir qui a réellement supporté ces pénalités financières, de Nicolas Sarkozy en personne ou bien de l’UMP. Si le premier a multiplié ces derniers temps les conférences grassement rémunérées, à Londres pour la banque Goldmans Sachs ou à Cannes pour le groupe indien Tata (« Savoir diriger dans un monde complexe », d’après l’intitulé), l’UMP avait tout de même fait savoir, à l’automne dernier, qu’elle prendrait quoi qu'il arrive les 516 615 euros à sa charge.
« Nous prenons tout à la charge du parti, a ainsi déclaré au Point Jérôme Lavrilleux, le directeur de cabinet de Jean-François Copé, pour démentir un article du Canard enchaîné. Nicolas Sarkozy ne paiera rien de sa poche. »
L’hebdomadaire satirique a par la suite souligné qu’une telle dotation du parti au profit du contribuable Sarkozy devrait être signalée au Fisc, dans la déclaration de revenus 2013, au risque d’augmenter les impôts de ce dernier.
À l’arrivée, combien les irrégularités du candidat Sarkozy auront-elles coûté – ou rapporté – à sa formation politique ? Difficile à dire. La décision du Conseil constitutionnel avait certes entraîné le non-remboursement par l’État de quelque 10,6 millions d’euros de frais de campagne, mais l’UMP avait lancé dans la foulée un « Sarkothon » pour se renflouer, souscription nationale qui aurait officiellement aspiré onze millions d’euros de dons au bénéfice du parti.
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