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Une «nouvelle dynamique» est en rodage à la gauche du PS

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Tous contre la politique austéritaire que mènent le pouvoir et le PS. C'est un peu le mot d'ordre commun au Front de gauche, à Europe Écologie-Les Verts ou chez Nouvelle Donne pour ces élections départementales. Mine de rien, c'est bien la première fois qu'autant de partis de gauche prennent à ce point leurs distances avec la majorité gouvernementale. Dans près de 9 cas sur 10, EELV n'a pas d'alliances avec le PS. Au PCF, c'est moins de 5 % de tickets communs quand le parti de gauche n'a aucun binôme avec les socialistes. On est loin de la situation des dernières municipales où les listes PCF-PS étaient la règle (60 % de listes communes). 

Jean-Luc Mélenchon et Cécile Duflot lors d'une manifestation de soutien aux salariés de Continental Clairoix.Jean-Luc Mélenchon et Cécile Duflot lors d'une manifestation de soutien aux salariés de Continental Clairoix. © Reuters

« On est persuadé que si l'on veut transformer le rapport de forces, on doit aller vers une nouvelle dynamique qui ne peut pas être celle d'un cartel d’organisations politiques », affirme Éric Coquerel, secrétaire national à la coordination politique au parti de gauche. « Près de 90 % des militants EELV sont convaincus que comme l’écologie n’a pas sa place au gouvernement, des candidatures avec le PS n'ont pas lieu d'être », explique pour sa part David Cormand, secrétaire national adjoint (EELV). « Nous ne sommes plus dans le type d’alliances des années précédentes, constate Marie-Pierre Vieu (PCF), c'est la politique que mène le PS qui fait monter le Front national. »

L'alternative que proposent les partis de gauche est-elle crédible et peuvent-ils espérer obtenir de bons résultats électoraux ? C'est à la fois tôt pour le dire et pas forcément pertinent puisque ce n'est pas le but premier affiché par ces formations politiques. « Il y a déjà une première bataille à mener pour renouveler la gauche », assure Marie-Pierre Vieu. 

Pour Manuel Bompard, coprésident du parti de gauche à Toulouse, « il n’y aurait pas de plus mauvaise réponse face à la démobilisation des électeurs que de se ranger derrière le PS ». En quête d'inspiration, ce dernier regarde plutôt de l'autre côté des Pyrénées que dans les cénacles parisiens, direction Podemos. « On a fait deux assemblées citoyennes départementales à l'issue desquelles on a fixé trois piliers à notre programme : solidarité, écologie et démocratie. Il y avait une centaine de personnes à chaque fois. Puis on a fait des assemblées citoyennes dans les cantons pour enrichir le programme. Certaines ont permis de désigner des candidats, parfois non encartés, c'est ce genre de démarches que l'on appelle à généraliser. »

En Haute-Garonne, huit binômes estampillés « alternative citoyenne » se sont ainsi lancés, essentiellement à Toulouse où, depuis l'arrivée de Jean-Luc Moudenc (UMP) à la mairie, la droite menace de s'emparer du conseil général. Soutenus par EELV, Nouvelle Donne et le Front de gauche, les candidats de « l'alternative citoyenne » s'engagent à signer la charte ANTICOR départementales 2015, notamment sur le non-cumul des mandats dans l'espace et le temps, et sur la « transparence et la lutte contre les conflits d'intérêts »

Même si la dynamique est « encore timide », Éric Coquerel s'accorde à dire que c'est à l'avenir « là-dessus qu'il faudra mettre le plus d’efforts »Dans la Drôme, les Alpes-de-Haute-Provence, le Jura ou l'Aveyron, l'idée fait son chemin. « Il y a des gens qui viennent voir ces assemblées citoyennes qui ne se sentaient plus représentés dans l’arc politique », raconte Manuel Bompard. « Le résultat est au-delà de nos espérances, affirme le conseiller régional Midi-Pyrénées Guilhem Serieys (PG). La méthode des assemblées citoyennes pour co-élaborer les programmes a permis une véritable implication des citoyens. » Dans l'Aveyron, département dirigé par la droite, le mouvement est présent dans 19 cantons sur 23, soit davantage que le PS (16 cantons) ou le Front national (18 cantons).

« On voudrait faire un appel pour qu'une majorité citoyenne s’adresse à la majorité silencieuse des abstentionnistes », résume Gabriel Amard, coprésident du parti de gauche dans le Jura. Ont ainsi participé à la rédaction d'une charte commune pour les départementales des adhérents d'Attac, de la Confédération paysanne ou encore des collectifs « Stop Tafta ». « Je ne voulais pas d’accord électoral classique de partis, précise Gabriel Amard. On n'a peut-être que 8 constructions de majorité citoyenne sur 17, mais c’est d’abord le produit d’une construction fondée sur une charte avec une moitié d'encartés et de non-encartés », assure-t-il. 

À ces alliances de rejet de la politique gouvernementale s'ajoutent des stratégies propres à chaque parti. Le parti communiste, de loin le mieux implanté dans les actuels conseils généraux avec 220 élus, est aussi celui qui a le plus à perdre en cas de défaite électorale (le parti de gauche n'affiche qu'une dizaine de conseillers sortants, EELV en a 40). « On a 39 tickets communs avec le PS », indique Yann Le Polotec, responsable adjoint aux élections (PCF), « ce qui correspond grosso modo aux cantons où nous sommes le plus menacés de risques d’élimination au premier tour. »

Après avoir perdu la Seine-Saint-Denis en 2008, le Val-de-Marne et l'Allier sont les deux derniers conseils généraux présidés par des communistes. Avec une droite galvanisée par sa réussite aux élections municipales et la percée du Front national, le PCF pourrait tout simplement disparaître de la carte des départements. Aux dernières élections municipales, la droite a remporté 26 des 47 villes du Val-de-Marne. Pas question pour autant de multiplier les rapprochements de circonstance avec le parti socialiste : « On ne compte pas privilégier la tactique à deux sous par rapport à la création des rassemblements », tranche Marie-Pierre Vieu.

Europe Écologie-Les Verts privilégie le cas par cas, avec des expérimentations de binômes EELV-Front de gauche. Le résultat, c'est le 4-4-2 : 40 % de binômes avec le Front de gauche, 40 % en autonomie et 20 % avec le PS.  

Localement, les candidats tiennent néanmoins à se distinguer de tout parallèle avec le rapprochement entre Jean-Luc Mélenchon et Cécile Duflot. « Je ne représente pas Duflot et je ne m'allie pas à Mélenchon », fait savoir Nicolas Dubourg (EELV), candidat dans le canton de Montpellier 2 avec une colistière du Front de gauche. « On s’est retrouvés à travailler ensemble de manière très naturelle. On ne nous a pas imposé ce binôme, ça a été l'inverse, c'est nous qui avons demandé à nos partis respectifs de valider notre candidature », explique ce dernier. 

Le revers de ces nouvelles alliances est qu'elles s'ajoutent bien souvent à une, deux, voire trois autres candidatures de gauche et participent à la désunion face à la droite. Vu les faibles probabilités de triangulaires au second tour, l'éparpillement des voix de gauche risque d'ouvrir un boulevard à l'UMP-UDI et au FN. D'après un décompte de l'Ifop, la gauche ne sera ainsi représentée par un seul binôme que dans 21 % des cantons, alors que la droite sera dans ce cas dans 69 % des cantons. 

Un rassemblement plus large à gauche ne serait pas forcément plus payant sur le plan électoral. « On éprouve un ras-le-bol à voir le parti socialiste faire uniquement campagne sur le vote utile, et ce n'est pas parce qu'il y a plein de logos derrière celui du PS que les gens auront plus envie de voter, parie David Cormand. C'est un calcul purement mathématique, mais pas politique. Le discours de Valls, c'est : “Il n'y a qu'une gauche, c'est la mienne. Et même si vous n'êtes pas d'accord, c'est ma gauche ou la mort de la gauche.” »

Le nouvel espace politique créé par ces alliances sera-t-il électoralement payant ? « Des retours qu'on a, les gens sont contents d'être ensemble, déclare David Cormand. Ce n'est déjà pas rien, on a connu des scrutins avec des alliés où l'ambiance était moins bonne. » Lui dit être surtout attentif à conserver son nombre d'élus départementaux (40) et les départements où les écolos sont en alliance. C'est le cas dans l'Essonne et le Loiret (avec le PS), en Seine-Saint-Denis (avec Front de gauche et PS), dans la Somme (avec le PS et le PCF), le Limousin (Haute-Vienne et Corrèze), et dans l'Isère que tous citent en exemple depuis l'élection d'Éric Piolle aux dernières municipales.

« Le moment politique est à l'expérimentation, ajoute David Cormand, alors que tous les partis sont en attente de recomposition et voient certains de leurs repères exploser. Ça va être intéressant de comparer dans les urnes les différents choix à l'œuvre. On ne pourra plus raisonner selon les prophéties autoréalisatrices des uns et des autres, mais sur des résultats électoraux. C'est bien plus objectif que des sondages ou d'intimes convictions. »

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