Tarn, de notre envoyée spéciale.- Un verre de vin rouge se tend vers le plafond du bar du marché : « Je trinque au “changement, c’est maintenant”. » La main qui le tient appartient à Philippe Folliot, député UDI, et possible futur président du conseil général du Tarn, bastion de la gauche menacé d’alternance lors des élections départementales (22 et 29 mars). Le toast provoque les éclats de rire des militants et candidats des listes d’union UMP-centristes qui prennent quelques minutes de pause après une matinée de tractage. Nous sommes le samedi 28 février, à Albi.
Au même moment, à une trentaine de kilomètres de là, des agriculteurs ont sorti les tracteurs pour dégager une barricade sur la départementale 132 conduisant au site du barrage de Sivens, occupé depuis l’été dernier par des opposants : la ZAD du Testet. C'est un avant-goût d'une semaine de blocus. À partir du lundi 2 mars, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs veulent bloquer la ZAD pour faire pression sur le conseil général qui doit voter le 6 mars sur les suites du projet. L’action a démarré lundi matin. Mercredi, un convoi « alimentaire » d’anti-barrage doit encercler les bloqueurs. Sur les routes du Tarn, la tension est à son comble, quatre mois après la mort de Rémi Fraisse, jeune opposant au barrage tué par la grenade offensive d’un gendarme, dans la nuit du 26 au 27 octobre dernier.
Le barrage de Sivens, c'est le boulet de Thierry Carcenac, le président socialiste du conseil général du Tarn qui s’est obstiné à vouloir construire cet équipement malgré l’opposition croissante qu’il suscitait. Son refus de rencontrer les opposants et d’écouter leurs critiques a nourri la tension. « Mourir pour des idées, c’est une chose, mais c’est quand même relativement stupide et bête » : sa déclaration après la mort du jeune homme l’a figé dans une posture méprisante, aux accents cyniques, qui jette une ombre sur son mandat quasi perpétuel. Il siège au conseil général depuis 36 ans et le préside depuis 1991. Fonction qu’il cumule depuis l'automne dernier avec un fauteuil de sénateur – la loi ne l’obligera à choisir entre les deux qu’en 2017.
Selon Philippe Folliot, « les gens en ont assez du système Carcenac, une organisation pyramidale, où tout remonte au président, sans transparence. C’est une organisation du passé. Il faut de la collégialité et non pas un autocrate qui décide de tout ». Lui-même est favorable au barrage et souhaite une commission d’élus pour sortir de l’ornière politique dans laquelle le projet est englué. Au volant de sa voiture, entre Castres et Albi, en route vers une réunion de candidats et militants de la campagne, il insiste : « Il faut plus de modestie. Je conduis ma voiture. Le système du conseil général aujourd’hui, c’est : le président se déplace avec son chauffeur, le vice-président aussi et un photographe suit. Il faut être plus économe. »
Pourtant, lui aussi s’apprête à cumuler sièges parlementaire et départemental. Dans la salle des fêtes de Réalmont, il est accueilli par Françoise Bardou, candidate divers droite : « Nous sommes tous des travailleurs. » Folliot se régale, entre deux tranches de saucisson : « Ça fait très longtemps que j’en rêve, je vais pouvoir commencer un discours en disant “Travailleuses, travailleurs”. »
Dans le Tarn, la droite s’amuse à parler comme la gauche. Mais cela ne l’empêche pas de s’unir contre la majorité socialiste sortante. Opposées lors des législatives de 2002, 2007 et 2012, UMP et UDI se sont rassemblées pour les départementales de 2015, dans la foulée de la victoire à la mairie d’Albi d’une coalition UMP-UDI-Radicaux valoisiens-MoDem-PRG. « Notre but c’est d’avoir la majorité, au minimum 12 cantons (sur 23 au total – ndlr). » Ce serait un dénouement retentissant dans le département de Jean Jaurès, le député socialiste de Carmaux, ancien pays minier, de textile et de mégisserie, frappé par la désindustrialisation et le dépeuplement des campagnes. Sur les listes de droite, on trouve une ancienne conseillère régionale PS, Marie-Claude Bascoul, enseignante en psychologie à l’université Champollion d'Albi : « Les gens ne font plus confiance à aucun parti politique. Il faut dépasser les clivages. »
Face à cette offensive, Thierry Carcenac lui aussi joue l’ouverture : « J’ai considéré que j’avais une motivation intacte pour conduire une équipe très large, dans le cadre d’une majorité pas forcément de gauche » (Le Journal d'ici, 6 janvier 2015). Un conseiller général de sa majorité actuelle n’exclut pas (en off) que le sénateur du Tarn sauve sa présidence, même en cas de majorité des cantons à droite. Difficile d’établir des pronostics avec un nouveau mode de scrutin (binominal) et des circonscriptions cantonales redécoupées. Bien des choses vont dépendre de l’abstention, qui promet d’être substantielle.
Sollicité par Mediapart, Thierry Carcenac n’a pas donné suite à nos demandes d’interview. La vice-présidente Claudie Bonnet, vers laquelle son responsable de communication nous a renvoyés, n’a pas non plus répondu à nos appels. Le barrage de Sivens n’est pas au cœur de la campagne des départementales dans le Tarn. Mais pour l’opposition, ce fiasco politique et ce drame humain symbolisent l’usure du patron du Tarn, qui brigue, encore une fois, un mandat départemental.
Dans les allées du marché couvert d’Albi, Nicolas Bruihle, militant au Mouvement des jeunes socialistes (MJS), déprime : « Quand les gens voient nos tracts, ils disent soit “surtout pas vous”, soit “j’espère que vous êtes contre Hollande”, soit “la politique, j’y crois pas”. » Mathilde Maulat, ajoute : « Quand on leur explique que le département, c’est la politique sociale, on nous répond “assistanat” et “profiteurs du système”. » Les seuls passants motivés par l’élection qu’ils ont croisés disent vouloir voter Front national. La gauche se présente divisée dans plusieurs cantons. Carcenac affronte Roland Foissac, conseiller général communiste sortant, qui explique : « Il n’y a plus de majorité ! Depuis 2012, Carcenac a épousé la politique du gouvernement actuel. »
Pendant ce temps, dans le canton de Vignoble-Bastide, celui du barrage de Sivens, l’ambiance est à couteaux tirés. À la sortie de Montauban, sur le bord de la route, une main a tracé en grosses lettres noires : « Ségo+Conf=fachos » (“Conf” pour Confédération paysanne). Sur les troncs des platanes, on peut lire : « Pelus dehors. » Les « pelus » ou « pelutes », ce sont les « pue la pisse », les occupants de la ZAD du Testet, qui ont construit cabanes et fort de défense pour empêcher la construction du barrage de Sivens. C’est là que Rémi Fraisse, 21 ans, est mort, tué par les gendarmes lors d’un affrontement nocturne. Le sort du barrage est suspendu à la décision que doit annoncer le conseil général du Tarn le 6 mars, à quinze jours du premier tour des élections.
Marie Chantepie, 35 ans, candidate aux départementales sur une liste citoyenne opposée au barrage, a subi la dégradation de sa voiture : « ZAD » tagué sur le capot. Et sur le côté : « ZAD partou », sans « t », fait-elle remarquer. Pourtant, contrairement aux zadistes parfois décrits comme des « occupants » par les agriculteurs pro-barrage, c’est une fille du coin, née dans le Tarn. Ouvrière agricole, elle habite Castelnau-de-Montmiral, un village d’une centaine d’âmes.
Ces derniers mois, elle a vu surgir des « milices », en treillis, sweat-shirts à capuche équipés de dossards « soutien aux gendarmes de Sivens » et de brassards orange où l’on peut lire « brigades anti pelutes ». Ils bloquent parfois les voies d’accès à la ZAD et font des rondes en quads dans la forêt. Un zadiste raconte avoir vu le slogan « Zad dehors sinon mort » et des pendus gravés sur des troncs d’arbres. Un autre décrit les pneus crevés de la voiture d’un sympathisant, l’intérieur souillé par de l’urine, et le caddie de ravitaillement d’une copine réquisitionné par des pro-barrage. Une page Facebook a un temps annoncé « ouverture de la chasse : un zadiste tué =une balle offerte ». Marie Chantepie a porté plainte. Les auteurs du post s’en sont tirés avec une convocation au commissariat.
Dans les rues du village, il lui arrive d’entendre des klaxons hostiles, de croiser des regards « de dégoût ». À l’école, sa fille s’entend dire que sa mère est « une pelute » et qu’à cause de ses amis, « on ne pourra plus boire l’eau ». La maire de la commune toute proche de Lisle-sur-Tarn, Maryline Lherm, « a réussi à détourner le regard du barrage vers les zadistes par une campagne de dénigrement », décrit Marie Chantepie. Fin 2014, l’édile a convoqué les services sanitaires pour de supposés problèmes de gale sur la zone.
Le 1er février, des incidents ont éclaté entre opposants et défenseurs du barrage. Patrick Rossignol, maire de la petite commune de Saint-Amancet, dans le sud du Tarn, adhérent de la FDSEA, producteur de céréales et de maïs, mais opposant au barrage de Sivens, raconte avoir été « bousculé » par un groupe d’hommes en tenue de chasse, équipés de manches de pioche, barrant une route départementale. « Ils veulent me retourner le fourgon et me pousser dans le fossé. Ils m’insultent : “Dégage pauvre con !”, “J’espère que vos électeurs vous cracheront à la gueule quand ils sauront que vous soutenez ces rats”. »
Quelques heures plus tard, dans les rues de Gaillac, il tombe sur quatre ou cinq de ces pro-barrage, barre de fer en main, « qui voulaient s’en prendre à des jeunes ». Il s’interpose et se présente en tant qu’élu. « Ils me menacent : “On est chez nous”, “T’as rien à foutre ici”. » Il retrouve ensuite sa camionnette « fracassée, avec de longs impacts sur le côté, le pare-brise et la vitre latérale brisés ». Il part, avec d’autres (crevaison de pneu, entrave à la circulation), déposer plainte à la gendarmerie de Gaillac. À la sortie, surprise : les mêmes hommes menaçants, avec « les mêmes outils en main », habillés de sweat-shirts noirs à cagoule avec un logo « Brigade antiPelluts-soutien aux gendarmes de Sivens », s’approchent d’eux.
Le groupe de plaignants appelle alors l’interphone de la gendarmerie : « Il y a des personnes avec des barres dans les mains qui arrivent. » Réponse de l’autre côté du mur : « Non, ils n’ont rien dans les mains. » Il faut attendre que les pro-barrage cassent l’appareil photo d’une journaliste stagiaire pour que les militaires sortent de leur bureau, et raccompagnent la bande d'agresseurs jusqu'à leurs voitures. « Nous avons été surpris de voir les gendarmes laisser partir les agresseurs après avoir discuté avec eux. »
Pour Rossignol, adhérent à Europe Écologie-Les Verts (EELV) mais maire sans étiquette, « si les élus avaient géré la situation comme il fallait, on n’en serait pas là. Les zadistes ne seraient pas venus et on n’aurait pas des miliciens armés faisant régner la terreur ». Pour Guillaume Cros, conseiller régional EELV, « les élus en place qui attisent la violence sont irresponsables ».
Sur le canton de Vignoble-Bastide, celui de Sivens, la liste citoyenne ACTES conteste le barrage de Sivens. Elle dénonce le monopole de la décision publique exercé par les élus, les conflits d’intérêts, le refus d’écouter les opposants. « On ne pouvait pas laisser le canton sans candidat contre le barrage », explique Claude Forgeot, ancien technicien agricole puis patron d’une entreprise de BTP, encarté au Parti de gauche et désigné candidat par un processus d’assemblées citoyennes.
« C’est la prochaine assemblée qui va décider de ce qui sera fait à Sivens. On veut faire entendre les citoyens. On a un modèle, c’est Podemos. Le barrage de Sivens est emblématique des maux de notre société : les conflits d’intérêts, les dépenses déraisonnables, les dossiers bidonnés. Un élu a le droit de tout à partir du moment où il est élu. Ce sont les mêmes élus depuis des années, il faut que ça change. » Pour sa fille, Maud, candidate à Saint-Sulpice : « Certains élus disent qu’il faut réaffirmer leur rôle, sous-entendu quand les projets sont votés, ils ne doivent pas être contestés par les citoyens. C’est tout ce qu’on dénonce ! C’est une vision dépassée de la politique. »
« Sivens nous a ouvert les yeux, explique Marie Chantepie. Je ne me rendais pas compte à quel point dès que l’on n’est pas d’accord avec la majorité, on n’est pas entendu. On voulait protéger nos forêts, on a manifesté pacifiquement, et on nous fait passer pour des terroristes ! » Katia Guillaumé, 49 ans, aide à domicile, remplaçante sur la liste d’ACTES : « Le jour où des gens se sont enterrés pour empêcher les bulldozers d’entrer sur la ZAD, j’ai vu un gradé donner l’ordre à ses hommes de foncer sur eux. Ça m’a énormément choquée. J’ai capté son regard pour lui demander pourquoi il faisait ça. Il m’a répondu en faisant des mains le signe qu’il n’y pouvait rien. Là, j’ai pensé qu’il fallait faire changer les choses. »
Leur liste est soutenue par EELV, les Alternatifs et, officiellement, le Front de gauche – à ceci près que les communistes ont préféré présenter leurs propres candidats. Ils espèrent un bon score car, aux dernières européennes, les bureaux de leur circonscription ont accordé plus de voix aux écolos et au Front de gauche qu’au PS et à la droite. Mais moins qu’au FN.
« Sivens, c’est une ânerie énorme, on n’impose pas les projets à la matraque » : c’est la voix de Jacques Pagès, assis dans son salon, entre une réunion au conseil général et la sortie d’école de ses deux jeunes enfants. Élu départemental sortant, il fut le seul à voter contre le projet de barrage. Infirmier à domicile, président de la commission des infrastructures et des déplacements au conseil général, il repart en campagne sous les couleurs de la majorité, malgré la rupture de Sivens. Il affronte Philippe Folliot, le candidat de droite et potentiel futur chef du Tarn, à armes inégales, dans une circonscription énorme où la plupart des électeurs ne le connaissent pas.
Sa voix s’étrangle, les larmes lui sont montées aux yeux. « Je suis anéanti par le fait que ce projet stupide et déconnecté a foutu en l’air tout notre bilan. » Quelques secondes de silence. « Sur 90-95 % des actions du conseil général, j’ai été d’accord, et même, enthousiaste : agenda 21, plan énergie-territoire, la politique sociale, l’aide aux cantines scolaires, les trajets en car à 2 euros, la défense des zones humides, de l’environnement. »
Enfant des monts de Lacaune, au sud du Tarn, il est entré en militantisme à la fin des années 1980 en s’opposant à un projet de barrage sur la rivière Viaur, déjà voulu par le conseil général et la CACG – la société au cœur du conflit d’intérêts de Sivens –, qui menaçait de noyer sa vallée. « Un jour, on a vu débarquer des gens avec des lunettes de mesure. Ils nous ont dit :“Vous n’êtes pas au courant ? Demain, il y aura de l’eau jusqu’au clocher de l’église.” »
Les habitants se mobilisent alors contre le projet. Pagès devient maire de son village. « Je n’aurais peut-être jamais eu l’idée de me présenter si je ne m’étais pas dit que les élus faisaient n’importe quoi. Ma vie politique est née de l’anti-barrage. » Si bien que trente ans plus tard, lorsqu’il a vu arriver le dossier de Sivens, « ça a fait tilt ». Pour aller chez lui, la route traverse le relief granitique des monts de Lacaune, ses rivières de rochers et ses forêts. L’Aveyron n’est pas loin, on y produit le lait qui sert à fabriquer le Roquefort.
Pourquoi n’a-t-il pas réussi à infléchir le projet ? « J’en ai été malade. J’étais seul contre tous. C’était comme être face à une religion. Ça m’a déstabilisé. » La logique majoritaire de l’assemblée et la division des tâches ont fait le reste. « Les conseillers généraux ne maîtrisent qu’un ou deux sujets, sur le reste, ils font confiance aux autres. Chaque élu travaille son dossier avec les services, puis le présente au groupe majoritaire et le soumet au vote. C’est un travail superficiel. » Pourquoi une telle obstination de l’exécutif ? « En réunion, j’ai entendu : “On ne va quand même pas baisser le pantalon”, et aussi : “ On ne pourra plus rien faire.” Mais heureusement qu’on ne peut plus tout faire ! »
L’alternative, il y en a un qui ne doute pas de l’incarner, c’est Frédéric Cabrolier, conseiller municipal et communautaire du Front national à Albi. Il donne rendez-vous dans la grande salle du plus grand café de la ville, en bordure de sa plus grande place, haute silhouette derrière son verre de jus d’ananas. « Ici, je suis comme un poisson dans l’eau. Il y a des gens qui ne m’aiment pas du tout mais je fais partie du paysage local. »
Conseiller financier pour un groupe d’assurance, 48 ans, il se présente contre Thierry Carcenac : « C’est l’archétype du politicien qui a échoué. Nous sommes le département le plus mal géré de France. C’est un exécutif de copains et de coquins. Sivens a mis au grand jour des conflits d’intérêts. On fait travailler des entreprises amies. Tout est à l’avenant. Quand il y a de la suspicion, on n’a plus de démocratie apaisée et juste. Au bout de trois, quatre mandats, nos élus n’écoutent plus le peuple. Ils sont dans leur tour d’ivoire. » Lui aussi est favorable au barrage de Sivens, mais en plus petit.
Pour son parti, il lorgne les votes ruraux de cette périphérie de Toulouse qui accueille de plus en plus de ménages rejetés par la hausse des prix de l’immobilier dans la métropole régionale. L’emploi s’y fait rare. Les laboratoires Pierre Fabre, longtemps puissance économique locale, sont en pleine restructuration et viennent d’annoncer un plan social. « Ce sont les territoires oubliés de la République. On a dépensé des milliards d’euros en politique de la ville en direction des quartiers, et on a délaissé les campagnes où la misère s’est développée. » Il espère emporter quatre cantons, dont celui de Carmaux, 1'ancien bastion de la gauche ouvrière : « Le Tarn, c’est là où nous avons le plus d’élus municipaux en Midi-Pyrénées, c’est le département où nous aurons le plus d’élus. »
Samedi matin, il tracte au marché de la Madeleine à Albi, au côté de sa deuxième de liste « d’origine africaine», comme il la décrit. Bonnefoi Ndietom, 40 ans, standardiste dans l’hôtellerie, fille d’une réfugiée politique tchadienne, et habitante de Cantepau, une zone urbaine sensible. C’est une transfuge de l’UMP : « J’ai fait la campagne de Sarkozy en 2007 : une fois l’élection passée, plus personne ne me prenait au téléphone. » Frédéric Cabrolier insiste : « On pratique la diversité, ça devrait vous plaire. Je suis pour l’assimilation et envoyer des signaux à tous ces Français issus de l’immigration : ils peuvent réussir en politique, ils ont leur place chez nous. »
Pratique-t-on la politique différemment après la mort d’un jeune contre un barrage ? Et après que les experts mandatés par le ministère ont révélé les failles, les zones d’ombre et les erreurs techniques du projet voté à la grande majorité par le département ? Si peu. Thierry Carcenac se représente. Le préfet est toujours en place. Les principales formations politiques continuent de promouvoir de grands projets pour développer leur territoire : la Zac des Portes du Tarn, développée par la SEM 81, le syndicat mixte du conseil général ; une autoroute entre Castres et Toulouse ; le câblage en haut débit des campagnes. Philippe Folliot rêve d’un « troisième Louvre » à Castres.
« Le drame de Sivens n’a pas politiquement affaibli Thierry Carcenac, analyse Guillaume Cros, conseiller régional EELV. Au contraire : les présidents de la chambre d’agriculture et de la chambre des métiers, la FDSEA, la FNSEA sont tous montés au créneau pour défendre le vote des élus et donc sa décision. » Le barrage de Sivens est devenu un symbole pour les élus, celui du pouvoir qu’ils veulent garder. « C’est comme s’il fallait qu’ils resserrent les rangs pour garder leurs privilèges », décrit Guillaume Cros, pour qui « Sivens n’a rien changé ».
BOITE NOIRECe reportage a été réalisé du mercredi 25 février au dimanche 1er mars. Toutes les personnes sollicitées ont bien voulu me parler, et le plus souvent me rencontrer, à l'exception notable du président du conseil général du Tarn (comme décrit dans l'article). Je regrette ce silence.
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