D’un côté, le débat au parlement ; de l’autre, la grève. Ce lundi a commencé l’examen dans l’hémicycle du projet de loi Macron, qui a déjà été examiné par une commission spéciale de députés (lire notre article). Et parmi cet inventaire à la Prévert des points censés desserrer les « freins » à la croissance de l’économie française, outre une plus grande ouverture du travail le dimanche, l’instauration d’un secret des affaires ou la libéralisation des autocars, figure en bonne place une refonte du fonctionnement des conseils des prud’hommes. Il est peu de dire que la réforme présentée à l’assemblée (corsetée dans l’article 83 du texte, mais dont le contenu ressemble à s’y méprendre à un texte de loi à part entière) passe mal auprès des quelque 15 000 conseillers prud’homaux, ces représentants des salariés et des employeurs, choisis par leurs pairs pour juger les conflits liés au travail. Ces derniers, tout comme l’ensemble des organisations syndicales et patronales, critiquent vivement les changements prévus.
Plus de 15 conseils prud’homaux ont annoncé des mouvements de grève, celui de Lyon ayant lancé la mobilisation depuis le 15 janvier, et celui de Paris prévoyant, à l’appel de tous les syndicats de salariés sauf la CFDT, une suspension des audiences pour la durée de l’examen de la loi à l’Assemblée, de ce lundi jusqu’au 8 février. Le 26 novembre, déjà, le conseil supérieur de la prud’homie, qui rassemble toutes les organisations syndicales et patronales, avait rejeté à l’unanimité le texte (le détail des positions de chaque organisation est à retrouver sur le site de la CFDT).
Pourquoi ça coince, alors que le but du texte est officiellement d’améliorer la façon dont est rendue la justice du travail ? Comment le gouvernement a-t-il réussi l’exploit de réunir la CGT et le Medef contre lui ? Quel est l’état réel des prud’hommes ? Quelles sont les pistes pour les rendre plus efficaces ? Tentatives d’explication.
Une justice originale, mais très lente
Chaque année, 200 000 personnes saisissent les 210 conseils des prud’hommes répartis sur tout le territoire. Dans 99 % des cas, il s’agit d’un salarié, et dans 98 % des cas, le contrat de travail a déjà été rompu. Dans l’immense majorité des dossiers, le demandeur vient contester cette rupture ou les conditions dans lesquelles elle est advenue. C’est un cas presque unique dans le monde : les juges, qu’on nomme conseillers prud’homaux, sont des représentants du monde de l’entreprise, salariés et employeurs à parité. Une originalité qui remonte au premier conseil, instauré à Lyon en 1806 sur le modèle des tribunaux existant déjà dans la ville pour concilier les fabricants de soie et leurs employés, les canuts. « Les prud’hommes, c’est deux cents ans d’histoire, avec dès le départ des gens qui connaissent l’entreprise et qui essayent de résoudre les conflits qui s’y déroulent », rappelle Didier Porte, secrétaire confédéral chargé du secteur juridique de Force ouvrière.
Aujourd’hui, une affaire passe d’abord dans une audience de conciliation, en présence d’un juge issu du collège des salariés et d’un juge issu du collège des employeurs. Dans presque 95 % des cas, cette phase n’aboutit pas, et le dossier passe ensuite en bureau de jugement, où deux juges de chaque collège sont chargés de trancher. Lorsqu’ils n’y parviennent pas (la plupart du temps parce que les conseillers employeurs s’opposent aux conseillers salariés), le dossier est envoyé en départage : il repasse devant les mêmes juges, accompagnés d’un magistrat professionnel, qui fait donc pencher la balance. 20 % des affaires passent actuellement en départage.
Que le cas ait été tranché en bureau de jugement ou lors du départage, le salarié ou son employeur peuvent le porter en appel, ce qu’ils font très fréquemment. Les deux tiers des dossiers jugés hors conciliation passent en appel, où ils sont pris en charge par la voie classique des cours d’appel.
La procédure telle qu’elle se déroule actuellement a un gros défaut : elle est très lente. La durée moyenne de traitement d’une affaire est de près de 12 mois, contre 5 à 6 mois pour un dossier passant au tribunal d’instance ou en correctionnelle. Et ces délais s’allongent : le temps pour boucler une affaire en départage est aujourd’hui de presque 30 mois, et c’est, selon l’étude d’impact présentée par le ministère de l’économie dans son projet de loi, sept mois de plus qu’il y a dix ans. À titre d’exemple, selon les chiffres rassemblés par L’Humanité, le conseil de Bobigny a enregistré 7 000 nouvelles affaires en 2013 alors qu’il avait déjà 10 000 affaires non tranchées. Et il faut attendre jusqu’à vingt et un mois entre l’audience du bureau du jugement et celle de départage.
Ce constat est connu de tous, et partagé par l’ensemble des acteurs concernés. Il a été encore rappelé dans le dernier rapport sur le sujet, rendu par Alain Lacabarats, président honoraire de la chambre sociale de la Cour de cassation, en juillet 2014 à la ministre de la justice Christiane Taubira. Ce rapport Lacabarats suivait le rapport Richard, en 2010, et le rapport Marshall, en 2013. Évoquant une « juridiction en crise », il rappelait que les retards de la justice prud’homale valent à la France d’être très régulièrement condamnée pour déni de justice ! C’est arrivé 58 fois en 2012 et 51 fois en 2013.
Mais le rapport de 2014 allait bien plus loin, puisqu’il jugeait que « la juridiction du travail, dans son mode d’organisation actuel, ne fonctionne pas dans des conditions conformes aux exigences des standards européens et connaît de graves carences ». En plus des retards préoccupants, Alain Lacabarats pointait un manque d’« indépendance » et d’« impartialité » de certains juges, qu’il estimait trop proches de leur collègue, salarié ou employeur. En décembre 2013 déjà, le Groupe d’États contre la corruption (Greco), dépendant du conseil de l’Europe de Strasbourg, recommandait lui aussi à la France de conduire une réforme des conseils de prud’hommes, « afin de renforcer l’indépendance, l’impartialité et l’intégrité des juges non professionnels ».
La réforme prône la rapidité et une meilleure « qualité »
C’est à toutes ces critiques que se propose de répondre le texte contenu dans la loi Macron, un article unique mais long de 8 pages, en fait plus proche du projet de loi. Son but est inscrit noir sur blanc dans l’étude d’impact du texte : « Rendre la justice prud'homale plus qualitative – 65 % des décisions sont portées en appel – et réduire les délais de traitement des affaires. » Denys Robiliard, le député (PS) rapporteur de cette partie du projet de loi, souligne qu’« il existe un diagnostic clair : l’institution a des difficultés et tout le monde en est convaincu. En dix ans, le temps passé avant de clore une affaire a augmenté de 18 %, et de 33 % lorsqu’elle passe en départage ».
Les deux axes principaux sont donc l’instauration de procédures accélérées, et l’implication plus grande d’un juge professionnel dans le jugement des affaires. Ainsi, si le texte est voté tel quel par le parlement, il sera bientôt possible de passer devant un bureau de jugement en formation restreinte, comprenant seulement un conseiller salarié et un conseiller employeur. Cela concernera la majorité des affaires, puisque les seules conditions seront que la phase conciliation ait échoué, que les deux parties soient d’accord pour la formation restreinte, et que le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire (l’acte par lequel le salarié demande au juge d’annuler le contrat de travail, aux torts de l’employeur, ce qui lui garantit le versement de fortes indemnités).
Le texte prévoit un délai de jugement très court, puisque les deux juges seraient tenus de statuer dans un délai de trois mois. En cas de désaccord entre eux, l'affaire serait envoyée en départage. Une première mouture de la réforme prévoyait que la formation restreinte doive utiliser un barème fixe pour déterminer les indemnités à verser au salarié, uniquement en fonction de son ancienneté et de son salaire. Mais la levée de boucliers a été telle que l’idée a été abandonnée.
Autre axe de changement : si les deux parties y sont favorables ou si le bureau de conciliation le recommande, le dossier pourra être envoyé directement devant une formation comprenant les quatre conseillers habituels, mais accompagnés d’un magistrat professionnel. Il s’agirait en quelque sorte de sauter l’étape du bureau de jugement. Dans l’hypothèse haute de l’étude d’impact du gouvernement, cela doublerait le taux de départage.
Pour montrer que les députés ne suivent pas forcément le raisonnement du gouvernement, la commission spéciale a supprimé, à l’initiative de Denys Robiliard, la possibilité de passer directement au juge répartiteur si une seule des parties ou un seul des juges présent à la conciliation le demandait. Le ministère de l’économie souhaitait cette innovation, les députés lui ont objecté que ce dispositif suscitait « des réserves compte tenu de sa complexité » et que « c'est à la loi de définir le juge ayant à connaître d'un litige ».
Le projet de loi table aussi sur la création de sanctions pour les conseillers prud’homaux qui commettraient des fautes, sur l’interdiction de la grève, sur l’obligation pour eux de se former, et sur la création du statut de « défenseur syndical », sorte d’avocat bénévole assistant un salarié ou un employeur, inscrit sur une liste officielle, pouvant travailler sur ses dossiers sur son temps de travail et dont les conditions de licenciement seraient surveillées de près.
Les conseillers prud’homaux dénoncent le mépris à leur égard
Aucun des acteurs concernés par la réforme prévue ne la porte particulièrement dans son cœur. Les oppositions sont légion, du Medef et de l’ensemble des organisations patronales, dont la position est à lire ici (mais qui n’appellent tout de même pas à la grève), au socialiste Gérard Filoche, ancien inspecteur du travail très virulent contre les réformes du monde du travail voulues par le gouvernement.
D’abord, s’interrogent plusieurs parties prenantes, pourquoi la réforme, dont la conception a été initiée par le ministère de la justice, a-t-elle atterri dans les mains d’Emmanuel Macron, avec la bénédiction de Matignon ? « C’est inexplicable et précipité, juge Emmanuel Boutterin, un des responsables de l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES), conseiller prud'hommes depuis treize ans à Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence) et président de l’organisme de formation prud’homale de l’économie sociale. Bien sûr que des mesures de simplification peuvent être mises en place, mais cette réflexion aurait dû s’intégrer au grand débat sur la justice au XXIe siècle organisé autour du ministère de la justice. La justice du travail et le droit du travail seraient des “freins” à l’économie ? C’est une conception tout de même étonnante. » Jean-Pierre Gabriel, de la CGT, abonde : « Cela fait trois ans qu’on nous auditionne sous la houlette du ministère de la justice. Nous sommes bien d’accord sur le fait que la justice prud’homale va mal, mais là on nous sort tout à coup un texte absurde qui ne va rien régler. »
Mais les syndicats et les organisations patronales s’insurgent surtout contre la prééminence programmée du juge professionnel sur les conseillers prud’homaux. Et tous dénoncent la mise en place insidieuse de l’échevinage. Terme inconnu des profanes, introduit dans le débat français par le rapport Marshall en 2013, l’échevinage fait l’unanimité contre lui : il prévoit que le magistrat professionnel soit le vrai décideur durant toutes les étapes de la procédure, et que les conseillers salariés et employeurs ne soient plus que ses assesseurs, sans réel pouvoir de décision. Ce principe est une réalité en Belgique et en Suisse, mais aussi en France dans les tribunaux des affaires de sécurité sociale. Syndicats et patronat rejettent ce qu’ils vivent comme un manque de confiance, voire comme un mépris envers leurs représentants. « Pour résumer, les conseillers sont suspectés d’être partiaux et de ne pas très bien travailler, et il faut régler ça », peste Jean-Pierre Gabriel, le responsable du pôle juridique de la CGT.
« Les juges issus du monde du travail ne sont pas des subalternes. Ils rendent des décisions d’une très grande qualité, martèle Emmanuel Boutterin, le responsable patronal de l’économie sociale. Les prud’hommes ne sont pas un lieu de la lutte des classes, mais de justice, apaisée et équilibrée. La parité des points de vue entre conseillers salariés et conseillers employeurs font que les décisions sont bien ressenties par tout le monde, et rendues par des gens qui connaissent la réalité économique, et savent que le monde doit tourner. »
Pour Patrick, conseiller prud’homal parisien CGT, qui ne souhaite pas dévoiler son identité pour continuer à pouvoir travailler sereinement avec tout le monde, « l’arrivée insidieuse de l’échevinage est un très gros problème, notamment parce que les juges professionnels sont en général plus réactionnaires que les juges élus. Ou dit autrement, ils viennent d’un milieu qui est presque toujours moins sensible à la situation des salariés. » Et puis, estime Patrick, « donner une vraie responsabilité à des salariés à ce titre, c’est leur ouvrir la possibilité de se former au monde du droit, et même de la politique, c’est un accès privilégié au savoir, qu’on souhaite apparemment réduire ».
Cette levée de boucliers s’explique aussi par le fait que les syndicats ont très mal vécu la réforme du mode de désignation des conseillers prud’homaux, votée fin 2014. Jusqu’ici, ils étaient élus tous les quatre ans par l’ensemble des salariés et des employeurs travaillant en France (y compris ceux de nationalité étrangère), même si 75 % des salariés se sont abstenus lors de la dernière élection, en 2008. Ils seront désormais désignés par les syndicats, au prorata de leurs résultats aux élections professionnelles. Les syndicats dénoncent la disparition du dernier scrutin au suffrage universel pour les salariés, et la volonté d’ôter de la légitimité aux prud’hommes. Plus pragmatiquement, le gouvernement a sans doute surtout voulu s’épargner la dépense de 100 millions d’euros pour une élection très peu mobilisatrice.
Une réforme inefficace ?
Sur le fond même, il est loin d’être certain que les options retenues par le gouvernement soient fonctionnelles. « L’analyse du ministère de la justice, reprise par Bercy, s’appuie sur le fait que lorsqu’une décision prud’homale passe en appel, le taux de confirmation intégral de la décision est supérieur de 20 % lorsqu’un juge départiteur est intervenu sur l’affaire, explique Denys Robiliard. Le pari est de considérer qu’en professionnalisant davantage les juges, on fera augmenter le taux de confirmation intégral en appel, et donc qu'à moyen terme on fera baisser le nombre de dossiers aboutissant en appel. » Le législateur espère qu’une fois que les salariés ou les patrons auront compris que les jugements ne changent plus même s’ils sont portés en appel, ils y renoncent…
Ce « pari » est loin d’être gagné, estiment la plupart des spécialistes. D’abord parce que les affaires tiennent très à cœur aux parties concernées, et impliquent souvent le paiement de sommes importantes. Denys Robiliard lui-même est plutôt sceptique : « Nous sommes face au plus haut taux d’appel de France, et là, on n’est plus jugé par ses pairs, c’est un vrai problème, souligne-t-il. Mais est-ce dû au fait que ces affaires sont jugées par des non-professionnels ? Je ne le crois pas. Je crois que le taux d’appel ne dépend pas du type de juge, mais du type d’affaire. »
Décryptage de Patrick, le conseiller parisien : « Les salariés font beaucoup appel aussi parce qu’ils font énormément de demandes, et qu’ils espèrent toujours obtenir gain de cause en dernier recours sur l’un ou l’autre point qu’on ne leur a pas accordé. Quand il y a 23 demandes, il y a 23 raisons de faire appel. De l’autre côté, les patrons font appel pour gagner du temps et payer le plus tard possible. »
Par ailleurs, relèvent certains syndicats, les cas où le juge départiteur jugerait sans réunion du bureau de jugement classique peuvent poser problème en province, où il y a bien souvent un seul juge professionnel. Il sera donc bien identifié par les parties, qui sauront si elles ont intérêt à le solliciter ou non.
Le manque de moyens, vrai responsable
Enfin, tous s’accordent à trouver ridicule, car inapplicable, la volonté du gouvernement de vouloir accélérer les délais. Car tous pointent la véritable raison de cette lenteur extrême : le manque de moyens. L’idée de favoriser les formations restreintes de jugement est ainsi tenue pour irréaliste, car elle nécessite de trouver plus de salles, mais aussi plus de greffiers pour assurer un rythme plus rapide. Or, c’est justement ce dont manquent les conseils, qui souffrent chroniquement d’une pénurie d’argent, de salles, de greffiers et de moyens.
La journaliste Véronique Brocard, qui a arpenté pendent deux ans les salles du conseil des prud’hommes de Paris pour son livre Au cœur des prud’hommes (Stock), énumère des chiffres qui jettent une lumière crue sur la misère dans laquelle se débattent les juges du travail. En 2012, dans ce conseil où sont jugés 10 % des litiges du pays et où exercent 800 conseillers, on comptabilisait seulement dix exemplaires du code du travail, trois bureaux pour rédiger les jugements et dix ordinateurs. « Et ils ne sont connectés à internet que depuis cet automne, souligne la journaliste. Les prud’hommes, c’est la justice des pauvres, et une justice très pauvre. »
Tous doutent de la volonté réelle du gouvernement de s’attaquer à ce problème majeur, à l’heure des restrictions budgétaires tous azimuts. « À aucun moment, le gouvernement ne se donne les moyens de ses ambitions tant au niveau de la réforme structurelle des prud’hommes que financièrement, s’indigne ainsi la CFE-CGC. Il manque des juges départiteurs, des greffiers, des personnels administratifs, des moyens matériels et financiers pour les conseillers prud’hommes. » Jean-Pierre Gabriel, de la CGT, fait le même constat : « Un peu partout, des audiences ne se tiennent pas parce qu’on manque de greffiers, tout simplement. Il manque des greffiers, des salles, des ordinateurs, des codes du travail… »
Autant dire que la volonté affichée d’accélérer les procédures fait, au mieux, soupirer les connaisseurs. Qui rappellent qu’une loi de juillet 2014 oblige déjà les bureaux de jugement à statuer en un mois lorsqu’on leur demande de prendre acte de la rupture d’un contrat de travail. En réalité, souligne un connaisseur, « le délai est plutôt de 15 mois aujourd’hui » ! « Le problème essentiel de la réforme est qu’elle n’est pas chiffrée, rappelle Véronique Brocard, et je ne sais pas comment on fait une réforme sans argent. »
Même quand il entend réduire le nombre de procédures, le gouvernement n’est pas sûr de faire mouche. Car en multipliant la possibilité d’utiliser le juge départiteur, il va créer un goulet d’étranglement, le temps que les procédures déjà en cours soient écoulées, en même temps que les nouvelles arriveront directement sur le bureau du départiteur. Quant aux procédures d’appel, même l’étude d’impact du gouvernement convient qu’elles ne devraient pas diminuer rapidement : « À court terme et compte tenu du fait que les stocks d’appel existants doivent être écoulés, l’hypothèse d’une augmentation du départage sans baisse du volume d’activité en appel est la plus réaliste. » Il faudra donc embaucher des magistrats pour espérer faire tourner la machine mieux et plus vite. « C’est une évidence et un impératif : pour que la réforme marche, il faudra mettre plus de juges aux prud’hommes », insiste le rapporteur Denys Robiliard.
Y a-t-il un point sur lequel toutes les parties s’entendent ?
Oui, mais il n’est pas inscrit dans le texte de loi ! Tous les acteurs interrogés s’accordent pour dire que les premiers retards dans les procédures proviennent de conciliations qui n’en ont que le nom parce que les parties n’en sont même pas encore au point de se communiquer les diverses pièces du dossier, afin de savoir de quoi elles vont discuter. « Très souvent, les avocats des employeurs ne viennent pas chercher une conciliation, mais un calendrier des audiences suivantes », assure Didier Porte, de FO. Et ces avocats ont tout intérêt à multiplier les audiences, pour intervenir plus fréquemment et faire gonfler leurs honoraires.
Il faudrait donc, comme le préconisait le rapport Lacabarats, imposer une « mise en l’état » réelle des dossiers avant la séance de conciliation, peut-être avec des sanctions à la clé. « Cela est en effet de nature à accélérer grandement les procédures », convient le rapporteur Denys Robiliard. Mais il assure que ce point n’a pas été intégré au projet de texte parce qu’il relève en fait du champ réglementaire, et qu’il sera mis en place par décrets interposés. Les acteurs de la prud’homie attendent ces décrets avec intérêt, espoir et crainte.
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