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Copé, Fillon: et maintenant la guerre des styles à l'UMP

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La guerre des chefs, c’est fini. « La page a été tournée », et c’est Jean-François Copé qui l’assure. François Fillon a renoncé à revendiquer la présidence du parti et les militants consultés ont massivement refusé une nouvelle élection en juillet. Après un an de lutte fratricide, l’UMP va pouvoir jouer son rôle d’opposition et s’attaquer aux municipales. Mais la farce des élections internes, qui a bien failli désintégrer le parti, a laissé des traces. Il dispose désormais de pléthore de vice-présidents et secrétaires généraux également répartis entre « copéistes » et « fillonistes », qui ont fait rentrée à part. Laurent Wauquiez a délaissé les rangs fillonnistes pour faire cavalier seul et en a profité pour laisser une boule puante à un président de l’UMP déclaré fidèle parmi les fidèles de Nicolas Sarkozy : le droit d’inventaire. Retour sur la rentrée des deux «chefs», Copé et Fillon, faite ces derniers jours.

© LK

« J’ai été très déçu par les mésentantes de notre famille politique », raconte Nicolas, un étudiant  encarté à l’UMP depuis sa récente majorité. Venu écouter le discours de rentrée de Jean-François Copé en début de semaine au stade de Châteaurenard, près d’Avignon, il explique ne pas avoir voté en novembre dernier : « On était mal informés sur les différences entre les lignes des deux candidats, je n’ai pas pu me faire d’opinion. » Époque sombre, mais révolue, estime Yoan, 19 ans, « maintenant que nos problèmes internes sont réglés, on a envie d’entendre parler de politique ».

Des dizaines de tables ont été dressées sous une grande tente, devant la scène, pour accueillir les 2 000 militants et la quarantaine de parlementaires venus soutenir leur chef. En fait d’idée nouvelle et précise, Yoan pourra repasser. Jean-François Copé est surtout venu galvaniser les militants et asseoir son statut de leader politique. Au programme, un discours très sécuritaire et quelques idées pour 2017, déjà. Pourtant « l’objectif qui doit mobiliser toute l’UMP aujourd’hui, ce n’est pas 2017. C’est 2014. Les municipales puis les européennes. »

Son nouveau mot d’ordre, « la liberté », déjà développé la veille dans un entretien au Figaro Magazine, répondra aux attentes des Français « après cinq de joug socialiste » et « d’ultra-égalitarisme ». La bureaucratie et la fiscalité étouffent, la France a besoin d’une « vraie réforme des retraites ». Ses propositions ? Baisser les impôts, réduire de 10 % les dépenses d’un « État obèse », fusionner régions et départements.

La «cheerleader» des «copettes» parfait son costume.La «cheerleader» des «copettes» parfait son costume.© LK

Surtout, le président de l’UMP renoue avec un discours sécuritaire, qu’il ne souhaite laisser ni au FN, ni au ministre de l’intérieur. Gros succès auprès des militants des Bouches-du-Rhône acquis à la « droite décomplexée ». Et si Jean-François Copé assure que le cordon sanitaire avec le FN reste étanche, certains militants n’auraient rien contre un peu de pragmatisme local.

« On ne peut pas avoir d’accord avec le FN, c’est un parti qui se repaît sur les problèmes. Nous, on parle sans tabou mais on propose des solutions », estime un élu d’Aubagne. « Il n’empêche qu’il faut parler avec le FN quand c’est nécessaire, à un niveau local. »

La foule est conquise. Une petite femme tourne inlassablement autour du groupe en criant « Copé, président ! Copé, président ! » Sans que l’on sache très bien si elle parle  encore du parti ou déjà du pays. D’un bout à l’autre de la salle, elle poursuit son idole pour avoir à son tour bisou et photo. D’autres s’accrochent à son bras, façon rock star, et ses gardes du corps sont bien en peine de les éloigner sans brutalité. Jean-François Copé cristallise l’affection des militants et profite de l’élan de ses troupes pour s’émanciper de la tutelle de l’ancien président de la République.

Poignée de main, sourire, photo, bisous...Poignée de main, sourire, photo, bisous...© LK

En 2012, alors qu’il déclarait lors du même rassemblement sa candidature  à la présidence de l’UMP, c’était pour affirmer qu’il s’effacerait en cas d’un retour de Nicolas Sarkozy. Un an plus tard, la seule fois où il lui fait référence, c’est en l’associant aux 11 millions d’euros de dette que les militants ont remboursée. Pourtant quelle que soit la ferveur déployée, chez les militants, on attend toujours le retour du messie Sarkozy. « Chef naturel », « le seul à faire l’unanimité », un an après son échec électoral, Nicolas Sarkozy est toujours omniprésent chez les militants. « Copé est très bien mais il n’est pas mûr pour une présidentielle. En 2022, peut-être », estime un élu marseillais.

Changement de décor trois jours plus tard dans l’abbaye de Rouez-en-Champagne, où François Fillon a invité ses soutiens parlementaires et la presse. Un peu plus de deux cents personnes se rassemblent dans un cadre champêtre pour « débattre » au cours de trois tables rondes portant sur le chômage, l’insécurité et les prochaines élections. Au show politique de Jean-François Copé, François Fillon veut opposer un débat de fond.

Eric Ciotti et François FillonEric Ciotti et François Fillon© LK

« C’est l’occasion d’avoir le débat qui n’a jamais eu lieu l’année dernière », explique le député Pierre Lellouche. Ou de constituer a posteriori le « corpus idéologique » d’un mouvement qui s’est surtout constitué à partir de rivalités locales ou de sympathies et antipathies personnelles. Et la chose n’est pas aisée, surtout que la ligne de fracture n’est pas tant entre les familles Copé-Fillon qu’entre les différents courants rerésentés dans les deux camps.

Aussi, mercredi, si l’on s’entend sur les grandes lignes à suivre pour lutter contre le chômage et l’insécurité lors de tables rondes assez ronflantes, quelques voix dissonantes s’expriment. Faut-il prendre le pli de l’Allemagne et encourager le travail précaire ? « Quand je vois la situation de ces travailleurs pauvres, je ne vois rien de très enviable », répond le député européen Alain Cadec. Les peines de probation de Christiane Taubira ? Laxisme scandaleux ! Sauf pour le sénateur du Nord Jean-René Lecerf qui propose des solutions mixtes  (créations de places de prison et aménagement de peine) et la sortie des malades mentaux de prison.

À sa table, au déjeuner, François Fillon s’affiche auprès de… Luc Chatel, fervent copéiste et seul élu présent aux deux rassemblements.

À rebours du rassemblement populaire de Jean-François Copé, François Fillon continue de se tailler un costume de présidentiable et cultive son image de discret besogneux. Les militants, il les verra lors de ses « 18 mois sur les routes de France », « sans média », a-t-il confié dans un entretien à Paris Match. « Les primaires de 2016 sont ouvertes, il n’a pas besoin des militants », lâche un député avant de poursuivre : « il se verrait bien un destin à la Pompidou ». En vue, donc : convaincre par voie de presse les sympathisants susceptibles de venir voter en 2016.

Dans une situation quelque peu inconfortable vis-à-vis de Nicolas Sarkozy, Jean-François Copé s’est bien gardé d’évoquer devant ses militants le débat autour du « droit d’inventaire » de la droite. Le président a accepté le débat bon gré, mal gré. Interrogé par des journalistes, dimanche, Roger Karoutchi, comme Nadine Morano, ont fermement rejeté l’idée.

© LK

Malgré la présence de nombreux anciens ministres, le sujet est en revanche plus libre dans le camp sarthois. Les parlementaires ont peu goûté la leçon que Nicolas Sarkozy leur a servi lors de son intervention au bureau de l'UMP, le 8 juillet. Éric Woerth préfère le terme de « diagnostic », François Baroin estime que l’ancien gouvernement ne doit « s’excuser de rien » mais pour Pierre Lellouche, « il n’y a pas droit mais devoir d’inventaire ».

Chacun sa position, quant à François Fillon, le débat lui offert l’occasion de livrer sa propre « autocritique » en guise de conclusion de sa journée sarthoise : que ce soit en tant que ministre puis chef du gouvernement, il n’a pas mené l’ensemble des réformes qui lui semblaient pourtant nécessaires. La raison ? Il en a toujours été empêché par un « aîné » ou un supérieur hiérarchique qui jugeaient – « peut-être à raison » – qu’il s’agissait de mauvais calculs politiques. Voilà pour Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.

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