La rédaction de Charlie Hebdo a été la cible ce mercredi 7 janvier d'une attaque de la part d'au moins deux hommes armés – deux hommes sont entrés dans les locaux de l'hebdo, mais selon le ministère de l'intérieur, trois hommes sont actuellement recherchés. Selon les premiers éléments, douze personnes ont été tuées – dix journalistes et deux policiers –, quatre ont été grièvement blessées et sept blessées plus légèrement.
Les dessinateurs Cabu, Charb, Wolinski, Philippe Honoré et Tignous sont morts dans l'attaque. Charb, de son vrai nom Stéphane Charbonnier, était le directeur de la publication de Charlie. L'économiste Bernard Maris est également décédé dans la fusillade, ainsi qu'une personne assurant l'accueil du journal et deux autres journalistes non identifiés pour l'instant. Michel Renaud, ancien directeur de cabinet du maire de Clermont-Ferrand, fait partie des victimes. Président fondateur du Rendez-vous du carnet de voyage clermontois, Michel Renaud était venu rencontrer le dessinateur Cabu pour lui rendre les dessins qu'il avait prêtés à l'association clermontoise pour la dernière manifestation, fin novembre dernier, indique le quotidien La Montagne. Les deux policiers tués sont un membre de la brigade VTT du XIe arrondissement de 42 ans et un membre de la brigade de protection des personnalités de 49 ans.
Le journal est situé rue Nicolas-Appert dans le XIe arrondissement de Paris. Charlie Hebdo avait déjà fait l'objet d'un incendie criminel en novembre 2011, dans ses précédents locaux situés dans le XXe arrondissement. Selon un récit de Libération, les deux hommes armés qui ont pénétré dans les locaux cherchaient tout particulièrement Charb, le patron du journal.
Selon nos informations, Laurent Léger, journaliste d'investigation pour l'hebdomadaire, était assis à la table de réunion lors de l'arrivée des assassins. Il a eu le réflexe de se jeter sous la table et de prévenir la police. Indemne, c'est lui qui a également dû procéder à l'identification des corps de ses collègues. Il était mercredi en début de soirée interrogé par les enquêteurs.
L'attaque a eu lieu peu après 11 heures ce mercredi matin. Sur une vidéo filmée par Première ligne, une agence de presse télévisuelle, les deux hommes armés crient Allahu Akbar (Dieu est grand) à l'extérieur du bâtiment. Selon une source policière, les assaillants auraient également crié « Nous avons vengé le prophète ».
Jointe par téléphone par le journal L'Humanité, alors qu’elle était encore sur les lieux de la fusillade, la dessinatrice Corinne Rey a apporté ce témoignage : « J’étais allée chercher ma fille à la garderie, en arrivant devant la porte de l’immeuble du journal deux hommes cagoulés et armés nous ont brutalement menacées. Ils voulaient entrer, monter. J’ai tapé le code. Ils ont tiré sur Wolinski, Cabu… ça a duré cinq minutes… Je m’étais réfugiée sous un bureau… Ils parlaient parfaitement le français… Se revendiquaient d’Al-Qaïda. »
Sur place, un voisin, Ludovic Manche, a assuré avoir entendu « 40 ou 50 coups de feu » alors qu'il se trouvait dans son appartement du boulevard Richard-Lenoir, juste derrière les locaux de Charlie Hebdo. « Au début, j'ai cru que c'était des pétards de nouvel an chinois. J'ai vu par la fenêtre des policiers qui poursuivaient les malfaiteurs. Ils étaient deux personnes cagoulées, l'un d'eux avait un fusil de guerre. Ça tirait dans tous les sens. Dans la rue, les gens se cachaient derrière les voitures. Puis les tireurs sont partis dans une Citroën C1 noire. »
Une autre vidéo circule sur les réseaux sociaux, elle a été prise près du journal. On y voit deux hommes abattre de sang-froid un policier à terre puis retourner à petites foulées dans leur véhicule. Nous en avons extrait quatre images :
Les assaillants ont pris la fuite à bord d'un véhicule, avant de l'abandonner et d'en voler un second, à son tour abandonné porte de Pantin, au nord de Paris. Selon le ministère de l'intérieur, trois personnes sont actuellement recherchées. 3 000 policiers sont mobilisés. La justice a lancé un appel à témoin, avec un numéro à contacter : 08 05 02 17 17. Les autopsies auront lieu demain jeudi, selon le procureur de la République, qui tenait peu après 18 heures une conférence de presse.
Les trois auteurs ont été identifiés en début de soirée par la police, selon plusieurs médias. Sur Twitter, une fiche de recherche policière circule avec les noms des trois suspects, sans qu'il soit possible de confirmer.
François Hollande s'était rendu sur place vers 12 h 50. Il s'est adressé à la presse, parlant d'un acte d'une « exceptionnelle barbarie au cœur de Paris contre un journal, contre des journalistes ». Le président français a déclaré qu'il s'agissait d'un « acte terroriste ». « Cela ne fait aucun doute », a-t-il ajouté. « La France est aujourd'hui en état de choc devant un attentat terroriste, ça ne fait pas de doute », a déclaré François Hollande, accompagné du ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve, de la maire de Paris, Anne Hidalgo, du président de la région Ile-de-France Jean-Paul Huchon, et de plusieurs élus parisiens. La ministre de la justice Christiane Taubira s'est également rendue sur place, de même que les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, Claude Bartolone et Gérard Larcher.
Le chef de l'État a confirmé un premier bilan : 11 personnes ont été tuées. Quatre personnes sont dans un état « d'urgence absolue ». Mais, selon François Hollande, il ne s'agit pas encore d'un compte définitif. Le président a réuni à 14 heures à l'Élysée les ministres et responsables directement concernés par la protection à assurer sur tous les lieux potentiellement visés. Le plan Vigipirate est passé à « Vigipirate attentat ». François Hollande s'est rendu en fin de journée à la cellule d'urgence médico-psychologique à l'Hôtel-Dieu. Une autre réunion est prévue à l'Élysée jeudi matin.
Le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire, a pour sa part dénoncé « une attaque d'une violence démente, barbare comme il n'y en a jamais eu ». « C'est aujourd'hui sans commune mesure le jour le plus noir de l'histoire de la presse française », a-t-il ajouté. « Ils sont rentrés dans d'autres locaux mais n'ont pas tiré, ils visaient clairement Charlie Hebdo », a-t-il encore indiqué.
Un rassemblement était organisé à Paris à 18 heures, place de la République, à l'appel de RSF. La préfecture a annoncé la présence d'au moins 35 000 personnes (lire notre reportage ici).
Enfin, l'ensemble des partis de gauche (PS, PRG, PCF, PG et EELV) ont décidé ce mercredi d'organiser une marche silencieuse samedi à 15 heures au départ de la place de la République à Paris. La décision a été prise après une réunion des différents partis à l'Assemblée nationale. Cette marche est « ouverte à l'ensemble des partis républicains », a déclaré le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis. Contactées par Le Monde, l'UDI s'y est dite favorable mais l'UMP n'avait pas encore donné sa réponse aux organisateurs mercredi soir.
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