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Emmanuel Macron, le renard et le poulailler

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Emmanuel Macron a l’air de tomber des nues : ce mardi matin, sur Radio Classique, il était en colère contre Pierre Gattaz, le président du Medef : « Je n’ai pas à qualifier l’attitude de Pierre Gattaz, s’est-il écrié. J’ai simplement à dire que dans le pacte de responsabilité, il y a le mot responsabilité. Aujourd’hui, il y a très peu d’accords de branche qui sont signés. Aujourd’hui, c’est un échec et c’est aussi le sien. »

Rappel des faits : au lendemain de son élection, François Hollande, conseillé par un certain Emmanuel Macron, alors secrétaire général adjoint de l’Élysée, décide de se lancer dans ce qu’on appelle « une politique de l’offre ». Alléger les charges des entreprises, afin de les rendre plus « compétitives », ce qui permettrait de créer de l’emploi. Vingt milliards d’euros sont d’abord investis dans le CICE, le crédit d’impôt compétitivité emploi, complétés à partir de janvier 2014, par vingt autres milliards, le tout s’appelant désormais « pacte de responsabilité ».

La promesse est celle d’un échange « gagnant-gagnant ». J’allège tes charges, et en contrepartie tu allèges mon chômage en procédant à des embauches.

Un débat s’engagera à gauche, et jusqu’au cœur du gouvernement. D’un côté ceux qui se méfient, ou qui s’indignent : le Front de gauche, la plupart des écologistes, et une partie des socialistes inspirés par les frondeurs, considèrent que cet énorme chèque, quarante milliards, le plus gros jamais signé sous la Cinquième République, en pleine période de rigueur, est un cadeau pur et simple, et un contresens économique qui oblige à pressurer les ménages, donc à réduire la consommation au moment où il faudrait la relancer.

En face d’eux, les défenseurs du pacte voulu par le président de la République. Ils se disent convaincus que le Medef est un partenaire, et qu’il renverra l’ascenseur. Dans leur esprit, les quarante milliards d’allègement ne sont pas une dépense mais un investissement. Cette politique, présentée comme « la seule possible », est symbolisée par la déclaration d’amour de Manuel Valls, applaudi debout par le patronat, après avoir lancé son célèbre « j’aime l’entreprise ». Un choix si radical qu’il provoquera une crise au sommet de l’État, avec le départ d’Arnaud Montebourg, Benoît Hamon et Aurélie Filippetti.

Malgré ces remous politiques, qui se sont ajoutés aux catastrophes électorales des municipales et des européennes pour l’ensemble de la gauche, et malgré l’abstention des frondeurs socialistes, le budget a été voté, avec, pour les particuliers, des économies à tous les étages, et pour les entreprises les milliards du fameux pacte.

Au bilan, malgré une rafale de déclarations publiques allant dans le sens du Medef, à propos des chômeurs dormants, des trente-cinq heures bloquantes, ou du Smic mirobolant, le patronat n’a pratiquement engagé aucune négociation sur les contreparties du pacte, il est vent debout sur le volet pénibilité des retraites, et les petits patrons viennent de descendre dans la rue.

Emmanuel Macron, surnommé jadis « le Mozart de la finance », paraît découvrir ce décor. Un Macron apparemment tout étonné que Pierre Gattaz en demande davantage, et qui muscle son discours depuis quelques jours, comme s’il avait des doutes sur la politique du baiser sur la bouche illustrée par Manuel Valls, et qu’il voulait la remplacer par un bras de fer avec le patronat.

Macron qui découvre donc, en homme de gauche, et en émule de Montebourg, la bonne vieille fable du renard libre dans le poulailler libre. Le problème, c’est que son budget est voté et qu’on voit mal comment il s’y prendra pour lancer au patron des patrons : « rendez les poules » !

 

       

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