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Police: des élections syndicales sur fond de clientélisme

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Avis de tempête. D’ordinaire disciplinés, les syndicats de policiers multiplient les appels à battre le pavé à l’approche des élections professionnelles prévues début décembre : devant le palais de justice de Paris à l'appel du SCSI (premier chez les officiers) pour alerter sur l’état de la police judiciaire le 26 septembre, contre « la pression migratoire » dans le Calaisis à l'appel d'Unité SGP Police FO (majoritaire chez les gardiens et gradés) le 13 octobre, contre « la dégradation des conditions de travail et la perte de pouvoir d'achat » à l'appel d'Alliance police (deuxième chez les gardiens et gradés) le 13 novembre à Paris, etc.

Installés dans la cogestion, les syndicats de police disposent pourtant de suffisamment d’influence en interne pour rarement avoir à descendre dans la rue. Du 1er au 4 décembre, 125 000 policiers, ainsi que les autres personnels du ministère de l'intérieur, sont appelés à voter pour élire leurs représentants au sein des instances paritaires. Les revendications de cette campagne portent essentiellement sur des enjeux catégoriels : retraites, grilles indiciaires, cycles de travail, effectifs, etc. Flic est l’une des professions les plus syndiquées. Aux dernières élections de 2010, leur taux de participation frôlait les 83 %.

En 2008, Unité SGP Police FO était arrivé premier avec 47,8 %, suivi par Alliance police nationale (37,6 %) et l’Unsa police (9,7 %). Cette année, les cartes risquent d’être rebattues par l’application de la loi de 2008 sur la représentativité (lire en Prolonger), qui a obligé les syndicats policiers à se rattacher aux grandes confédérations (CFDT, CGT, FO, Unsa, CFE-CGC, CFTC). C'est ainsi qu’Alliance police, syndicat de gardiens et gradés, est désormais affilié à un « syndicat de l’encadrement », la CFE-CGC, auquel est également rattaché le Syndicat indépendant des commissaires de police (SICP), qui rassemble les patrons des gardiens.

De leur score dépendra la capacité des syndicats à peser sur les décisions du ministère au sein des instances paritaires, mais également une partie de leur budget (environ un cinquième). Chaque année, le ministère de l’intérieur verse à ses organisations syndicales les plus représentatives une aide financière « au titre de la participation à leurs frais de fonctionnement ». Ce pécule grossit avec le nombre de suffrages exprimés et est réparti selon les voix obtenues.

En 2014, 15 organisations syndicales policières ont ainsi touché 1,56 million d’euros, dont près de 1,2 million pour les syndicats de gardiens de la paix et de gradés (581 540 euros pour le syndicat majoritaire Unité SGP FO Police, 452 867 euros pour Alliance police nationale et 127 559 pour Unsa police). Un trésor de guerre si sensible qu’il a fallu saisir la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) pour que le ministère de l'intérieur nous donne accès à ces chiffres ainsi qu’aux comptes-rendus financiers des syndicats.

Cette subvention est une contrepartie de l’interdiction qui leur est faite, depuis 1995, de recourir à des régies publicitaires ou de démarcher eux-mêmes des annonceurs afin de se financer. À l’époque, les mandataires des syndicats n’hésitaient pas à proposer en échange d’argent des macarons à coller sur les pare-brises pour éviter les PV. « Les délégués régionaux vivaient comme des barons, car ils récupéraient l’argent, se souvient Philippe Capon, secrétaire de l’Unsa police (troisième syndicat de gardiens de la paix). Chacun sortait sa feuille de chou pour faire de la pub. » Après la condamnation le 30 janvier 1995 du patron du SNPT, mis en cause dans une affaire de démarchage abusif liée à la publicité de sa revue syndicale, l'ex-ministre de l'intérieur Charles Pasqua sonna la fin de cette faste époque.

Selon la convention signée par les organisations avec le ministère, la subvention peut servir à financer « loyers, dépenses téléphoniques, d’entretien, acquisition de mobiliers, de matériels informatiques, fournitures de bureau » ainsi que « certaines dépenses de communication (édition de documents, brochures, revues, organisation de congrès…) ». Pendant des années, plusieurs syndicats de gardiens de la paix ont ainsi confié la réalisation de leur revue ou du matériel de campagne à l’agence Credo créée par Alain Hamon, aujourd'hui journaliste d’iTélé, spécialiste des questions policières, ou à l’agence Fawa, tenue par Philippe Schwartz qui avait vendu des systèmes de vidéosurveillance au Conseil général des Hauts-de-Seine à l’époque Pasqua.

« Une campagne d’élection, c’est entre 200 000 et 300 000 euros, il y a près de 600 professions de foi », estime Henri Martini, secrétaire général d’Unité SGP Police FO, qui revendique entre 33 000 et 35 000 adhérents. La subvention finance aussi bien des dépenses de presse (abonnements aux agences) que les réceptions de certains syndicats, traditionnellement organisées dans des boîtes de nuit en présence du ministre de l’intérieur (5 946 euros au Bataclan pour le SCSI, principal syndicat d’officiers, en janvier 2013 ; 12 252 euros au Duplex pour Unité SGP Police FO en janvier 2011). La Fédération professionnelle indépendante de la police (Fpip), dirigée par Claude Choplin, un policier très proche du Front national dans les années 1990, y inclut elle des notes de restaurant (pour 600 euros au total en 2013).

Fin 2011, l’ex-ministre de l’intérieur Claude Guéant a remis un peu d’ordre dans les facilités de service accordées aux syndicats de police. Les abus devenaient trop flagrants. Pour la seule préfecture de police de Paris, le député PS Jean-Jacques Urvoas a ainsi avancé le chiffre de 351 « délégués syndicaux clandestins », dont 118 policiers membres du très droitier syndicat Alliance-Police nationale, rien que pour la région parisienne. « Aujourd’hui, il n’y a plus de détachés sauvages », assure Henri Martini. Selon Philippe Capon, le ménage effectué par Guéant a permis de récupérer « plus de 400 détachés syndicaux à temps plein ».  

« Il y avait une tolérance, qui subsiste en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, qui permettait à certains de bénéficier d’une couverture, explique le secrétaire général de l’Unsa Police. Un chef de brigade peut par exemple donner une matinée à un de ses hommes sans la décompter. Sur le logiciel, il suffit de rentrer la personne en renfort du chef de poste. » Ce que Jean-Claude Delage, patron du syndicat Alliance, qui nie tout abus, appelle malicieusement « utiliser les textes existants de manière optimale pour créer du dialogue social ». « Un ministre de l’intérieur veut la tranquillité, donc il préfère avoir quelques délégués syndicaux supplémentaires, pour apaiser les tensions, plutôt que d’aller chercher la petite bête », finit-il par reconnaître.

L’administration ne fait en revanche pas de cadeaux aux « petits » syndicats comme la CGT police Paris ou Sud intérieur (qui sont d'ailleurs les seuls, à notre connaissance, à avoir interrogé publiquement la responsabilité du ministère de l'intérieur à la suite de la mort du jeune militant Rémi Fraisse sur le chantier du barrage de Sivens, le 25 octobre 2014, lire ici et ici). « Pour une demi-journée d’absence, il faut déposer trois exemplaires de demande plusieurs semaines à l’avance et les chefs de service les refusent souvent », dit Anthony Caillé, secrétaire général du Syndicat CGT police de la région parisienne.

Henri Martini, secrétaire général du premier syndicat de gardiens et gradés, en septembre 2014Henri Martini, secrétaire général du premier syndicat de gardiens et gradés, en septembre 2014 © Yannick Sanchez

« Les syndicats sont plus stables que le personnel politique : ce sont eux qui tiennent la clef de l’intronisation du ministre auprès de ses troupes », explique le sociologue Fabien Jobard, chercheur au centre Marc-Bloch à Berlin, qui parle de cogestion et de néocorporatisme. De droite comme de gauche, les ministres de l’intérieur comprennent vite la musique. « À son arrivée, Nicolas Sarkozy (UMP) s’est appuyé sur des gens qui connaissaient bien l’intérieur, Guéant et Gaudin, raconte son ami Jean-Claude Delage. Il a eu l’intelligence de rapidement se rendre compte que les syndicats de police étaient nécessaires au fonctionnement de son ministère. Il a beaucoup fait en termes d’avancée de carrière, pour les fiches de paie, les fichiers d’empreinte génétique, et les moyens juridiques donnés. » En octobre 2008, Alliance Police nationale signe un plan de carrière : en contrepartie du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, des dizaines de millions d’euros sont distribués aux gardiens de la paix et gradés. En 2010, Unité SGP Police FO, devenu majoritaire, décroche leur passage en catégorie B. Malgré la révision générale des politiques publiques (RGPP), les policiers « font partie des rares fonctionnaires à avoir été augmentés », se réjouit Henri Martini.

Dans son rapport sur les policiers et les gendarmes de mars 2013, la Cour des comptes s’effare de cette « accumulation des mesures catégorielles ». Entre 2006 et 2011, en dépit de la suppression de 7 000 emplois, les dépenses de rémunération de la police nationale ont augmenté de 10,5 %, contre 4,2 % pour l’ensemble de la fonction publique de l’État. Dans l’entre-deux tours de la présidentielle de 2012, Sarkozy ira bien plus loin. Toutes les digues sautent dans l’espoir de s’assurer l’électorat policier et celui d’extrême droite. Le 26 avril 2012, à la suite du défilé des policiers sur les Champs-Élysées, le candidat promet « une présomption de légitime défense », une vieille revendication d’Alliance, de la FPIP et… du Front national.

Les caisses étant vides à son arrivée place Beauvau, l'ex-ministre de l'intérieur PS Manuel Valls marque lui son allégeance par l’abandon dès juillet 2012 du projet de récépissé visant à lutter contre les contrôles au faciès. Puis, en juillet 2013 dans un courrier à François Hollande, Valls torpille la réforme pénale de la garde des Sceaux Christiane Taubira, jugée laxiste par les syndicats de police. Ce qui a ensuite permis à Valls de faire passer en force un nouveau code de déontologie ainsi que le port du matricule, pourtant unanimement rejeté en décembre 2013 par les représentants des gardiens de la paix, des officiers et des commissaires.

Exemple de tract d'Alliance dénonçant le code de déontologie et la plateforme en ligne de la police des polices.Exemple de tract d'Alliance dénonçant le code de déontologie et la plateforme en ligne de la police des polices.

Dernière réforme à accrocher au tableau de chasse des syndicats, celle, controversée, de la police judiciaire en Corse. Face à la bronca unanime des syndicats, le nouveau ministre Bernard Cazeneuve a enterré en toute discrétion fin juin 2014 le projet de son prédécesseur. « Nous votons à 83 % aux élections alors forcément aller à l’encontre des syndicats… », souligne Henri Martini.

Ce taux de participation n’est pas une particularité française. « Dans un contexte de désyndicalisation mondiale, les syndicats rassemblent par exemple 75 % des policiers aux États-Unis », dit le chercheur Fabien Jobard. Les élections professionnelles servent à élire les représentants du personnel qui siègent à parité avec l’administration dans les commissions. Or, plus que dans n’importe quel autre ministère, la carrière d’un gardien de la paix dépend de ses commissions, présentes à chaque étape de sa vie professionnelle : lors de sa titularisation, à chaque mutation, chaque avancement, de gardien de la paix à major en passant par brigadier et brigadier-chef. Policier est, en outre, un métier particulièrement exposé.

En cas de blessure en service ou de problèmes disciplinaires, ce sont également des commissions paritaires qui se prononcent (même si le préfet ou le ministre ont le dernier mot). « Au total, un policier aura besoin du syndicat au minimum une dizaine de fois sur sa carrière », estime Philippe Capon.

Les syndicats sont présents dès les bancs des écoles de police. Un secrétaire général d’un syndicat cite l’exemple d’une école de police « où le délégué syndical est également chef de discipline et responsable de la mutuelle. C’est un mélange des genres impressionnant ! (...) Toutes les nouvelles recrues sont d’abord affectées en Ile-de-France, il est donc conseillé d’adhérer pour espérer repartir dans sa région d’origine », explique Fabien Jobard. « Le discours syndical fait partie de la formation », confirme un brigadier de police du Nord-Pas-de-Calais, dégoûté du système. « C’est le seul endroit où il faut être syndiqué pour avoir son grade. » Un patron d’un syndicat de la paix le reconnaît en off : « Le syndicalisme dans la police est clientéliste. » « Un policier non syndiqué peut avoir un déroulé de carrière normal, s’il est… chauffeur d’un patron », plaisante un autre.

Pour plus de sécurité, certains policiers vont jusqu’à adhérer à la fois chez Unité SGP Police FO et chez Alliance, les deux frères ennemis. « On fait passer untel qui est au syndicat au détriment d’untel plus compétent ou plus ancien sur son grade », décrit un haut fonctionnaire du ministère de l’intérieur. Sous couvert d’anonymat, ce policier fustige surtout la responsabilité de l’administration qui « accède aux demandes des syndicats en toute illégalité ». Selon le patron d’un syndicat de gardiens de la paix, ce système ne perdure qu’avec la bonne volonté du ministère de l’intérieur car « sur 100 dossiers dérogatoires, 40 sont syndicaux, mais 60 viennent de magouilles politiques, d’une intervention d’un parlementaire, d’un directeur de service ou d’un préfet », avance-t-il sous couvert d’anonymat.

En juin 2010, Le Point avait épinglé le secrétaire général d’Alliance Jean-Claude Delage et son adjoint Frédéric Lagache, promus sur des postes de « responsable d’unité locale de police » (Rulp), bonification indiciaire à l’appui. Il s’agit d’un intitulé de poste rare (moins de 600 ouverts depuis 2004) et normalement réservé aux policiers actifs qui « exercent des missions d’encadrement d’unités opérationnelles ou techniques les plaçant en relation directe avec l’autorité judiciaire ou les autorités locales » selon un arrêté signé par Nicolas Sarkozy lui-même. « Ce n’était pas une promotion politique, c’est un déroulé de carrière normal arrivé à la cinquantaine pour un détaché syndical », se défend Jean-Claude Delage. Plusieurs autres responsables syndicaux en ont bénéficié : Henri Martini fin 2011 et Philippe Capon début 2012. Ce dernier précisé qu'à l'âge 61 ans, cette nomination n'avait rien d'indu. 

Christian Delage, secrétaire général du deuxième syndicat de gardiens et gradés, en septembre 2014Christian Delage, secrétaire général du deuxième syndicat de gardiens et gradés, en septembre 2014 © LF

Depuis 2008 et le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, le nombre de promotions a toutefois chuté, réduisant d’autant les possibilités de piston. « Désormais, ça passe surtout par les postes dans des zones Suep (secteurs et unités d'encadrement prioritaire) qui permettent d’accéder plus facilement au grade supérieur, remarque Anthony Caillé. C’est un système totalement opaque. »

Dans cette cogestion assumée, les syndicats policiers assurent, par défaut, la communication de la maison police. Sur les faits-divers, la dernière réforme, ils sont souvent les premiers interlocuteurs des journalistes. « Les gendarmes, eux, ont une démarche  de communication proactive, avec des reportages clés en main », regrette Patrice Ribeiro secrétaire général de Synergie, le second syndicat d’officiers, lui aussi très à droite. Deux  styles : en octobre 2013 alors que l’ancien directeur général de la gendarmerie nationale Denis Favier montait au créneau devant les députés de la commission de défense pour obtenir une rallonge de moyens, son homologue policier Claude Baland suggérait au principal syndicat de commissaires, le SCPN, de s’exprimer publiquement à sa place !

En arrivant place Beauvau en 2012, Manuel Valls avait pourtant exhorté ses chefs de service, jugés trop frileux, à prendre la parole devant les micros. En vain. Un de ses proches se souvient de l’avoir vu décrocher le téléphone pour reprocher à un commissaire d’avoir laissé le syndicaliste du coin commenter à sa place le dernier fait divers sur une chaîne d’info en continu. Courage, fuyons ! « Plutôt que de risquer de se prendre une volée de bois vert de la part du préfet ou du procureur, un patron préférera donner les infos aux syndicalistes », souligne Philippe Capon. « Ce qui place les syndicats en position de force face à l'administration, car ils peuvent guider le niveau d’information du public sur des affaires sensibles », estime Fabien Jobard.

Face à la dureté du métier et son impact sur la vie privée (séparations, suicides, etc.), les syndicalistes locaux jouent aussi un rôle social important, délaissé par l’administration. « Moi je voulais faire syndicaliste, pas père de famille », plaisante un délégué parisien, qui vient de passer de longues minutes au téléphone à remonter le moral d’un de ses collègues. « On sait qu’untel est en train de divorcer, qu’untel a besoin de conseil, souligne Christophe Crépin, porte-parole de l’Unsa police. Il y a un climat de confiance, qui n’existe pas avec les psychologues de l’administration. »

Depuis l'éclatement en 1995 de la puissante Fasp (Fédération autonome des syndicats de police) qui codirigeait la place Beauvau, les syndicats policiers sont éclatés et ne cessent de se déchirer. En matière politique, les trois corps, gardiens de la paix et gradés, officiers et commissaires, ont chacun leurs deux syndicats principaux, se répartissant l'un à droite, l'autre à gauche. Très schématiquement, Unité SGP Fo Police, Unsa police, le SCSI et le SCPN militent plutôt pour une police de proximité, tandis qu'Alliance, Synergie et le SICP, très proches de Nicolas Sarkozy, sont pour le tout-répressif. Ce qui ne les a pas empêchés de s'opposer en chœur au récépissé. Car les syndicats policiers font surtout preuve d’opportunisme. « Il y a un double discours et un double jeu, décrypte Fabien Jobard. Les organisations syndicales veillent toujours à la fidélité à l’égard d’un parti, mais ne brûlent jamais les discrets vaisseaux qu'elles ont pris soin de placer chez le parti concurrent. Et paradoxalement, alors que la Fasp a beaucoup contribué à la rénovation des forces policières, ce syndicalisme très éclaté et compétitif qui lui a succédé est un espace dans lequel chacun peut accuser l'autre de ne pas défendre la maison police. La compétition aboutit à la moyennisation et à la médiocrité. »

Nommé par Dominique de Villepin au Conseil économique et social, Joaquin Masanet, patron jusqu’en 2008 de l’ex-Unsa Police syndicat unique (qui fit ensuite scission), fit ainsi ouvertement campagne pour Ségolène Royal en 2007, puis François Hollande en 2012. « J’ai donné un coup de main pour que tout se passe correctement lors des meetings, raconte-t-il volontiers. J’ai mis des mecs qui faisaient ça hors service. » Fin 2011 et début 2012, Nicolas Sarkozy n’oubliera pas avant son départ de récompenser ses amis policiers : Patrice Ribeiro, secrétaire général de Synergie officiers, et Frédéric Lagache, numéro deux d’Alliance, décorés de l’ordre national du mérite pour et Jean-Claude Delage, fait chevalier de la Légion d’honneur. En mars 2014, ce dernier a fait campagne aux côtés de Jean-Claude Gaudin, maire UMP de Marseille, sa ville d’origine. Le patron d’Alliance siège désormais au conseil d’arrondissement  des 13e et 14e arrondissements marseillais.

Bruno Beschizza, l’ancien patron de Synergie, a lui bénéficié de toute la bienveillance du ministère de l’intérieur pour s’engager sous la bannière de l’UMP. Opportunément nommé sous-préfet hors cadre en 2010, ce qui lui permit de siéger au conseil régional d'Île-de-France, l’ex-officier fut titularisé par Nicolas Sarkozy quelques jours avant l’élection présidentielle de 2012. Bruno Beschizza a depuis été élu en mars 2014 maire UMP d’Aulnay-sous-Bois, après qu’un Manuel Valls plutôt conciliant a autorisé son détachement parmi les administrateurs civils. Le secrétaire national à la sécurité de l’UMP conserve un bureau rue Miromesnil, près de la place Beauvau. Il y est rémunéré à mi-temps comme chef des systèmes de sécurité, sous la houlette du haut fonctionnaire de défense adjoint, Philippe Riffaut.

Une mission qui n'a rien de fictif, explique Bruno Beschizza : « Après la mort d'une gardienne de la paix à Bourges, on m'a demandé de re-toiletter complètement tous les processus de sécurité de l'ensemble des sites du ministère. » Mais la situation provoque aujourd'hui quelques grincements de dents place Beauvau. « Le nouveau secrétaire général du ministère, le préfet Michel Lalande, m'a récemment fait comprendre que cela ne lui plaisait pas que je sois dans ses locaux », explique Bruno Beschizza qui dit avoir travaillé « avec plusieurs préfets de gauche » et avoir « toujours été loyal ». Il compte demander prochainement son détachement total « pour ne pas mettre son service en difficulté ».

L'ex syndicaliste s’inscrit dans une longue tradition : Gérard Monate, fondateur de la toute-puissante Fasp, devint en 1981 conseiller de François Mitterrand avant d’être condamné en 1997 dans le volet marseillais de l’affaire Urba. Ses successeurs, Bernard Deleplace puis Jean-Louis Arajol furent eux élus à Paris, le premier comme maire adjoint PS à la mairie du XIXe arrondissement, le second comme conseiller UMP dans le XXe arrondissement, après avoir été embauché par Pasqua au conseil général des Hauts-de-Seine.

BOITE NOIREToutes les personnes citées ont été rencontrées en septembre 2014, à l'exception de Fabien Jobard joint par téléphone.

Prolonger : Retrouvez toutes nos informations complémentaires sur notre site complet www.mediapart.fr.

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