Robert Ménard assure-t-il la promotion du livre d'Éric Zemmour aux frais du contribuable ? La question mérite d'être posée à Béziers. Le maire, élu en mars avec le soutien du Front national, lance dans sa ville un cycle de conférences intitulé « Béziers libère la parole ! ». Objectif affiché : lutter contre « la censure et la pensée dominante » en invitant ceux dont la parole « dérange ce système ».
Le premier invité est le chroniqueur de RTL et du Figaro Magazine Éric Zemmour, condamné en 2011 pour provocation à la haine raciale. Il interviendra le 16 octobre pour une conférence au palais des congrès de Béziers, « pour son livre Le suicide français (Le Suicide français – Les 40 années qui ont défait la France, Albin Michel, ndlr) ». Sa promo a déjà commencé avec la une du Figaro Magazine, où il explique « comment on en est arrivé là », et un portrait qui lui est consacré dans Le Figaro.
Les habitants de Béziers ont, eux, découvert jeudi une campagne d'affichage dans la ville, où figurent le livre et le portrait du polémiste. « Entrée gratuite, livres sur place », précisent les affiches.
Les impôts des Biterrois ont-ils servi à financer cette campagne d'affichage ? Le palais des congrès est-il ouvert gratuitement à Eric Zemmour ? « Il s'agit d'une conférence organisée par la ville. Il n'y a donc pas de mise à disposition gratuite. M. Zemmour est invité, de même que, la semaine dernière, le Conseil général a invité des auteurs pour des conférences dans le cadre d'une fête du livre », répond à Mediapart la responsable communication de la mairie, Marie-Laure Corbière, en précisant que le coût des affiches s'élève à « 730 euros hors taxe ».
À Rue89, André-Yves Beck, le directeur de cabinet du maire, répond lui par l'affirmative à ces questions. « On va inaugurer un cycle de conférences avec des gens qui sortent des livres, le premier invité de la ville est Éric Zemmour. Le suivant sera Philippe de Villiers. Pour la suite, rien n’est fixé », explique-t-il également, en précisant que ce sont les services culturels de la mairie qui ont choisi les invités. « Il est bien évident que Robert Ménard s’intéresse de très près à tout ce qui est culturel », ajoute-t-il.
Ce cycle de conférences a été annoncé par Robert Ménard lors du conseil municipal du 18 septembre : « On croit trop souvent en France que les atteintes à la liberté de penser n’existent que dans des pays lointains aussi dictatoriaux que tropicaux. On a tort. Bien sûr, nul en France n’est envoyé en prison, torturé ou abattu pour ses écrits. La censure y est plus subtile. (...) Nous inviterons tous ceux qui ont quelque chose à dire qui dérange ce système. Ces paroles rendues publiques pourront être contradictoires les unes aux autres mais elles auront un point commun : penser la France, penser le monde, penser la culture différemment de ce qui est en place et qui a échoué depuis si longtemps. Patriote ou anarchiste, peu importe, pourvu que le robinet d’eau gluante de trente années de pensée unique sur les questions d’identité, d’économie, de culture ou de social, soit définitivement fermé. Parole libre donc, pourvu qu’il s’agisse d’une parole féconde. »
Cette annonce a notamment été relayée par l'hebdomadaire d'extrême droite Minute, le 24 septembre :
Ce cycle de conférences n'est pas sans rappeler la revue Médias, lorsque celle-ci avait été prise en mains par Robert Ménard et sa femme Emmanuelle Duverger (lire notre enquête). Le magazine avait alors ouvert ses colonnes à Jean-Marie Le Pen, Marine Le Pen, Alain Soral, Renaud Camus, le théoricien du « grand remplacement », Pierre Cassen, le fondateur de Riposte laïque qui « déteste l’islam », etc.
BOITE NOIREMise à jour: cet article a été actualisé le 26 septembre à 16h20 puis 16h40 avec les réponses de la responsable communication de la mairie.
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