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Un retour sous le feu des affaires

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Veut-il revenir à l’Élysée malgré les « affaires », ou, au contraire, à cause des affaires ? Entend-il se sacrifier (en faisant « don de sa personne à la France ») ou plutôt se protéger, en muselant juges et policiers, et en bénéficiant de surcroît d'une immunité présidentielle de cinq années ? C’est une des questions que pose le retour de Nicolas Sarkozy en politique, annoncé ce vendredi via un message Facebook (à lire ici). L’ex-chef de l’État, qui jurait vouloir changer de vie après sa défaite de 2012, avant de se raviser, est en effet gêné par plusieurs affaires judiciaires qui risquent de perturber son agenda et de parasiter ses prises de parole.

Dans un premier temps, Nicolas Sarkozy a d’ailleurs fait le choix tactique de pilonner les juges avant d’annoncer son retour. Il a adopté une posture de martyr, se disant victime d’un hypothétique complot politico-judiciaire. Un pari berlusconien à quitte ou double, car il peut indisposer plutôt que convaincre.

Plus récemment, l’ancien président de la République a reconstitué une véritable garde prétorienne. Il a ainsi décidé de confier le poste de directeur de campagne à Frédéric Péchenard (comme l’ont rapporté Le JDD et Le Monde). Promu directeur général de la police nationale (DGPN) par Nicolas Sarkozy avant d’être placardisé pour cause d’alternance, et alors qu'il avait échappé à une mise en examen dans l'affaire des "fadettes", Péchenard est un « grand flic » qui a fait carrière à la PJ, et sous la droite. Le tropisme policier de Nicolas Sarkozy, bien connu, l’avait déjà amené à faire de Michel Gaudin (ancien préfet de police de Paris et ex-DGPN, lui aussi) le directeur de son cabinet d’ex-président de la République, après la défaite. 

Aujourd'hui, ce double choix Gaudin-Péchenard est peut-être un gage d’efficacité, mais il n’est pas anodin. Il s’agit tout autant, pour le justiciable (et ancien avocat d’affaires) Sarkozy, d’être protégé que d’être informé et renseigné. Une conception de la politique qui accorde manifestement une place importante au risque d’opérations de basse police, ainsi qu’au péril judiciaire.

Nicolas Sarkozy en 2011Nicolas Sarkozy en 2011 © Reuters

Les dossiers ne manquent pas, qui peuvent légitimement nourrir cette inquiétude. L’affaire la plus handicapante pour Nicolas Sarkozy est indubitablement celle des écoutes Azibert-Herzog, dans laquelle l’ex-président est mis en examen depuis le 2 juillet pour  « corruption active », « trafic d’influence » et « recel de violation du secret professionnel », un sort qu’il partage avec son avocat et ami intime, Thierry Herzog.

Quand le fond d’un dossier est mauvais, les avocats attaquent volontiers la régularité de la procédure. Nicolas Sarkozy a donc réclamé récemment l’annulation des écoutes qui le visent devant la chambre de l’instruction, comme l’a révélé Mediapart. Il espère ainsi obtenir, par ricochet, l’annulation de sa mise en examen et, pour finir, celle de la procédure tout entière. La guérilla procédurale sera longue.

D’autres affaires menacent encore, à des degrés divers, Nicolas Sarkozy. Une information judiciaire suit son cours sur un possible financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007. En théorie, une autre mise en examen du candidat Sarkozy est donc possible.

Par ailleurs, deux enquêtes préliminaires sont en cours (au parquet de Paris), l'une sur le paiement de son amende à la suite de l’invalidation des comptes de sa campagne en 2012, l'autre sur le financement d’un meeting à Toulon fin 2011, qui laissent également planer un risque pénal au-dessus de sa tête.

À un degré moindre, Nicolas Sarkozy pourrait encore être rattrapé par l’affaire de Karachi. En se dessaisissant du dossier au profit de la Cour de la justice de la République (CJR), le juge Renaud Van Ruymbeke a en effet suggéré que l’ex-ministre du budget d’Édouard Balladur pourrait éventuellement être placé sous le statut hybride de témoin assisté (entre le simple témoin et le mis en examen) dans cette affaire d’État.

Il existe encore d’autres dossiers ennuyeux qui, s’ils ne visent pas directement Nicolas Sarkozy, disent beaucoup de choses sur l’exercice du pouvoir, sur ses amitiés et sur l’affairisme galopant sous son quinquennat.

Les fausses factures adressées par Bygmalion à l’UMP font ainsi l’objet d’une information judiciaire (ouverte le 27 juin par le parquet de Paris, pour « faux et usage de faux », « abus de confiance » et « tentative d’escroquerie ») qui s’annonce à hauts risques pour ce parti et ses dirigeants, au premier rang desquels Jean-François Copé.

Les dépenses de communication et de sondages du gouvernement Fillon font, elles aussi, l’objet d’une information judiciaire menaçante (pour « favoritisme » et « détournement de fonds publics »), qui a été ouverte le 29 juillet par le procureur national financier. Ce, alors que l’affaire dite des sondages de l’Élysée et de Patrick Buisson (dans laquelle une information judiciaire est ouverte, là aussi, pour « favoritisme » et « détournements de fonds publics ») suit également son cours depuis plusieurs années. 

À toutes ces affaires, il faut encore ajouter la double enquête menée sur l’arbitrage frauduleux rendu en faveur de Bernard Tapie. L’homme d’affaires avait été reçu plusieurs fois à l’Élysée, et son ami Sarkozy a toujours poussé en faveur de l’arbitrage. Une solution arrangée, qui a coûté 403 millions d’euros aux contribuables.

On peut encore y ajouter l’affaire François Pérol, un dossier dans lequel l’ancien conseiller de l’Élysée, bombardé à la tête de la BPCE par Nicolas Sarkozy, est mis en examen pour « prise illégale d’intérêts ».

Le tout sous réserve de ce qu’il pourrait encore advenir à des amis de l’ancien président aux prises avec les juges (et parfois devenus encombrants), de l’industriel Serge Dassault à l’ex-éminence Claude Guéant, en passant par le sulfureux député-maire de Levallois-Perret, Patrick Balkany et son épouse Isabelle. Autant dire que dans tous les cas de figure, la chronique des affaires de la Sarkozie n’est pas près de s’arrêter.

Ainsi, à partir du 26 janvier 2015, le procès de l’affaire Bettencourt, qui s’ouvrira pour quatre à cinq semaines au tribunal de Bordeaux, sera encore l’occasion de décortiquer les rouages de cet État-UMP, les intérêts imbriqués et les liens incestueux des milieux d'affaires et des grandes fortunes avec la Sarkozie.

Éric Woerth, ancien trésorier de la campagne de 2007 et de l’UMP et ex-ministre du budget de Nicolas Sarkozy, fera partie des prévenus et sera jugé pour « recel ». Avant un second procès, en mars, au cours duquel il sera jugé pour « trafic d’influence », au sujet de la Légion d’honneur offerte à Patrice de Maistre. Nicolas Sarkozy lui-même avait été mis en examen dans l’affaire Bettencourt, avant de bénéficier d’un non-lieu aux attendus très sévères.

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