Le débat n’était pas au programme d’une université d’été un brin déprimée, mais certains écologistes ont accepté de confronter leurs visions stratégiques pour les prochaines échéances électorales. Alors que les discussions médiatiques et les grands leaders et élus se concentrent sur les conséquences de la sortie du gouvernement, sujet ravivé par la parution du livre de Cécile Duflot, les ateliers et débats se tiennent studieusement, dans une atonie presque inquiète. En revanche, aucune confrontation n’a été prévue quant aux perspectives politiques désormais ouvertes.
Ce vendredi soir, à l’initiative du courant Love (gauche du parti, proche d’Eva Joly), des dirigeants d’Europe Écologie-Les Verts (EELV) se sont toutefois retrouvés dans un petit amphi de l’université de Bordeaux, pour faire le bilan de leurs différends tactiques.
L’ancienne candidate écolo à la présidentielle, Eva Joly, a estimé qu’« en 2017, nous ne devons pas refaire l’erreur de ma candidature, une candidature de témoignage, certes vaillant, mais sans aucune chance de victoire ». Et d’appeler à la construction d’une « plateforme », avec « les frondeurs du PS » comme avec « la gauche de la gauche », un périmètre qu’elle souhaiterait voir mis en œuvre « dès les prochaines régionales ». L’un de ses proches, Julien Bayou, par ailleurs porte-parole du parti, estime de son côté que « l’autre primaire de la gauche » que lui et les siens appellent de ses vœux (dans une tribune parue ce vendredi sur liberation.fr) doit permettre aux écologistes de « sortir de la prison de la Ve République » et de « dire aux socialistes qui ont bientôt un congrès qu’on veut travailler avec eux ».
De son côté, la députée Eva Sas a jugé prématuré de « penser dès aujourd’hui à 2017, ce n’est pas la question que se posent aujourd’hui les Français ». Selon elle, qui se félicite du départ du gouvernement (« À un moment, ça n’a plus de sens de rester dans ce gouvernement quand on vote si peu de textes à l’Assemblée »), s’interroger sur la primaire signifierait toutefois « que l’on renonce à faire bouger le gouvernement et les lignes d’ici 2017 ». Or, elle veut croire que « les choses vont continuer de bouger au parlement, et le gouvernement ne pourra pas rester éternellement dans le caporalisme ». Concentrée sur son activité parlementaire, Sas marque en outre « les différences fortes qui peuvent exister avec certaines recettes “à la papa” des frondeurs socialistes ou de la gauche de la gauche, sur la façon de créer la relance économique ». Puis, elle note aussi « le soutien des centristes de l’UDI sur plusieurs de nos amendements, surtout sur les questions environnementales ».
Pour l’eurodéputé Yannick Jadot, proche de Daniel Cohn-Bendit, les écologistes doivent plaider pour « une primaire la plus large possible », lui qui considère EELV « à équidistance du PS, du Front de gauche et du MoDem ». À ses yeux, cette primaire devrait permettre de « sacrifier François Hollande, de faire en sorte que l’intelligence collective puisse le sortir du jeu ». Lui redoute que le président sortant ne « trouve toujours une légitimité à se représenter, et il sera délicat de faire en sorte qu’il n’ait pas son parti derrière lui ».
Président du groupe EELV au Sénat, Jean-Vincent Placé a lui défendu « une primaire de l’ensemble des forces de gauche », car « une candidature écologiste seule n’a plus de sens ». Marquant son désaccord avec la proposition de Bayou et Joly, qu’il appelle « modèle grenoblois » en référence à la victoire municipale de l’écologiste Éric Piolle (allié au PG et à des mouvements citoyens, face au PS), il les a toutefois encouragés à « faire prospérer leur option », lui qui ne la « juge pas reproductible » en l’état. De son côté, après avoir été relancé par la salle, Placé estime que cette primaire ouverte de toute la gauche (« avec Duflot, Mélenchon, un socialiste, d’autres… ») se passera sans doute de François Hollande. « À lui aussi de faire vivre son option, voulant qu'il se représente naturellement, sans passer par des primaires. Mais si l'on paume les 14 nouvelles régions et qu’il est à 12 % dans les sondages, la réalité s’imposera d’elle-même… »
Yannick Jadot estime aussi « qu’on devra passer avec le PS, car il faudra être bigrement rassemblé face à Juppé/Bayrou si la gauche veut être présente au second tour ». Mais il avertit : « Il faudra passer cette fois un vrai accord de participation gouvernementale, avec le candidat finalement désigné. On ne pourra plus se satisfaire d’une croyance en un discours du Bourget. »
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