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Bygmalion, Sarkozy, bataille d'égos... : la sourde colère des députés UMP

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Ils sont « en colère », « déçus », « désespérés », « meurtris », « tétanisés ». Ils ont découvert l’affaire Bygmalion dans la presse et ont suivi le limogeage de Jean-François Copé via les réseaux sociaux. Ils attendent à présent le bureau politique de mardi pour savoir si le triumvirat Fillon-Juppé-Raffarin sera mis en place. Attendre, ils ne peuvent faire que cela.

Ce sont les députés UMP discrets, ceux qu’on ne voit jamais à la télé, mais qui se chargent, sur le terrain, d’assurer le service après-vente d’une situation qui leur échappe. Ils ont écouté Nadine Morano, Christian Estrosi et Brice Hortefeux réclamer à cor et à cri le retour de Nicolas Sarkozy. Ils ont entendu Xavier Bertrand expliquer que « toutes celles et ceux qui auraient à répondre aux questions posées sur le financement de la campagne présidentielle de 2012 (…) devaient se tenir à l'écart de la vie du mouvement et du congrès » prévu en octobre.

Ils ont également lu le papier du Point consacré à Jérôme Lavrilleux dans lequel l’ancien directeur de cabinet de Copé traitait Laurent Wauquiez de « raclure » et expliquait que François Baroin et Alain Juppé étaient « morts de l’intérieur ». Ils sont encore stupéfaits par l’idée « qu’on puisse cultiver la haine de cette façon ».

La plupart d’entre eux ont traversé la guerre Copé/Fillon pour la présidence de l’UMP sans mot dire, mais en prenant souvent partie pour l’un ou l’autre des deux candidats. Ils croyaient être sortis des batailles d’égos et se rendent compte aujourd’hui que « tout était sous-jacent ». Ils craignent pour l’avenir de leur parti. Veulent savoir ce qu’il s’est passé exactement. Et se posent beaucoup de questions. Où ont disparu les millions évoqués dans les médias ? Qui est responsable de ce « gâchis » ? Et surtout : comment et quand l’UMP pourra-t-elle enfin sortir de cette « catastrophe » ?

Nombre d’entre eux plaident en faveur d’un renouvellement de génération. Certains voient encore Nicolas Sarkozy comme la solution miracle, tandis que d’autres ne veulent plus en entendre parler. « Il est parti en disant qu’il ne referait plus de politique et qu’il voulait faire du fric. S’il revient, il faudra qu’il explique aux électeurs pourquoi il est allé donner des conférences à 200 000 euros pour des banques qui nous ont ruinés », s’agace ainsi Thierry Lazaro, député UMP du Nord.

Mediapart a interrogé ces élus que l’on n’entend jamais réagir aux affaires. Et qui aimeraient de temps à autre faire mentir l’adage de William Cowper : non, celui qui crie le plus fort n’a pas forcément toujours raison.

  • Thierry Lazaro, conseiller politique et député du Nord. Avait soutenu François Fillon en novembre 2012.

Thierry Lazaro.Thierry Lazaro. © Capture d'écran Dailymotion/Groupe UMP AN

« Ce que nous disent les militants ? N’en parlons même pas, tant c’est désespérant. Le pays n’est pas dirigé. Personne ne conteste l’inefficience de Hollande. Quant à nous, nous donnons une image déplorable… Les militants socialistes se cachent parce qu’ils ont honte. Et les électeurs de droite se cachent aussi, mais pour d’autres raisons, des raisons particulièrement troubles… »

« On en prend plein la tête sur le terrain. Moi, ça va encore parce que je suis un peu en marge, mais il y a une forme de désespérance. On est dans une cour de récréation remplie de gens qui aboient. Même dans une porcherie, on se tient mieux. Quand j’entends Lavrilleux qualifier Wauquiez de “raclure”, je me dis que ce n’est plus possible. Je ne jette pas l’opprobre sur Copé. Sa décision a été claire. Tout le monde fait haro sur lui maintenant, mais ce n’est plus le débat ! Qu’on nous dise où l'on va ! »

« On est au bord de l’implosion, je me demande même si l'on n’a pas déjà implosé. Quand j’entends parler de ces millions d’euros qui ont disparu, j’ai honte. J’espère que l’enquête judiciaire va aller vite. Ils sont tous là à dire que personne n’aurait osé parler à Nicolas Sarkozy pendant la campagne. Mais pourquoi ? C’était une terreur ? »

« Maintenant, on nous parle de son retour. Mais si Sarkozy voulait revenir, il n’avait qu’à le dire depuis longtemps et de façon claire. Ça nous aurait évité l’épisode de novembre 2012. Ce pas de deux, ça commence à bien faire. Il est parti en disant qu’il ne referait plus de politique et qu’il voulait faire du fric. S’il revient, il faudra qu’il explique aux électeurs pourquoi il est allé donner des conférences à 200 000 euros pour des banques qui nous ont ruinés. Autant je n’imaginais pas De Gaulle à l’arrière d’un scooter avec un casque, autant je ne l’imaginais pas non plus aller faire des conférences chez Goldman Sachs. »

« Sarkozy a réussi un tour de force en faisant croire qu’on n’avait pas vraiment perdu en 2012. Mais la claque a été horrible ! S’il avait fait preuve d’humilité, jamais nous n’aurions perdu. Cette défaite, c’est celle d’une forme d’arrogance. Et je ne vois pas en quoi il a changé sur ce point. On nous dit : “Il peut gagner parce qu’il a l’aura d’un président sortant.” Pardon ? Président sortant ? Non, président sorti, ce n’est pas la même chose. »

« Cela m’avait déjà hérissé de faire un chèque pour le “Sarkothon”. Moi, si mes comptes avaient été rejetés, on m’aurait craché dessus ! Vous voyez, je ne suis plus de bonne humeur. Je suis en colère, meurtri. J’ai participé à la fondation de l’UMP, je me suis battu pour ce parti. Pour en arriver là ? Mais qu’est-ce qu’on fait là ? Trente ans de combat politique pour me rendre compte que je n’ai servi à rien ? Toutes les vieilles barbes, j’en ai marre. Il faut que les jeunes prennent la relève. »

  • Marie-Christine Dalloz, conseillère politique et députée du Jura. Avait soutenu Jean-François Copé en novembre 2012.
Marie-Christine Dalloz.Marie-Christine Dalloz. © Capture d'écran Dailymotion/Groupe UMP AN

« J’ai le sentiment d’un gâchis terrible. Je suis profondément déçue. J’attends à présent que la justice fasse son travail et tout son travail. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais je veux le savoir. J’ose espérer que nous aurons des conclusions assez rapides sur le montant des sommes dont on nous parle. Tant que nous n’aurons pas de conclusions précises, ce sera difficile de travailler ensemble. »

« Dans la situation actuelle, il n’y a pas de leadership naturel. Personne ne sera convaincu par personne si l'on continue de diviser ainsi les écuries. Je crois que celui qui peut aujourd’hui rassembler l’ensemble de l’équipe, c’est Nicolas Sarkozy. »

« Ma grande naïveté a été de penser que le duel pour la présidence était définitivement derrière nous. Mais en réalité, rien n’était apaisé, tout était sous-jacent. Pour autant, je ne regrette pas d’avoir pris fait et cause pour Jean-François Copé en novembre 2012. Je suis atterrée par certains propos que j’entends. Jeter l’opprobre sur tout le monde, comme ça, ça me désespère. Ces échanges sont pitoyables. Ils ne sont faits que pour exister médiatiquement. Je n’imaginais pas qu’on puisse cultiver la haine de cette façon. »

« Les militants sont partagés entre la déception et la frustration. Certains sont en colère, mais ils arrivent tout de même à faire la part des choses entre la réalité et ces déclarations excessives. »

  • Pierre Morel-A-L’Huissier, conseiller politique, secrétaire départemental, conseiller général et député de Lozère. Avait soutenu Jean-François Copé en novembre 2012.
Pierre Morel-A-L’Huissier.Pierre Morel-A-L’Huissier. © datar.gouv.fr

« Je suis le seul député de Lozère, département dont le préfet est Guillaume Lambert, l’ancien directeur de campagne de Nicolas Sarkozy. Il s’est cloîtré dans sa préfecture depuis 6 jours. Personne ne le voit. Cela crée une atmosphère beaucoup plus lourde ici qu’ailleurs. »

« Les gens ne comprennent pas ce qui est en train de se passer. Ils me disent : “Vous, vous êtes à part, on vous connaît.” Je suis avocat, on me crédite d’une certaine éthique, mais je souffre quand même de cette situation. C’est très malsain. Les gens me posent des questions, mais je ne peux pas leur répondre car je ne sais pas moi-même. Et la non-réponse, c’est énigmatique pour eux et ce n’est pas bon pour moi. Il y a un amalgame très mauvais. »

« Les personnes que l’on voit dans les médias ne sont pas représentatives : Juppé, Fillon, Raffarin, Wauquiez, Morano, Hortefeux, NKM… Personne n’est en capacité aujourd’hui de prendre des décisions. Il va encore y avoir des départs forcés. L’UMP va être très chaotique. On est dans l’implosion. Je suis inquiet de ce qui se passe et je ne suis pas sûr de rester. Si ça continue comme ça, je me mettrai en réserve de l’UMP. À un moment donné, trop c’est trop. Je ne suis pas dans la vie politique pour ce pugilat. »

« Sarkozy n’est pas providentiel dans le sens où il a été battu par Hollande. Il a perdu alors qu’il ne se trouvait pas face à une grosse machine. C’est quelqu’un de brillant, mais pour moi, il n’était pas assez proche des territoires. Son gros échec, c’est son entourage. Je ne suis pas pour son retour. »

« Dans l’électorat rural de droite, les gens ne voulaient plus de Sarkozy. Ils considéraient avoir été abandonnés. Les militants voient qu’il est très velléitaire, mais que cela ne s’est pas traduit pendant son mandat. Ils disent : “On a vu pendant 5 ans, il a fait des choses, mais il n’est pas allé jusqu’au bout.” Tout ce qui se passe aujourd’hui… Ce n’est plus possible ! On ne veut plus de cela ! Il faut tout changer. »

  • Philippe Houillon, député du Val-d’Oise. Avait soutenu François Fillon en novembre 2012.
Philippe Houillon.Philippe Houillon. © Facebook/Philippe Houillon

« Les sympathisants et militants UMP sont tétanisés. Certains n’y croient même pas. C’est tellement énorme… Par rapport à la flopée d’informations qu’on a sur le sujet, les gens en parlent assez peu, non pas parce qu’ils ne s’y intéressent pas, mais parce qu’ils sont complètement désespérés. L’opposition avait vocation à reprendre très rapidement les rênes et à redonner confiance aux Français et finalement, ce n’est pas ce qui se passe. C’est désolant. »

« Nous autres, élus de terrain, nous avons la confiance de nos citoyens, nous gagnons des élections… Mais tout cela est écorné par des choses qu’on ne maîtrise pas. On ferait bien de nous écouter davantage. Quand on voit les propos que tiennent les uns et les autres… Ce n’est pas l’idée que la grande majorité des élus que nous sommes se fait de la politique. »

« Je ne suis pas sûr que le retour de Nicolas Sarkozy soit une excellente chose. Beaucoup de questions se posent. Est-ce qu’un ancien président doit reprendre la tête d’un parti ? Avec qui autour de lui ? Est-ce qu’il sera encore entouré de ces personnes qui ne font pas l’unanimité et qui sont celles que l’on entend aujourd’hui ? Il y a des questions sur cette affaire Bygmalion. Tôt ou tard, elles sortiront. Je pense qu’il va être encore plus une cible. Dans l’intérêt général du parti, est-ce que c’est une bonne décision ? Je ne sais pas. »

« Je n’ai pas le sentiment d’un amalgame entre ce qui se passe à l’UMP et nous autres, élus de terrain, mais c’est vrai que cela alimente cette vieille idée du “tous pourris”. C’est très désagréable. On prend pour nous alors que c’est injuste, on n’y est pour rien. On ne peut pas être fier de ce qui se passe. »

  • Éric Straumann, secrétaire national, secrétaire départemental, conseiller général et député du Haut-Rhin. Ne souhaite pas s’exprimer sur son soutien de novembre 2012.
Jean-François Copé et Eric Straumann.Jean-François Copé et Eric Straumann. © Facebook/Eric Straumann

« Je suis étonné par le sang-froid des militants. Contrairement à novembre 2012, je n’ai pas eu de retour de carte d’adhérent à l’UMP. Nos électeurs sont très contents de notre travail de proximité. Ils nous disent : “C’est à vous de monter et de faire le ménage.” Les gens sentent que l’on passe à autre chose. Tout le monde est dans l’attente. »

« On sait aussi que tout cela va passer et que plaie d’argent n’est pas mortelle. En 2012, c’était différent parce qu’on ne savait pas comment on allait sortir de la crise. Là, on en sort. Je ne sais pas si le triumvirat Fillon-Juppé-Raffarin est une bonne chose, mais la situation était tellement difficile qu’on ne pouvait pas faire autrement. »

« Je regrette les invectives. Les gens s’autodétruisent eux-mêmes. Quelqu’un comme Lionel Tardy (député de Savoie monté au créneau contre Jean-François Copé dès les premières révélations du Point sur l’affaire Bygmalion – ndlr) est totalement discrédité auprès des élus de base. »

« Nicolas Sarkozy mobilise fortement notre électorat. Les militants ont une volonté de revanche par rapport à la défaite de 2012. Je ne sais pas si son retour à la tête de l’UMP est une bonne chose parce que je pense que le futur président du parti ne devra pas être candidat aux primaires. »

  • Marianne Dubois, secrétaire nationale et députée du Loiret. Avait soutenu François Fillon lors de l’élection de novembre 2012 pour la présidence de l’UMP.
Marianne Dubois.Marianne Dubois. © Facebook/Marianne Dubois

« Ce qui se passe est catastrophique pour notre famille politique. Les propos qui sont échangés sont extrêmement violents. Militants, sympathisants, élus… On en a tous ras-le-bol. Nos électeurs ne sont plus en état d’entendre ni d’écouter qui que ce soit. Ce qui les intéresse, c’est leur avenir, et personne n’en parle. »

« Il faut quelqu’un de fort pour dire stop à tout cela. Je ne sais pas si cela peut être Nicolas Sarkozy, mais qu’importe la personne ou le courant dont elle est issue : il faut que tout ce spectacle s’arrête ! Les Français attendent autre chose de nous. »

« Chacun y va de sa petite phrase. C’est une situation très agaçante parce qu’on se rend compte qu’il y a plusieurs niveaux de députés : ceux qui sont dans les médias et ceux qui sont sur le terrain. Malheureusement, nous sommes tous mis dans le même panier. Et c’est à nous de justifier ce que font les autres… Du coup, on courbe le dos. »

  • Jean-Pierre Decool, député du Nord. Apparenté UMP, mais non encarté.
Jean-Pierre Decool.Jean-Pierre Decool. © Facebook/Jean-Pierre Decool

« Ces affaires font du mal à tout le monde. Je ne suis pas encarté à l’UMP et je ne le serai jamais. Le fait que je ne sois qu’apparenté met beaucoup plus à l’aise les militants, même si je sens qu’en ce moment, sur le terrain, on me parle moins facilement qu’avant. Il y a un peu plus de réserve. Ce qui se passe à l’UMP est regrettable, parce que les partis politiques devraient être les terrains de la démocratie et que ce n’est pas le cas. »

« Les électeurs sont à saturation de ce type de comportements. Les partis politiques ne prennent pas assez en compte les propositions du terrain parce qu’ils ont trop d’enjeux de pouvoir. Et ça, c’est absolument regrettable. Il faut que l’abcès soit rapidement crevé, sinon les affaires de l’UMP vont polluer le débat à droite pendant quelque temps. »

« Toute personne qui n’a pas une forme de virginité intellectuelle devrait renoncer à prendre le leadership de l’UMP. On voit bien qu’aux municipales, ce n’est pas la droite qui a gagné, c’est l’antisystème. Les gens ne veulent plus des barons de la politique. Il faut une révolution intellectuelle. »

  • Annie Genevard, conseillère politique, députée du Doubs et maire de Morteau. Avait soutenu François Fillon en novembre 2012.
Annie Genevard.Annie Genevard. © anniegenevard.fr

« Le premier sentiment que l’on a, c’est la désolation. On a l’impression que quelque chose est gâché. Passé le moment de colère et de rejet, les gens nous disent qu’ils restent tout de même attachés à l’UMP. Il est indispensable que la justice face la clarté très rapidement sur ce qui s’est passé. Il faut qu’on purge la dimension judiciaire de la situation. »

« La droite est fragilisée et cela m’attriste. Je suis estomaquée par ce que dit Lavrilleux dans Le Point. C’est calamiteux. Pour moi, ce n’est pas du tout représentatif de l’UMP. Les insultes abaissent ceux qui les profèrent. Il faut sortir de cette situation mortifère parce qu’il y a un réel danger. Le parti est dans une situation financière et morale dangereuse. Si l'on continue comme ça, il sera en péril. »

« On a énormément de talents à l’UMP. Sarkozy en est un, mais il n’est pas le seul. Les primaires départageront les tendances. En attendant, il faut calmer les esprits, redonner la parole aux militants et leur donner le sentiment qu’ils sont considérés, et pas seulement quand on leur demande de l’argent. »

  • Patrick Labaune, secrétaire départemental, député de la Drôme et conseiller général de Rhône-Alpes. Avait soutenu Jean-François Copé en novembre 2012.
Patrick Labaune.Patrick Labaune. © Facebook/Patrick Labaune

« Cette affaire est déplorable. Je vois que les choses évoluent et pas dans le bon sens pour nous. Avant, les gens me parlaient du résultat des européennes, de la montée du Front national. Maintenant, ils me parlent de Bygmalion… Les militants et les sympathisants sont en colère, ils ont le sentiment d’avoir été trompés et sont catastrophés pour la suite. »

« À l’UMP, tout le monde a sa petite musique, ses petits égos. Ça part un peu dans tous les sens. C’est O.K. Corral. J’en suis malade pour le mouvement. L’affaire Copé/Fillon avait meurtri les militants, mais depuis les municipales, on voyait un regain pour les adhésions et là, bingo, ça recommence à chuter. L’union fait la force. Tirer les uns sur les autres, ça ne paye pas. »

« Qu’on le veuille ou non, Nicolas Sarkozy pèse énormément au sein de l’UMP. Mais il y a des dizaines d’affaires… Le jeu continue. À voir. Les militants parlent de tout cela en disant que trop, c’est trop. Bygmalion, c’est un peu la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Cela peut ébranler la base. C’est pour ça que le retour de Nicolas Sarkozy risque d’être plus précipité. Il a une image de dynamisme, d’autorité, de compétence. Mais aujourd’hui, cette affaire Bygmalion, plus les autres, fait douter sur l’image du garçon. »

« Je suis un des plus anciens secrétaires départementaux de l’UMP. En 28 ans, j’en ai connu des hauts et des bas. La bagarre Balladur/Chirac en 95 a été aussi dure que la situation que nous traversons actuellement. Le grand gagnant de tout cela est évidemment le Front national. Pourtant, et c’est le paradoxe de la vie politique, nous allons continuer à gagner. Ou plus exactement, c’est le PS qui va perdre. »

  • Denis Jacquat, secrétaire national, député et conseiller général de Moselle. N’avait pris parti pour aucun des deux candidats en novembre 2012.
Denis Jacquat et François Fillon.Denis Jacquat et François Fillon. © Facebook/Denis Jacquat

« La crise que traverse l’UMP a un impact négatif sur les militants et les sympathisants. On sent une énorme déception. Je rencontre des gens qui me disent : “Si j’étais encarté à l’UMP, j’aurais rendu ma carte.” C’est la première fois que j’entends des propos de ce type. Il y a un malaise. »

« S’il y a des problèmes, il faut les régler entre nous, pas dans la presse. Chaque fois que quelqu’un de l’UMP prend la parole pour parler de nos problèmes, on perd 5 000 électeurs. Christian Jacob a demandé en réunion de groupe UMP qu’on évite les déclarations de ce type, or je vois que ça continue. Ce n’est pas sain. »

« Les gens sont déçus. La répétition des petites phrases rend tout cela nocif. N’oublions pas que nous sommes dans un contexte où le Front national est premier. Les personnes qui votent FN ne supportent plus la droite ni la gauche. Remonter est plus long que descendre. »

« Vu l’accumulation des petites phrases et des interrogations, il faudrait qu’il y ait une mise à plat et des réunions internes à l’UMP pour évoquer le problème. 11 millions d’euros sont partis quelque part, il faut savoir comment ils ont été dépensés. »

« Le retour de Nicolas Sarkozy ne me gêne absolument pas. Pour les militants et les sympathisants, il reste le préféré aujourd’hui. Sa présidence apparaît bien meilleure que celle de François Hollande. Des accusations sont faites contre lui, mais je m’en méfie comme de la peste. Je reste très circonspect sur les affaires judiciaires, surtout dans le milieu politique. »

  • Étienne Blanc, secrétaire national, député et président de la fédération départementale de l’Ain. Avait soutenu Jean-François Copé en novembre 2012.
Etienne Blanc.Etienne Blanc. © Facebook/Etienne Blanc

« L’UMP est composée de deux strates bien identifiées : celle des responsables locaux qui tirent leur force politique des militants et celle des responsables parisiens. Je m’aperçois que cette élite parisienne est aussi celle qui a les analyses politiques les moins foudroyantes. C’est un monde complètement déconnecté de la réalité. Bygmalion, c’est aussi le résultat de cette déconnexion. »

« Leur image, c’est aussi un peu la mienne. Quand ils hurlent, je suis éclaboussé. On nous met dans le même sac que les autres. Ce qui me frappe le plus, c'est que cette élite politique évolue dans un monde où la loyauté et l’éthique sont souvent absentes. C’est un monde qui existe en se singularisant sur des comportements qui ne sont pas dignes d’une famille politique. C’est exaspérant. »

« Nicolas Sarkozy est sans doute celui qui a le plus de talent. Il a vraiment une carte à jouer, mais est-ce que c’est le moment ? Toutes les affaires dont on parle vont être sur la place publique en 2016, ça va être compliqué. Sarkozy n’est pas très bien entouré. Ceux qui sont ses porte-parole ne sont pas respectés. »

« J’exige la vérité sur l’affaire Bygmalion. J’aimerais que l’UMP face un audit pour comprendre la chaîne des décisions. Car les responsabilités sont pénales, mais aussi éthiques. J’ai rencontré une femme qui a donné 20 euros pour le “Sarkothon”. Elle gagnait 420 euros de retraite par mois. Elle aussi a le droit à la vérité. »

« Quand vous êtes dans une entreprise, si quelqu’un manque d’éthique, on en tire les conséquences, mais en politique c’est toléré. C’est si vrai que quand les gens ont été condamnés, ils reviennent. Cela déclenche chez moi une amertume profonde et je ne vous cache pas que parfois, on a envie de poser le sac. »

BOITE NOIRESauf mention contraire, toutes les personnes citées dans cet article ont été jointes par téléphone les 5 et 6 juin.

Mise à jour, mardi 10 juin, à 12h : Annie Genevard, conseillère politique, députée du Doubs et maire de Morteau, a soutenu François Fillon en novembre 2012 et non Jean-François Copé. L'article a été amendé pour corriger cette erreur.

A lire aussi sur le blog de Tuxicoman : La blague de pétition pour demander l’accord de l’asile à Snowden en France


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