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Le débat sur la déchéance de la nationalité resurgit

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Après la tuerie au Musée juif de Bruxelles, Marine Le Pen, la première, a exhumé le débat sur la déchéance de la nationalité exploité par Nicolas Sarkozy en 2010 et 2011. Sur France Info, lundi 2 juin, la numéro un du FN s’est dite « prête à parier » que Mehdi Nemmouche, l’auteur présumé des faits, était binational pour plaider en faveur d’une révision du code civil.

Interrogé par Jean-Jacques Bourdin, mardi 3 juin sur RMC et BFMTV, l’actuel premier ministre a assuré qu’il n’y avait « pas de tabou ». « Nous pouvons déchoir de leur nationalité ceux qui s’attaquent aux intérêts fondamentaux de notre pays », a-t-il déclaré tout en ajoutant qu’« honnêtement, ce n’est pas ça qui règle le problème de fond ». Manuel Valls, qui avait jugé le sujet « nauséabond » lors de la précédente mandature Sarkozy, a indiqué ignorer si Mehdi Nemmouche, qui est né à Roubais (Nord), avait la double nationalité.

Manuel Valls n'exclut pas de déchoir Mehdi Nemmouche de la nationalité (à 10 mn 40 de l'entretien).

La déchéance de la nationalité est régie par l’article 25 du Code civil, qui prévoit que seules les personnes ayant acquis la nationalité française puissent être déchues de leur qualité de Français. Et encore faut-il qu’elles disposent d’une autre nationalité afin que cette décision, prise par décret après avis conforme du conseil d’État, ne fasse pas d’elles des apatrides – la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948 l'interdit.

Cette procédure est exceptionnellement mise en œuvre, les cas sont rarissimes (une vingtaine entre 1989 et 2010). Les conditions (non cumulatives) sont au nombre de quatre : avoir été condamné pour un crime ou un délit « constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation » ou « constituant un acte de terrorisme » ; avoir été condamné pour une « atteinte à l’administration publique commise par une personne exerçant une fonction publique » (chapitre II du titre III du livre IV du Code pénal), par exemple l'espionnage, la haute trahison militaire ou la sédition; avoir été condamné pour s’être soustrait aux obligations résultant du code du service national ; s’être livré au profit d’un État étranger à des « actes incompatibles avec la qualité de Français et préjudiciables aux intérêts de la France ».

À l’été 2010, lors d’un discours resté dans les annales prononcé à Grenoble (Isère), Nicolas Sarkozy avait ciblé les « délinquants d’origine étrangère ». Faisant fi de l'article 1er de la Constitution française (selon lequel la France est une « République indivisible » assurant « l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion »), il avait annoncé son intention d’étendre les cas de déchéance de la nationalité « à toute personne d’origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d’un policier, d’un gendarme ou de toute personne dépositaire de l’autorité publique ».

Cette offensive, intervenue deux semaines après des violences ayant eu lieu à Grenoble et Saint-Aignan (Loir-et-Cher), a marqué une étape dans la politique de différenciation des Français selon leurs origines mise en place par Nicolas Sarkozy. Au même moment, il avait désigné – en l’ethnicisant – une population, les « Roms », dont il appelait au démantèlement des campements.

La réforme de la déchéance de la nationalité n’a toutefois pas survécu à l’examen au Parlement du projet de loi sur l’immigration, l’intégration et la nationalité. En mars 2011, la mesure a été retirée avant le début des débats à l’Assemblée nationale en deuxième lecture, les centristes menaçant de ne pas voter le texte si cette disposition était maintenue.

Tout comme la remise en cause du droit du sol, cette polémique apparaît de manière cyclique dans l'espace public. En avril 2010, Brice Hortefeux, alors ministre de l’intérieur, avait écrit à son collègue chargé de l’immigration et de l’identité nationale, Éric Besson, pour lui demander d’étudier la possibilité de déchoir de sa nationalité le conjoint d’une femme verbalisée pour port de niqab au volant de sa voiture, au motif qu’il était suspecté de polygamie et de fraude aux aides sociales. L’ex-transfuge socialiste Éric Besson n’avait pu le satisfaire, envisageant une « adaptation législative », sans donner suite.

A lire aussi sur le blog de Tuxicoman : Actualité 03/06/2014


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