Quantcast
Channel: Mediapart - France
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2562

Des écoutes téléphoniques inquiètent l’avocat de Nicolas Sarkozy

$
0
0

Une nouvelle bombe judiciaire menace le clan Sarkozy. Comme l’a révélé L’Express ce mercredi matin, la juge d’instruction parisienne Patricia Simon est chargée depuis quelques jours d’une affaire très sensible où apparaît le nom de l’ancien président de la République. Chargée d’une information judiciaire contre X, ouverte le 26 février pour des faits de « trafic d’influence », la juge a, dès mardi 4 mars, fait perquisitionner les domiciles et bureaux respectifs de Thierry Herzog, avocat et ami de Nicolas Sarkozy, et Gilbert Azibert, premier avocat général à la Cour de cassation, l’un des magistrats les plus capés.

Selon des informations obtenues par Mediapart, ce sont des retranscriptions d’écoutes téléphoniques versées à l’un des dossiers en cours d'instruction au pôle financier du tribunal de Paris qui ont provoqué le déclenchement en urgence de cette nouvelle procédure. L’information judiciaire pour « trafic d’influence » a été ouverte par le procureur financier Éliane Houlette qui, à peine installée à ce nouveau poste, lance donc sans trembler des investigations en direction de Nicolas Sarkozy et ses proches. L'affaire est suivie de près en haut lieu.

Me Thierry HerzogMe Thierry Herzog © Reuters

On ignore pour l'instant qui était écouté, dans quel dossier, et quelle est la teneur exacte des conversations retranscrites. Mais selon des sources concordantes, et si l’information judiciaire est ouverte contre X, ce sont bien l’ex-chef de l’État et son avocat qui sont aujourd'hui soupçonnés d’avoir voulu exercer une influence sur Gilbert Azibert, au sujet d'un volet de l’affaire Bettencourt qui est pendant devant la Cour de cassation.

Il s’agit de la demande de restitution des agendas de Nicolas Sarkozy, qui avaient été saisis et placés sous scellés par le juge Gentil dans le cadre de l’affaire Bettencourt, après le non-lieu doux-amer obtenu par celui-ci.

L’ex-président réclame ses agendas au nom de l’immunité présidentielle. Il craindrait, dit-on, que leur contenu puisse être exploité dans d'autres procédures en cours. L’affaire a été examinée le 11 février par la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui doit rendre sa décision le 11 mars.

Affecté à la 2e chambre civile de la Cour de cassation, Gilbert Azibert ne traite pas lui-même ce dossier d'agendas présidentiels. « Les poursuites pour trafic d’influence supposent qu’on attendait de lui qu’il intervienne auprès de certains de ses collègues en poste à la chambre criminelle, où il connaît à peu près tout le monde », décrypte un magistrat. Selon plusieurs spécialistes consultés par Mediapart, on n’ouvre pas une information judiciaire de cette nature sans disposer d’indices probants. La contre-attaque du clan Sarkozy risquant, en outre, d’être violente.

Thierry Herzog n’est pas n’importe qui dans la galaxie Sarkozy. C’est un ami de trente ans de l’ex-président. Tous deux se sont connus comme jeunes avocats au début des années 1980 et sont restés très proches. Thierry Herzog est devenu le défenseur de l'homme politique Sarkozy, et il l'est resté quand celui-ci est entré à l'Élysée. Le cabinet Herzog a été associé de très près aux différentes plaintes déposées par Nicolas Sarkozy comme ministre de l'intérieur puis comme président de la République, que ce soit dans l'affaire Clearstream, ou encore l'épisode de la poupée vaudou ou celui du compte bancaire piraté.

Pénaliste chevronné, combatif, Thierry Herzog surveille aussi les différentes affaires menaçant son ami, et n’hésite pas à livrer bataille, notamment dans les dossiers Takieddine et Bettencourt. Adhérent revendiqué du RPR puis de l'UMP, l'avocat a été décoré de la Légion d'honneur par le président Sarkozy en 2009.

Au cours de sa longue carrière, Thierry Herzog a eu l’occasion de croiser la route de Gilbert Azibert en plus d’une occasion. Il a notamment, en juin 2001, obtenu de sa part l’annulation d’une partie du volet concernant Xavière Tiberi dans l’affaire des faux électeurs du Ve arrondissement, quand le magistrat présidait la chambre de l'instruction. Quelques mois plus tôt, l’avocat avait déjà joué la procédure avec succès pour obtenir de la cour d'appel l’annulation des poursuites visant l’épouse de Jean Tiberi dans une autre affaire retentissante, celle des salaires de complaisance du conseil général de l’Essonne (avec le fameux « rapport sur la francophonie »).

À l’époque, Gilbert Azibert était le redoutable président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris (poste qu’il a occupé de 1999 à 2002). Adulé par les avocats pénalistes, autant qu’il était honni par les juges d’instruction, le président Azibert avait annulé plusieurs dossiers d’instruction avec des attendus sévères, en invoquant des erreurs de procédures et des vices de forme, et avait gagné pour cela le surnom d’Annulator.

Gilbert AzibertGilbert Azibert

Étiqueté clairement à droite, Gilbert Azibert a occupé de hautes fonctions sous Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Il a notamment dirigé l’Administration pénitentiaire (de 1996 à 1999), l’École nationale de la magistrature (ENM, de 2002 à 2005), le parquet général de la cour d’appel de Bordeaux (de 2005 à 2008), avant d’être bombardé secrétaire général du ministère de la justice de 2008 à 2010. Homme de réseaux, en lice pour succéder à Jean-Louis Nadal à la tête du parquet général de la Cour de cassation en 2011, il a finalement été supplanté par son grand rival, Jean-Claude Marin.

Dans un passé récent, le Syndicat de la magistrature a dénoncé à plusieurs reprises la gestion autoritaire de Gilbert Azibert à la tête de l’ENM, et certaines de ses décisions controversées comme procureur général de Bordeaux.

Aucune mise en examen n'a été prononcée à ce jour, mais cette nouvelle affaire qui éclate peut potentiellement ébranler la magistrature et le barreau de Paris. Selon le Code pénal, le trafic d’influence est « le fait, par quiconque, de solliciter ou d'agréer, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour lui-même ou pour autrui, pour abuser ou avoir abusé de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable ». C’est un délit passible d’une peine de 5 ans de prison et 500 000 euros d’amende.

Curieusement, cette affaire éclate le jour même où Le Canard enchaîné et Atlantico révèlent des extraits des « enregistrements Buisson », qui attestent des pressions exercées sur la justice par Nicolas Sarkozy et ses hommes. Chose que l'on avait déjà découverte à l'occasion de la gestion du dossier Bettencourt par le procureur Courroye, grâce aux enregistrements effectués par un certain majordome.

BOITE NOIRESollicité par Mediapart ce mercredi matin, Thierry Herzog n'a pas donné suite. Quant à Gilbert Azibert, il a fait savoir (par le biais du parquet général de la Cour de cassation) qu'il ne souhaitait pas s'exprimer.

Si l'un ou l'autre changeait d'avis, leurs points de vue respectifs seraient bien sûr exposés ici.

A lire aussi sur le blog de Tuxicoman : GooglePlay Downloader 0.5


Viewing all articles
Browse latest Browse all 2562

Trending Articles