Alors que Matignon annonce, ce 13 juin, au lendemain des mises en examen de Stéphane Richard et Jean-François Rocchi, un recours en révision contre l’arbitrage frauduleux qui a enrichi Bernard Tapie, une procédure judiciaire discrètement lancée par des élus PS fin 2011 suit son cours parallèle, et pourrait bien parvenir au même résultat.
Le 16 décembre 2011, une assignation devant la 1re chambre civile du tribunal de grande instance de Paris a été adressée aux époux Tapie par Olivier Faure, alors secrétaire général du groupe socialiste présidé par Jean-Marc Ayrault à l’Assemblée, et une Association citoyenne, présidée par le député (PS) Christian Eckert et regroupant plusieurs autres élus. Depuis, Olivier Faure lui-même est devenu député (PS) de Seine-et-Marne (en 2012).
La prochaine audience de mise en état du dossier, qui conteste l’arbitrage frauduleux qui a enrichi Bernard Tapie, doit avoir lieu en juillet prochain. L’assignation adressée aux époux Tapie vise à « voir prononcer la nullité du compromis d’arbitrage signé le 16 novembre 2007, et de la sentence arbitrale rendue le 7 juillet 2008 », selon des documents consultés par Mediapart.
Confiée aux avocats Philippe Champetier de Ribes et Jean-Luc Lubrano-Lavadera, la procédure s’appuie sur l’article 2060 du code civil, qui stipule qu’« on ne peut compromettre sur les questions d’état et de capacité des personnes, sur celles relatives au divorce et à la séparation des corps ou sur les contestations intéressant les collectivités publiques et les établissements publics, et plus généralement dans toutes les matières qui intéressent l’ordre public ».
En clair : les plaignants soutiennent que le recours à un tribunal arbitral n’était pas légal, le CDR – l’organisme qui a repris les actifs pourris du Crédit lyonnais, et qui a finalement dû indemniser les époux Tapie –, étant un établissement public.
Jusqu’ici, l’avocat de Bernard Tapie, Maurice Lantourne, a joué la procédure en contestant la recevabilité des plaignants devant le tribunal. Dans leur réponse, les avocats d’Olivier Faure répliquent ceci (on peut lire leurs conclusions ici): le député est client et petit actionnaire (il détient une action) du Crédit agricole, banque qui a absorbé le Crédit lyonnais, et qui est encore redevable d’une dette de 12 millions d’euros envers le CDR, et il a donc un intérêt à agir.
Quant à l’Association citoyenne, elle entend se substituer au Crédit lyonnais, qui n’a pas engagé d’action en nullité de la sentence arbitrale.
Pour l’anecdote, la codification de l’article 2060 du Code civil, sur lequel s’appuie le député Olivier Faure et ses avocats, a été discutée le 5 juillet 1972 à l’Assemblée, et l’un des deux rapporteurs du texte n’était autre que le député Pierre Mazeaud. C’est-à-dire l’un des trois arbitres de l’affaire Tapie-Lagarde...
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