À Marseille, le nageur Frédérick Bousquet a annoncé mercredi 29 janvier 2014 qu’il se présentait aux élections municipales aux côtés de Jean-Claude Gaudin, candidat UMP et maire depuis 1995. Une quatrième prise de guerre après les ralliements de Monique Cordier, présidente de la confédération des Comités d'intérêts de quartiers (CIQ), de Jean-Claude Delage, secrétaire général d'Alliance Police, et de Julien Ruas, le président de la délégation marseillaise de la Croix-Rouge. Le vice-champion olympique sera en troisième position sur la liste du député UMP Dominique Tian, dans les 1er et le 7e arrondissements. L'équipe du député Patrick Mennucci, candidat PS à la mairie de Marseille, agite un possible « conflit d’intérêts ».
© Atelier CalasLe 9 décembre 2013, lors du dernier conseil municipal, la Ville a en effet autorisé in extremis une société fraîchement créée – introuvable sur Infogreffe –, la Compagnie des bains de mer de Marseille, à occuper, en échange de 25 000 euros par an, le Pavillon du lac, un chalet du XIXe siècle situé au beau milieu du parc Borély. Soit moins de 2 300 euros par mois pour 517 mètres carrés sans compter les terrasses, dans le très huppé 8e arrondissement de Marseille, à quelques dizaines de mètres de la plage du Prado. Pour comparaison, un appartement de 106 m2 avec terrasse donnant sur l’hippodrome près du parc Borély se loue 2 395 euros. À charge toutefois pour les occupants d’assurer la réhabilitation du bâtiment (inoccupé depuis une dizaine années) estimée à 597 988,04 euros par les services techniques de la Ville.
Le nom des heureux signataires de cette convention d’occupation d'un durée de quinze ans ? Jean-François Salessy, agent de Frédérick Bousquet et de son ex-compagne Laure Manaudou, et Paul Leccia, qui préside depuis 23 ans le Cercle des nageurs, où est licencié le sportif. Les deux hommes veulent transformer le Pavillon du lac, ancien bar glacier, en un centre de fitness et de remise en forme avec pour figure de proue la nageuse Laure Manaudou. Le Cercle des nageurs, haut lieu de la bourgeoisie marseillaise (1 350 euros de cotisation annuelle, 1 680 euros de droits d'admission, en sus du parrainage de deux membres depuis au moins cinq ans), reçoit chaque année quelque 250 000 euros de subventions de la Ville de Marseille.
Dans un communiqué envoyé mercredi midi, la conseillère municipale et candidate PS Nathalie Pigamo souligne que cette convention d'occupation temporaire du domaine public a été « passée dans l’opacité la plus totale et sans le moindre appel d’offres » et « pour un loyer extrêmement faible ». Et s’interroge sur un « possible acte de favoritisme dans cette affaire ».
« On est à la limite du conflit d’intérêts », a estimé Patrick Mennucci, mercredi matin lors d’une conférence de presse sur son projet sécurité. Vu l'état désastreux des piscines marseillaises et le sous-équipement de la ville, le candidat n'a pu s'empêcher d'ajouter que « Monsieur Gaudin remplace la pénurie de piscines par un champion olympique ».
« C’est la mairie qui nous a approché pour l’utilisation de ce pavillon, il n’y a aucun lien entre le centre de fitness et la candidature de Frédérick Bousquet », assure Jean-François Salessy, tout de même un peu énervé d’avoir appris par voie de presse le ralliement de son poulain. Lequel affirme avoir découvert le projet de son agent, de son ex-compagne et du patron du Cercle des nageurs… dans La Provence du 27 décembre 2013 qui consacre un article au futur centre de bien-être.
« Il était normal que les principaux acteurs ne veuillent pas l’ébruiter avant la signature, pour ne pas le compromettre », assure Frédérick Bousquet, qui dit avoir pris la décision de s’engager derrière Jean-Claude Gaudin, il y a « une ou deux semaines ». « Ça a été presque dans la continuité logique et naturelle de l’excellente relation que j’ai avec le maire et son équipe depuis mon arrivée en 2005 », explique le nageur.
« Les domaines ont estimé à 11 000 euros le montant annuel de la redevance et nous avons imposé 25 000, proteste Yves Moraine, maire (UMP) des 6e et 8e arrondissements. Le dossier est passé au conseil municipal, au contrôle de légalité, il n'a fait l'objet d'aucun recours ni de l'opposition, ni d'une société privée ! Patrick Mennucci a juste voulu pourrir l'entrée en politique de Frédérick Bousquet. » Selon le porte-parole de Jean-Claude Gaudin, « il y a eu d'autres projets privés » mais ils auraient tous échoué du fait du coût de la rénovation et de l’obligation de respecter les horaires du parc (de 6 heures à 21 heures) limitant les activités de restauration. La ville avait également songé à transformer ce chalet en une « maison de l’eau » en partenariat avec la Société des eaux de Marseille. « Ils ont renoncé car la SEM voulait que la ville prenne en charge la restauration évaluée à environ 840 000 euros », indique l’architecte alors chargé du projet. C'est finalement une société privée qui a emporté le morceau. Comme souvent à Marseille…
BOITE NOIREContacté, Paul Leccia n'a pas répondu.
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