Jeudi dernier, la loi sur le secret des sources des journalistes, qui devait être discutée ce jeudi 16 janvier à l'Assemblée nationale, avait disparu de l'ordre du jour de l'Assemblée. Le ministre des relations avec le Parlement, Alain Vidalies, avait annoncé le report de ce texte annoncé de longue date, promesse de campagne de François Hollande. Sans donner de nouvelle date, laissant planer le doute sur la volonté du gouvernement de faire voter cette loi. Finalement, alors qu’on le croyait quasiment enterré, des sources gouvernementales annoncent à Mediapart qu’il reviendra à l’Assemblée nationale le 14 mai. Après les élections municipales. Le texte pourrait être étudié en procédure accélérée.
Pour repousser le texte, le gouvernement avait invoqué jeudi dernier le calendrier. « C’est moi qui ai demandé le report du texte. Je tenais à manifester ma mauvaise humeur : le programme des prochaines semaines est juste intenable, et l'on ne pouvait pas supprimer d'autres textes », justifie Jean-Jacques Urvoas, président de la Commission des lois de l'Assemblée nationale.
Ce retrait surprise avait toutefois choqué les syndicats de journalistes et plusieurs parlementaires de gauche, comme la communiste Marie-George Buffet ou l'écologiste Noël Mamère. « Évoquer le calendrier n’est qu’un prétexte, s'insurge la députée Front de gauche. Comment comprendre qu’on supprime ce texte, alors que l’Assemblée va examiner la semaine d’après une loi sur les moniteurs de ski qui sert uniquement à répondre à des intérêts particuliers ? En réalité, la loi garantissait une bien meilleure protection des sources des journalistes : c’est ça qui n’a pas plu. »
Derrière ce retrait, certains parlementaires ont voulu voir l’intervention du ministère de l'intérieur ou de la défense, qui se seraient inquiétés d'une nouvelle mouture de la loi jugée trop favorable aux journalistes. Ces dernières semaines, les députés ont en effet substantiellement réécrit le projet de loi initial de la garde des Sceaux Christiane Taubira. Ils ont notamment supprimé une disposition qui justifiait la violation des sources des journalistes quand l'« intérêt supérieur de la nation » l'exigeait. Une notion très vague qui aurait pu justifier tous les abus pour limiter la protection des sources.
« Ces deux ministères n’ont exprimé aucune réticence », assure au contraire Urvoas. En réalité, selon nos informations, le report de la loi la semaine dernière est dû à un vif débat entre la garde des Sceaux, Christiane Taubira, favorable à une loi protégeant davantage les journalistes, et Jean-Jacques Urvoas, un proche de Manuel Valls, inquiet d’une loi trop laxiste aux yeux des hiérarques de la police et du renseignement.
Pour l’instant, une nouvelle date d’examen de la loi à l’Assemblée est programmée. Mais rien ne dit qu’après les municipales, il n’y aura pas un nouveau report (comme cela s'est déjà produit en 2013 : Christiane Taubira avait en effet présenté son projet de loi le 12 juin dernier en conseil des ministres). Rien ne dit non plus que des amendements parlementaires ne viendront pas dénaturer le texte ou qu'il ne sera pas tout simplement enterré. Ce ne serait pas la première fois.
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