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Faïza Zerouala : «Porter le voile est le résultat d'une recherche spirituelle»

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Les femmes musulmanes voilées se trouvent en France dans une situation paradoxale : elles cherchent à signifier leur attachement à Dieu en se protégeant des regards, mais elles produisent l'effet inverse sur la société. Leur foulard, perçu comme un signe religieux « ostensible », selon le jargon législatif, leur donne une visibilité accrue. L'attention portée sur elles n'est pas bienveillante : elles suscitent plus fréquemment l'hostilité que l'empathie.

Tout le monde, ou presque, a quelque chose à redire sur leur tenue. Le dernier rapport annuel de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) constate ce rejet : le port du voile est jugé négativement par près de huit Français sur dix. Les violences physiques et verbales visant les musulmans touchent en priorité les musulmanes, attaquées au motif que leur apparence ne cadrerait pas avec le modèle républicain. Au centre du débat politico-médiatique, les premières concernées restent pourtant silencieuses. Le plus souvent parce que les médias ne les invitent pas à s'exprimer. 

Dans son livre Des voix derrière le voile, publié en mars 2015 aux éditions Premier Parallèle, Faïza Zerouala leur donne la parole. Aussi simple soit-elle, la démarche est rare. Elle rappelle l'ouvrage d'Ismahane Chouder, Malika Latrèche et Pierre Tevanian, Les femmes voilées parlent, publié à La Fabrique en 2008. La journaliste au Bondy Blog, ex du Monde, a recueilli les témoignages de dix de ces femmes. Toutes portent le foulard de leur plein gré. Pour des raisons très différentes les unes des autres (la fin de l'adolescence, une séparation, une maternité, dans tous les cas en quête d'un « cheminement spirituel »). Mais toutes le font en connaissance de cause : elles savent qu'en faisant ce choix, qu'elles considèrent comme une prescription de l'islam, elles s'exposent à d'innombrables difficultés. Constamment appelées à se justifier, elles voient les offres d'emploi leur échapper, sauf dans les secteurs du nettoyage ou de l'aide à la personne.

« Que certaines femmes voilées soient soumises à la pression de leur entourage, c'est certain, mais mon expérience de journaliste ne m'a jamais conduite à aucune d'entre elles et ce n'est en aucun cas une volonté de ma part. Il faut croire qu'elles ne sont pas légion », écrit l'auteure, répondant à l'une des idées reçues les plus ancrées. « Leur choix est perçu par une partie de la société comme un enfermement, là où elles ont précisément le sentiment d'exercer leur liberté », insiste-t-elle. Certaines se revendiquent féministes. « Aucune ne se sent fossoyeuse des droits des femmes, assure la journaliste. Au contraire, elles ont le sentiment de prouver que le destin des Occidentales, dont elles font partie, n'est pas de finir à moitié nue dans un clip de rap ou dans une pub pour du déodorant. » Au fil des entretiens, le voile s'efface et les personnes apparaissent, avec leur complexité, leur drôlerie, leur radicalité et leur volonté de s'affirmer.

Face aux mises en cause, chacune élabore sa propre stratégie de défense. Dans la jeune génération, Faïza Zerouala perçoit une certaine fierté, une forme d'affirmation de soi, signes qu'un début de retournement ou de réappropriation du stigmate est à l'œuvre.

Des voix derrière le voile, Faïza Zerouala

Éditions Premier Parallèle, 255 pages,

15 euros en papier, 5,99 euros en version numérique (à retrouver ici)

Mars 2015.


 

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