Un homme qui est entré dans le hall du quotidien Libération, lundi 18 novembre en milieu de matinée, armé d'un fusil de chasse, et a blessé un photographe avant de réussir à prendre la fuite, était toujours introuvable ce mardi matin à 6 h 30, malgré l'important dispositif policier déployé dans la capitale.
Le photographe, âgé de 23 ans, très grièvement blessé au thorax et à l'abdomen, venait effectuer une séance photo pour le supplément Next. Mardi matin, au micro de France-inter, le directeur de la publication du quotidien, Nicolas Demorand, a expliqué que le jeune photographe blessé allait « un peu mieux » mais restait « dans un état critique ». En fin de journée, le quotidien Libération a annoncé que le jeune homme avait repris conscience, et qu'il pourrait sortir de l'hôpital d'« ici 24 heures ».
Vers midi, un homme d'une quarantaine d'années – vraisemblablement le même que le tireur dans les locaux de Libération – a également fait feu devant la tour de la Société générale à la Défense, sans faire de blessés. L'auteur des tirs aurait ensuite pris en otage un automobiliste jusqu'aux Champs-Élysées avant de le relâcher.
Selon une source judiciaire, le tireur aurait expliqué à l’homme de 65 ans pris en otage qu’il était en cavale. « Je suis évadé de prison, conduisez-moi sur les Champs-Élysées. » Depuis, d'importants moyens policiers ont été déployés dans l'ouest parisien, notamment un hélicoptère.
Lors d'une conférence de presse, François Molins, procureur de la République, a annoncé que « la piste d’un auteur unique est privilégiée ». Selon le procureur, il s'agirait d'« un homme de type européen âgé de 35 à 45 ans, d'une taille d'1,70 m à 1,80 m aux cheveux poivre et sel avec, s'il en est toujours porteur, une barbe de deux ou trois jours ». La préfecture de police a également diffusé des images de vidéosurveillance et lancé un appel à témoins pour retrouver le suspect (numéro vert : 0800 00 27 08 / adresse mail : pppj-appelatemoins@interieur.gouv.fr).
En visite officielle en Israël, le président de la République François Hollande a condamné les attaques. « C'est la liberté d’information qui est visée. » François Hollande a également « donné au ministre de l’Intérieur instruction pour que tous les organes de presse soient protégés » et expliqué que la priorité était « d’arrêter celui qui a tenté de tuer et qui peut tuer encore ».
Les ministres de l’intérieur, Manuel Valls, et de la culture, Aurélie Filippetti, se sont rendus dès lundi matin au siège de Libé avec le maire de Paris, Bertrand Delanoë. « Toutes les mesures sont prises à la fois pour retrouver celui qui a commis cet acte et pour sécuriser l’ensemble des organes de presse dans la capitale », a déclaré Aurélie Filippetti. « C’est la première fois qu’un organe de presse est ainsi frappé », a souligné la ministre.
De nombreuses rédactions parisiennes (Le Parisien, Le Monde, Les Échos, Le Figaro, Europe 1…) ont activé leurs dispositifs d’urgence. À Radio France, les vigiles ont revêtu leurs gilets pare-balles. Des policiers ont été déployés devant des rédactions de la capitale.
« Quand on entre avec un fusil dans un journal, dans une démocratie c’est très, très grave, quel que soit l’état mental de cette personne. Si les journaux et les médias doivent devenir des bunkers, c’est que quelque chose ne tourne pas rond dans notre société », a déclaré le directeur de publication du journal, Nicolas Demorand.
Dans un communiqué, le secrétaire général de Reporters sans frontières, Christophe Deloire, a condamné l'attaque de Libération, considérant que l'acte est « tout simplement répugnant. Au nom de Reporters sans frontières, j’exprime notre profonde consternation et notre solidarité avec les équipes de Libération et de NextradioTV. Nous comptons sur les forces de police pour arrêter au plus vite le ou les auteurs de ces agressions, pour éviter que deux actions criminelles ne deviennent une série noire de plus en plus tragique ».
D'après les images de vidéosurveillance de BFM TV, l'homme qui avait menacé avec une arme plusieurs personnes au siège de la chaîne de télévision, vendredi 15 novembre, serait celui qui a ouvert le feu à Libération ce matin, blessant gravement le photographe.
Retrouvez en page 2, les réactions et communiqués des principaux partis politiques et syndicats.
Jean-Marc Ayrault, premier ministre : « Cet acte inqualifiable, et particulièrement grave, constitue une attaque directe contre l’un des piliers de notre démocratie, la liberté de la presse […].Le Premier ministre tient, en ces circonstances dramatiques, à apporter son entier soutien à la victime et à sa famille, ainsi qu’à l’ensemble des journalistes et professionnels du monde de la presse, qui peuvent compter sur l’engagement du Gouvernement pour garantir et protéger l’exercice de cette liberté fondamentale. »
Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP : « Quelques jours après une tentative d'attaque similaire contre BFM, c'est bien la profession des journalistes qui semble être visée. C'est l'idée même de la Liberté qui semble prise pour cible. La liberté d'expression et d'information sans laquelle il n'y a pas de démocratie possible. Personne ne peut l'accepter, [...], Au nom de toute l'UMP, j'exprime ma solidarité totale envers la rédaction de Libération ainsi qu'à l'ensemble des journalistes. Personne ne doit céder à la violence ou à la peur : tout doit être fait pour que les journalistes puissent continuer à exercer librement leur métier, dans la plus grande sécurité, au service des Français. »
David Assouline, porte-parole du parti socialiste : « Nous sommes sous le choc, bouleversés par cet acte de violence contre le journal Libération. Nous pensons tout d'abord à ce jeune photographe dont le pronostic vital est engagé. Nous pensons principalement à ses proches, sa famille, à ses collègues du journal Libération. Cela intervient dans un moment où notre société vit un climat de violence insupportable. Violence des mots, violence des actes qui maintenant touche les journalistes, dont la mission est indispensable à la vie démocratique de notre pays [...] »
Pierre Laurent, secrétaire général du PCF : « En ces moments difficiles, je tiens à exprimer tout mon soutien à l'ensemble de la rédaction et des salariés de Libération. L'émotion suscitée par l'événement tragique survenu ce matin dans vos locaux est à la hauteur du symbole que représente votre journal et plus généralement le rôle et la place des journalistes et de la presse dans notre société. En tant qu'ancien confrère, vous connaissez mon attachement à ce beau métier qu'est celui de journaliste et à son indissociable liberté d'exercice. En espérant que le coupable soit arrêté et jugé pour cet acte inacceptable et que le jeune photographe blessé se rétablisse rapidement. »
Jean-Luc Mélenchon, co-président du Parti de gauche : « L'odieuse agression armée dont a dû souffrir Libération après BFM-TV montre la montée d'une violence qui se généralisera contre tout ce qui peut représenter la liberté d'expression. Que cette agression soit l'œuvre d' un déséquilibré ou d'un acte politique, elle révèle une ambiance. Des violences sans armes ont déjà eu lieu contre des bâtiments religieux et des personnes. Nos locaux, nos militants et nos dirigeants ont eu à en souffrir également. Aucune plainte n'aboutit. Souhaitons que la visibilité de cet acte barbare permette de briser la spirale de l'insensibilité médiatique, autant que celle de la violence. J'exprime ma compassion aux victimes et ma disponibilité pour agir en défense de la sécurité de la presse. »
Charb, directeur de la publication de Charlie Hebdo : « Toute l’équipe de Charlie Hebdo apporte évidemment son soutien aux salariés de Libération et à la victime de l’agression armée. L’annonce de cet attentat nous a particulièrement bouleversés. Nous n’oublions pas que, lorsqu’il y a deux ans, nos locaux ont été ravagés par un incendie criminel, c’est l’équipe de Libération qui nous a accueillis durant deux mois. Nous savons ce que représente de travailler sous protection policière, puisque c’est la situation grotesque que nous vivons depuis deux ans. »
Communiqué de la CGT : « La CGT et le SNJ-CGT tiennent à exprimer toute leur émotion et à marquer leur solidarité avec les journalistes de Libération, ceux de BFM TV et l'ensemble des professionnels de la presse. En visant des médias c’est en effet la liberté d’expression et la démocratie que l’on cherche à museler […] Ce triste événement est une nouvelle fois l’occasion de rappeler, après le drame de Kidal et l’assassinat des deux journalistes de RFI, que le journalisme n’est pas une profession comme une autre. »
Communiqué du Front national : « Le Front National est solidaire des organes de presse récemment pris pour cible par un homme armé. Il a une pensée particulière pour le photographe de Libération grièvement touché ce matin. La liberté de la presse est une condition indispensable de l'exercice de la démocratie. Elle doit être préservée et développée. Le tireur doit être arrêté dans les meilleurs délais. »
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