Martine Billard, longtemps membre des Verts avant de rejoindre Jean-Luc Mélenchon en 2009, est une femme de convictions, mais également de nuances. Tout au long d’un entretien entièrement consacré à la politique étrangère du Parti de gauche, elle s’est attachée à défendre les choix diplomatiques de sa formation, notamment sur l’Ukraine et la Russie, mais en usant de pédagogie.
« Ne tombez pas dans la caricature », lance-t-elle ainsi, dans un sourire, à Mediapart qui lui rapporte les critiques traditionnelles adressées au parti de M. Mélenchon : outrances verbales, anti-américanisme systématique, germanophobie, etc. Lui reproche-t-on une vision du monde héritée de la guerre froide ? Elle revendique au contraire sa lucidité devant la complexité d’un monde qui ne peut pas se résumer à opposer « les méchants Russes aux gentils Ukrainiens ».
Ce numéro 36 du magazine « Objections » commence par le bilan de la présidence européenne de Matteo Renzi. Haussement d’épaules de Martine Billard : « Aucune importance. On pourrait arrêter cette présidence tournante que personne ne s’en apercevrait »... Le premier bilan du président du conseil italien ? « Il est arrivé un peu par un putsch, il n’a pas fait grand-chose, mais la politique qu’il mène en Italie, c’est la politique d’austérité… Il essaie de pousser une loi qui vise certains acquis sociaux, une loi qui ressemble beaucoup à la loi Macron. » Plus important encore est, ce lundi 29 décembre, le vote du Parlement grec : s'il ne parvenait pas à élire un président de la République, des élections législatives anticipées devraient intervenir dès le début du mois de février. Or Syriza, le mouvement de la gauche radicale grecque, est donné en tête par les instituts d'opinion. De quoi changer la face de l'Europe ?
Le Parti de gauche est-il germanophobe, et pourquoi cette virulence verbale à propos d’Angela Merkel ? « Notre problème ce n’est pas l'Allemagne, c’est la politique menée par la droite allemande, avec l’appui du SPD. »
Le Parti de gauche n’est-il pas isolé en Europe ? « Non, nous avons des alliances avec les partis qui dénoncent l’austérité. Les partis situés à la gauche du champ démocratique, je le précise pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïtés »...
Pourquoi le Parti de gauche n’a-t-il pas, comme Syriza, profité de l’affaiblissement du Parti socialiste (Syriza qui pourrait remporter les élections législatives en Grèce, si le Parlement ne parvient pas la semaine prochaine à voter pour un président) : « Le copié-collé n’a jamais fonctionné en politique. Ce que subissent les peuple grec, espagnol ou portugais est bien pire que la situation française, cela explique une part des choses. Nous avons manqué de clarté aux municipales, parce que nous sommes restés un cartel… Effectivement, nous stagnons… Nous n’arrivons pas à progresser. »
À propos de la situation en Ukraine : « Il était prévisible qu’en voulant encercler la Russie on mettait le feu à la plaine… Il faut avoir une négociation dans le cadre de l’ONU, pas sous l’égide de l’OTAN. En Ukraine, on est parti d’un vrai mouvement populaire, et ça s’est terminé par un mouvement qui dérive avec le poids de milices tout de même très marquées par l’extrême droite. Mais vous pouvez vérifier mes propos. Nous ne soutenons pas Poutine qui n’est pas un démocrate. Mais avec l’OTAN, tout est fait pour créer un glacis autour de la Russie. »
L’entretien se termine sur les implications nationales du terrorisme et des guerres menées au nom de l’islamisme. Martine Billard conclut ainsi : « Faut pas exagérer ! On ne va pas vivre constamment dans l’angoisse de l’attentat. Faut arrêter avec la peur du voisin ! »
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