À une semaine de son deuxième vote de confiance en quatre mois, Manuel Valls a de quoi lire pour se rassurer. À sa gauche comme à sa droite, ses oppositions parlementaires sont loin d'être prêtes à venir perturber sa marche consulaire et son recentrage triangulateur. Deux livres paraissent cette semaine, fruits du travail collectif de personnalités de l'UMP et du Front de gauche, qui dressent un intéressant état des lieux de la situation de deux mouvements tout autant en difficulté face à un exécutif qu'ils vouent chacun à leurs respectives gémonies.
Mise en difficulté par les affaires, incapable de se rassembler autour d’une ligne idéologique et confrontée à une crise de leadership, l’UMP tente par tous les moyens d’affirmer son audace réformatrice face au gouvernement de Valls, qui applique peu ou prou les idées traditionnellement défendues par la droite. « On a trois mois pour se mettre en ordre de marche », indiquait Christian Estrosi, le 7 septembre, en marge du campus de Nice. Le député et maire ne figure pas parmi les signataires des Douze Travaux de l’opposition (Éd. Flammarion), mais comme eux, ce soutien de Nicolas Sarkozy répète à l’envi que « le temps presse » après deux années de quasi-inertie.
Fin novembre, l’UMP aura un nouveau président. Sans doute le parti changera-t-il de nom. Peut-être vendra-t-il son siège parisien de la rue de Vaugirard. Autant de rustines qui s'avéreront inutiles si les idées ne suivent pas. C’est pourquoi la droite se veut force de propositions et le fait savoir à travers cet ouvrage collectif imaginé par le député et maire de Châlons-en-Champagne, Benoist Apparu, et préparé depuis le début de l’année 2014, bien avant que n’éclate l’affaire Bygmalion. Le problème est que la plupart des idées qui sont avancées ici ne sont que des resucées du quinquennat Sarkozy.
S’y distinguent nombre de promesses non tenues par l’ancien président de la République, mais aussi une poignée de propositions en condradiction les unes avec les autres. Parmi les points de désaccord : l'avenir de la loi sur le mariage pour tous que certains souhaitent « réécrire » (Jean-François Copé) en cas d'alternance en 2017, quand d'autres ne veulent pas « se contenter de la vague promesse de dépoussiérer le texte » (Laurent Wauquiez). Avec ses Douze Travaux, l'UMP voulait parler d'« une seule voix », mais ce sont bien douze personnalités, boursouflées d'ambitions personnelles, qui s'y expriment.
À l'inverse de l'échiquier politique, la “gauche de gauche” se remet peu de ses échecs électoraux et paraît sidérée par son impuissance face aux orientations toujours plus libérales d'un pouvoir qu'elle a contribué à faire élire. Des treize responsables politiques mobilisés pour le court ouvrage Gauche : ne plus tarder (Éd. Arcane 17), tous fustigent le gouvernement sans indulgence.
La lecture des douze chapitres rédigés par des représentants des diverses composantes du Front de gauche (PCF, PG, anticapitalistes d'Ensemble !), mais aussi de la militante féministe et ex-socialiste Caroline de Haas, de l'écolo de gauche Élise Lowy ou de l'universitaire et “socialiste affligé” Philippe Marlière, raconte bien l'état des divergences stratégiques de la « gauche de transformation », ainsi qu'elle est appelée en introduction de l'ouvrage.
Alors que le doute et les clivages internes traversent les principaux partis de gauche, PS compris, la seule réelle convergence que l'on retient, et c'est déjà un bon début, se porte sur les priorités délaissées par Hollande et Valls. Comme autant de points d'accord laissant entrevoir une plateforme de coalition possible, à défaut d'être probable.
Renforcement des services publics, VIe République, égalité des droits, réforme fiscale et lutte contre l'évasion fiscale reviennent dans la grande majorité des contributions. En revanche, à l'image du trouble actuel qui parcourt leurs divers clubs, courants et partis, les pistes stratégiques avancées par les auteurs laissent apparaître d'importantes nuances, dont on ne sait encore à quel point elles s'avéreront rédhibitoires.
En proposant à ses collègues de l’UMP de participer à l’écriture des Douze Travaux de l’opposition, Benoist Apparu souhaitait « démontrer que le premier parti d’opposition (pouvait) incarner un projet porté collectivement », après des années de divisions internes, tant sur le plan des hommes que sur celui des idées. L’ambition ? Prouver que « l’intérêt supérieur de la France dépasse la tension des intérêts particuliers ». Une démonstration qui ne résiste pas à l’épreuve de la lecture.
D’abord, parce que plusieurs des auteurs des Douze Travaux de l’opposition n’ont pas respecté la règle de départ qui voulait que chacun s’empare d’un seul sujet. Si Valérie Pécresse (éducation), Benoist Apparu (décentralisation), Nathalie Kosciusko-Morizet (écologie et numérique), François Baroin (économie) ou encore Brice Hortefeux (immigration) ont joué le jeu, d’autres ambitieux de 2017 (François Fillon, Xavier Bertrand, Jean-François Copé…) n’ont pas résisté à l’envie de développer leur projet pour la France.
Ensuite, parce que le détail de ces différents projets confirme la crise idéologique que l’UMP traverse depuis plusieurs années. La question de l'immigration, qui passionne toujours autant les ténors de la droite alors qu’elle ne constitue pas la priorité de la nouvelle génération, est celle qui révèle le plus de clivages. Une grande part de la réflexion des ambitieux de 2017 lui est d'ailleurs consacrée. Pourquoi ? Parce que « la France se mérite », comme l’écrit l'ancien ministre de l'intérieur Brice Hortefeux, qui s'emploie à saluer les résultats obtenus par Nicolas Sarkozy depuis son passage place Beauvau.
Les Français « réclament plus de sécurité et une meilleure maîtrise de l’immigration, assure Jean-François Copé. N’oublions pas que le Front national est en embuscade, prêt à avancer dès que la droite républicaine lui laisse du champ dans ces domaines ». L’ancien patron de l’UMP pointe l’« échec de l’intégration » et explique qu'« il s'agira de mettre fin aux régularisations, hors circonstances exceptionnelles ». Un constat partagé par François Fillon qui déplore « le choc culturel » perceptible selon lui « dans certains quartiers » et recommande pour sa part d’« accueillir moins pour intégrer mieux ».
Prenant soin de dénoncer la stigmatisation d’« une partie des habitants de la France » – « les riches » comme « nos concitoyens d’origine étrangère » –, le premier ministre de Nicolas Sarkozy fait pourtant un peu plus loin un raccourci évocateur entre la fraude – autre marotte de l’UMP – et l’immigration : « Il faut continuer à réduire l’immigration familiale en luttant contre la fraude, comme mon gouvernement l’a fait de 2007 à 2012. »
Alain Juppé, lui, propose une tout autre approche du sujet en consacrant un chapitre à l'« identité heureuse », en écho à l'ouvrage d'Alain Finkielkraut, L'Identité malheureuse (Éd. Stock), qui avait fait l'objet d'un “petit-déjeuner inattendu” de l'UMP en janvier 2014. Le maire de Bordeaux y distingue le concept d’assimilation – « vouloir effacer les origines, couper les racines, nier toute différence » – à celui d’intégration. « La représentation collective que nous nous faisons du monde globalisé reste négative et apeurée, écrit-il. D’où le retour de balancier et le succès d’un discours politique qui dessine une France barricadée, cultivant le protectionnisme économique, refusant l’ouverture européenne, méfiance vis-à-vis de l’étranger, franchement hostile à ceux qui pratiquent la religion musulmane. »
Pour éviter que cette « peur française », qu’il qualifie d’« irrationnelle », ne prospère, Juppé propose, entre autres choses, un meilleur apprentissage du fait religieux : l'éducation devrait selon lui davantage s'intéresser à la tradition chrétienne, mais aussi à celle du judaïsme et de l’islam. « Jamais tout au long de mon parcours scolaire et universitaire, on ne m’a proposé d’ouvrir le Coran dont j’ignore à peu près tout. Comment s’étonner, dès lors, de notre méconnaissance collective de la religion musulmane, méconnaissance qui engendre trop souvent la méfiance ou la peur ? » s’interroge-t-il.
Sur le plan économique, les ténors de la droite reposent la question du travail dominical, celle de la réduction du nombre de fonctionnaires et, bien entendu, celle des 35 heures, loi sur laquelle Laurent Wauquiez préconise de revenir, mais que François Baroin ne cite pas une seule fois dans son développement sur les « erreurs fondamentales de politique économique ». L'ancien ministre de l'économie évoque par contre le “Pacte de responsabilité” de François Hollande, qui « acte, selon lui, le revirement à 180 degrés de la politique du gouvernement (socialiste) et sa récupération d'une stratégie qui était déjà celle de Nicolas Sarkozy depuis plusieurs années ».
Outre les pages rédigées par Nathalie Kosciusko-Morizet, les ambitieux de 2017 n'accordent guère d'importance aux questions écologiques. Seul François Fillon s'exprime brièvement sur le sujet en se déclarant favorable aux forages expérimentaux pour les gaz de schiste, se distinguant ainsi de la loi Jacob de juillet 2011 qui prohibe leur exploitation par fracturation hydraulique.
Pour le reste, un certain nombre de propositions faites sous le mandat de Sarkozy et largement décriées à l’époque, sont de nouveau posées. C’est par exemple le cas de la loi du député des Alpes-Maritimes, Éric Ciotti, destinée à lutter contre l'absentéisme scolaire en suspendant les allocations familiales. Votée en septembre 2010, puis supprimée par le PS en janvier 2013, elle est remise au goût du jour, notamment par Jean-François Copé et Xavier Bertrand.
Dans son chapitre, l’ex-ministre du travail délaisse son ancien champ de compétences pour développer sa vision de la grande réforme pénale que la droite, par « frilosité », et la gauche, par « angélisme » et « dogmatisme », ont selon lui échoué à porter. Parmi ses propositions, pour partie inspirées de celles de Nicolas Sarkozy : « un plan carcéral ambitieux », qui permettrait à la France de passer de « 57 000 à 80 000 places de prison d’ici à 2022 », « l’éventuelle suppression du juge d’instruction en donnant en compensation plus de pouvoir au parquet mais aussi aux avocats », « la participation des citoyens aux décisions de justice, notamment le recours aux jurys populaires en correctionnelle »…
Toujours sur le volet de la justice, François Fillon qualifie quant à lui de « signal désastreux » la remise en cause des peines planchers, se hasardant à une comparaison pour le moins populiste : « Qui peut comprendre qu'une attaque de train digne du Far West se solde par de la prison avec sursis, alors que la maltraitance d'animaux conduit à de la prison ferme ? » questionne l'ancien premier ministre.
Sur les douze auteurs du livre collectif, neuf ont participé au gouvernement de Nicolas Sarkozy. La plupart d’entre eux défendent aujourd'hui leur bilan sans jamais émettre de réelles critiques sur ce dernier ni s'aventurer à un quelconque inventaire. À peine regrettent-ils de ne pas être allés assez loin dans leur volonté de réformer le pays. Un service minimum de mea culpa qui leur permet toutefois d’anticiper les éventuelles critiques : cette fois-ci, ils l’assurent, les promesses non tenues entre 2007 et 2012 le seront en cas d’alternance en 2017.
À l’instar de Nicolas Sarkozy qui revient en politique « par devoir » et non « par envie », les ténors de la droite se sentent missionnés pour résoudre la crise que traverse le pays et dont seul François Hollande porte à leurs yeux la responsabilité. Une crise « économique, sociale et politique », mais aussi une « crise morale », comme le déplore Jean-François Copé. L’ancien patron de l’UMP, démis de ses fonctions au mois de juin en plein scandale Bygmalion, a beau jeu de s’engager sur le terrain de la moralité. Rédigé avant son départ, son chapitre ne fait nulle mention à l’affaire.
Ce sont Bruno Le Maire et Laurent Wauquiez qui se réservent le traitement de l’éthique en politique. Le premier, candidat à la présidence de l’UMP, répète les propositions qu’il défend déjà à longueur d’interviews depuis plusieurs mois : l’exemplarité des élus, la distinction entre la haute fonction publique et la vie politique, la réduction du nombre de parlementaires, la limitation du nombre de mandats, y compris dans le temps…
Quant au second, désormais soutien officiel de Nicolas Sarkozy pour l'élection de novembre, il plaide en faveur de la transparence et estime qu’« un juge devrait pouvoir prononcer l’inéligibilité à vie pour tous les cas de corruption et de prise illégale d’intérêts ». Une proposition qui n’est pas sans rappeler que l’ex-chef de l’État a été mis en examen, fin juin, pour « corruption active », « trafic d'influence » et « recel de violation du secret professionnel » dans le cadre de l’affaire Azibert.
À l'origine, ils s'étaient réunis pour signer une tribune dans Libération, le 1er juillet dernier, pour « aider à ce que se lève l’indispensable grand mouvement citoyen qui donnera corps à l’alternative à gauche ». Son titre, Gauche : ne plus tarder, est devenu celui d'un petit ouvrage collectif, où treize des signataires ont développé plus avant leur vision d'un avenir unitaire capable d'inverser le cours des choses imaginé par le pouvoir socialiste.
D'emblée, l'on peut reconnaître aux auteurs le mérite de la cohérence sur le diagnostic. Caroline De Haas, militante féministe, ancienne proche de Benoît Hamon, ayant démissionné du PS, résume habilement les multiples constats critiques, voire virulents, à l'encontre de l'exécutif socialiste : « Il faut choisir pour qui on exerce le pouvoir et être prêt à tenir bon, face aux néo-libéraux, aux forces de l’argent, aux malhonnêtes, aux magouilleurs, aux barons locaux, aux institutions financières, aux pollueurs, aux nombreux réactionnaires et quelques fachos qui descendent dans la rue… » Pour autant, l'éventualité que cette gauche qui « tient bon » accède aux responsabilités n'est guère évidente.
Danielle Simonnet, tête de liste du Parti de gauche (PG) aux municipales à Paris, pose bien la problématique à laquelle est confrontée la gauche qui ne se reconnaît pas dans le gouvernement Valls. Ce « scénario catastrophe (…) construit en toute conscience », que serait « la possible conquête du pouvoir par le FN », et qui permettrait aux socialistes au pouvoir de « gagner, dans un ultime duel, leur réélection malgré le rejet massif de leur politique ». Dans la foulée, elle ajoute, pour parfaire un diagnostic reconnu par tous : « Nos erreurs, nos confusions stratégiques et nos divisions » ont contribué à « essouffler et démoraliser » le processus d'une alternative à gauche. Si bien que, comme l'estime Clémentine Autain, on assiste aujourd'hui à gauche à un « moment de tension entre la nécessité immédiate du changement radical et le temps plus long de la reconstitution d’une force politique ».
Sur le fond, et c'est peut-être le plus rassurant, le périmètre idéologique d'une telle reconstitution semble faire consensus, dans les grandes lignes. Le dirigeant communiste Francis Parny liste ainsi les axes principaux d'un programme commun : « 32 heures, réforme de la fiscalité, réévaluation salariale, transition écologique, réforme des institutions. » Myriam Martin et Marie-Pierre Thoubans, porte-parole d'Ensemble! (le courant anticapitaliste du Front de gauche), lui emboîtent le pas en évoquant « les bien communs » (services publics, alimentation, logement), « l'écologie », « la lutte contre le patriarcat et pour l’égalité », « une réforme démocratique ».
Sur la forme et la stratégie, qui occupent une large part des contributions, le périmètre politique anime un débat vieux comme l'extrême gauche : quelles relations entretenir avec le PS ? Les représentants d'Ensemble! et du PG sont les plus catégoriques. « La construction d’une alternative suppose une indépendance totale vis-à-vis du PS », écrit François Longérinas. Pour Danielle Simonnet, s'allier au PS comme l'ont fait communistes et écolos à Paris, c'est « s'enfermer dans la solidarité avec une majorité acquise aux idées libérales qu’ils prétendent combattre ». « L’union de la gauche, telle qu’elle a existé en France depuis la fin des années soixante-dix, a vécu », abonde de son côté Clémentine Autain, « car le PS a tourné le dos aux valeurs fondamentales de la gauche. »
L'universitaire Philippe Marlière, fondateur du club des socialistes affligés, n'est pas de cet avis. Selon lui, le Front de gauche n'a, lui non plus, pas grand-chose à voir avec ses ancêtres des années 1970 : « Les mesures phares de l’Humain d’abord ! sont globalement moins anticapitalistes que celles du Programme commun signé en 1972 par le PS, le PCF et le MRG. » Marlière n'adhère pas au nouveau clivage esquissé par Jean-Luc Mélenchon et le PG, entre « Front du peuple » et « oligarques ». « Plutôt que d’improviser un aggiornamento idéologique douteux », cingle-t-il, « il conviendrait de noter que toutes les grandes victoires de la gauche en 1936, 1946 et 1981 ont été acquises à la suite d’une convergence unitaire qui a provoqué la radicalisation des forces socialistes. » Pour ce spécialiste du blairisme, « tant que le PS restera le parti dominant à gauche, le redressement de la gauche ne se fera pas contre le PS dans son ensemble, mais avec des forces socialistes ».
Là encore, les regards vers les “députés frondeurs” socialistes divergent. Pour la secrétaire du PCF au Front de gauche, Marie-Pierre Vieu, ils prouvent que « même au sein du cercle dirigeant PS, il existe de vraies résistances à ce rouleau compresseur libéral ». Mais pour Danielle Simonnet, le risque est grand que les proclamations suivies d'abstentions (et non de vote contre) finissent par « lasser ». La dirigeante communiste Isabelle Lorand émet, elle, l'hypothèse de plumer (un peu) de la volaille socialiste. « Un bon quart de notre peuple reste solidement attaché aux valeurs qui ont fait les heures glorieuses de la gauche, écrit-elle. Pourtant, notre score reste bloqué à 10 %. » Et de pointer un objectif : « Gagner le premier cercle, les 4 à 5 % d’électeurs si proches qu’en 2012, ils ont hésité à voter Mélenchon, avant de voter Hollande. » Pour cela, Lorand avertit : « Il faut être fermes sur les valeurs et les moyens, attentifs aux formulations et accueillants. »
Au gré des pages de l'ouvrage, on note aussi de nombreux éloges des mobilisations locales, que les auteurs égrènent (de « l'aide aux habitants radiés abusivement des listes électorales » de Leïla Chaibi aux luttes des « intermittents, postiers, kiosquiers, sans-papiers, etc. » de Danielle Simonnet, en passant par les soutiens aux « coopératives, Amap, régie des quartiers » de François Longérinas).
Plusieurs contributions appellent enfin à bousculer certaines certitudes ou habitudes militantes. Leïla Chaibi, secrétaire nationale du PG passée par le NPA et les collectifs anti-précarité, met les pieds dans le plat : « Fin du cumul des mandats, rotation stricte des postes d’élus, plafonnement de leurs indemnités… Pourquoi sommes-nous si peu bavards sur ces questions ? » Avant d'enfoncer le coin : « Une application de notre devoir d’exemplarité impliquerait certainement bien des bouleversements dans les comportements de nos “oligarchies” internes. »
Beaucoup appellent aussi à être plus attentif aux quartiers populaires et à ses habitants. Ainsi Isabelle Lorand, pour qui « aujourd’hui, la classe populaire s’appelle Farida, Mamadou, Jennifer, Denis ou Vladimir », et qui estime que « la reconquête des catégories populaires est la conquête de la classe populaire contemporaine telle qu’elle est ». Un point de vue partagé par l'écologiste Élise Lowy (aile gauche d'EELV), celle-ci estimant que « la construction d’une alternative viable ne pourra pas faire l’impasse sur le respect des minorités et la tolérance à l’égard des différences culturelles et religieuses ».
La question des comportements et des intransigeances militants sur le sujet est également soulevée. Marie-Pierre Vieu alerte sur ceux qui cherchent à « reconquérir les “masses” sur des discours régressifs et identitaires ». Et redoute « un remède pire que le mal », renforçant « la banalisation de dérives sécuritaires et bénéficiant directement à la droite et à l’extrême droite ». Marie-Christine Vergiat, eurodéputée Front de gauche non affiliée à un parti, appelle carrément à se départir de la « vision néocoloniale du monde », ce qui « demande de travailler sur beaucoup de préjugés et de stéréotypes, notamment au niveau de notre vision de l’Orient ». Elle réfute « l’opposition entre social et sociétal, qui empêche de traiter les problèmes de façon globale ». Redoutant que la gauche se fasse « piéger » par des « combats d’arrière-garde », Vergiat affirme son « refus de se laisser instrumentaliser » face à ceux qui « ont remplacé le diable rouge par un diable vert islamo-terroriste ».
Au terme de Gauche : ne plus tarder, demeure le sentiment que le futur front populaire n'est pas pour demain. Seul embryon de débouché concret évoqué dans le livre par Marie-Pierre Vieu, les futures élections territoriales et régionales. « Il serait important de donner une visibilité au rassemblement et aux éléments de gestion alternative que nous voulons faire vivre. » Il faudra sans doute plus qu'un livre pour cela.
A lire aussi sur le blog de Tuxicoman : Les Français détiennent 17 milliards d’euros en Belgique