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Un droit de réponse de Patrice de Maistre

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Nous avons reçu, lundi 22 juillet, le jour où Mediapart a été contraint de censurer 72 articles citant les enregistrements Bettencourt en application de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, application demandée par Patrice de Maistre, une demande de droit de réponse du même Patrice de Maistre. L'homme est l'ancien gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, il est au cœur de l'affaire et de plusieurs procédures judiciaires en cours.

Début juillet, Patrice de Maistre a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour « trafic d’influence actif » dans l’épisode de la Légion d’honneur, un des volets de l’affaire Bettencourt, dans lequel Éric Woerth sera également jugé (notre article ici). Il est, par ailleurs, mis en examen pour « abus de faiblesse, blanchiment, escroquerie, complicité et recel de ce délit, abus de confiance, complicité et recel de ce délit, abus de biens sociaux, complicité et recel de ce délit » dans le volet central de l’affaire Bettencourt. Il a effectué 88 jours de détention provisoire, et a été remis en liberté le 18 juin 2012 contre le paiement d’une caution de 2 millions d’euros.

Pour comprendre tout le sel de ce droit de réponse que nous publions bien volontiers (lire la boîte noire de cet article), toujours soucieux du contradictoire, vous pouvez également lire l'article : Maistre censeur sur son lignage perché.

Voici le droit de réponse de M. de Maistre :

«Droit de  réponse de  Patrice de  MAISTRE aux  articles publiés les  5, 11 et 15 juillet  2013, respectivement intitulés : « l'affaire BETTENCOURT censurée par la  justice de Versailles », « BETTENCOURT-MEDIAPART: un appel  contre la censure »  et  «BETTENCOURT-MEDIAPART: de  Maistre  fait exécuter  la censure» :

Je saisis comme un  honneur  l'occasion  que  me fournit  la  justice de m'adresser  à vos lecteurs, vos collaborateurs et à vous-même.

Dans  vos récents  articles en effet, vous  stigmatisiez  la décision  de la Cour  d'appel  de Versailles du 4 juillet 2013, vous ayant interdit de publier les retranscriptions  des enregistrements illicites réalisés au domicile  de Madame Liliane BETTENCOURT et m'ayant reconnu victime de ces agissements.

S'il me serait agréable, en d'autres  circonstances, que vous entendiez  mon  point de vue sur l'affaire Bettencourt, ses apparences  et sa réalité, c'est, principalement, à la question de la protection  de la vie privée que je me tiendrai aujourd'hui.

La liberté de la presse et le droit à l'information appartiennent sans conteste aux libertés publiques fondamentales.

Il pourrait donc sembler a priori que ces libertés doivent s'exercer sans bornes et que le meilleur journaliste soit celui qui divulgue, sans   limite, la plus vaste quantité d'informations possibles. La fin justifierait les moyens.

Mais chacun sait qu'aucune  liberté ne peut s'exercer sans règle. Ce ne sont d'ailleurs pas les démocraties qui exigent de leurs citoyens la plus grande  transparence, mais bien les régimes autoritaires.

Aussi, la démocratie a-t-elle toujours attaché le plus grand prix à protéger l'espace privé, l'intimité et le secret des correspondances.

Vous admettrez  sans doute qu'une telle protection serait vaine si les conversations d'un citoyen avec son avocat, son notaire, ses  conseils, ses amis, étaient captées à son insu, puis divulguées aux pouvoirs publics et à un auditoire de millions de personnes.

 C'est  précisément ce à quoi Madame Liliane Bettencourt et ses interlocuteurs ont été soumis.

Quel serait votre sentiment  si tous propos  que vous auriez tenus pouvaient être publiés? Au-delà de ces considérations liminaires, et pour  permettre à vos lecteurs de disposer d'une information correcte et contradictoire, il est nécessaire de procéder à une mise au point relative, d'une part, à votre  présentation inexacte de l'arrêt  de la Cour  d'appel de Versailles et d'autre part, à votre rappel tendancieux des faits.

 La Cour, - retenant  que durant  une année les conversations intervenues  entre  Madame Liliane BETTENCOURT et ses proches ont été enregistrées à leur insu dans le salon privé de cette  dernière  -, a naturellement  considéré  que « ces enregistrements, pratiqués de façon clandestine, ont par leur localisation et leur durée, nécessairement conduit leur auteur à pénétrer dans l'intimité  des personnes concernées et de leurs interlocuteurs» et qu'ils  étaient  constitutifs d'une  atteinte à l'intimité de ma vie privée  comme à celle de Madame Liliane BETTENCOURT.

Dans ces  conditions, la Cour a jugé que la retranscription littérale de tels enregistrements était illégale, tout en rappelant  la possibilité pour les organes de presse de mentionner l'existence de ces conversations et d'en révéler la substance.

Cette  décision a ainsi concilié le droit à l'information et le droit  u respect de la vie privée, tous deux indissociables d'une société démocratique.

Prétendre en conséquence, comme vous le  faites dans les articles visés et dans vos appels à signatures, que la décision de la Cour d'appel de Versailles :

- constituerait une«  censure»;
- aurait pour conséquence de jeter «un voile  noir» sur l'affaire Bettencourt;
-contraindrait à «supprimer les informations qui ont révélé à la France entière les faits en cause»... ;

est  contraire à la lettre et à l'esprit de cet arrêt et procède d'une tentative de désinformation et de victimisation de Médiapart.

Cette  décision  de  justice ayant reconnu l'atteinte à la vie privée  dont  j'ai été l'une  des victimes,  j'étais, comme  tout  justiciable, légitime à exercer  mes  droits  en signifiant  cet arrêt rendu par trois magistrats indépendants.

Au travers de vos écrits et de votre  pétition,  vous  me contestez ce droit ; pire encore, votre  dernier  article, aux allures  de réquisitoire, résonne comme  des représailles  pour avoir, en dépit de vos avertissements, osé la signifier.

Enfin - et sans aborder ici ma contestation la plus vigoureuse  d'avoir  jamais commis  le moindre  abus de faiblesse sur la personne  de Madame Liliane Bettencourt -, votre présentation inexacte de la chronologie des faits n'a d'autre but que de grandir votre rôle et de faire croire  à un ensevelissement définitif  de toutes informations relatives  à cette affaire.

Il est  établi que  le 10  juin  2010, ces enregistrements illicites ont  été  remis  à la police judiciaire par un coursier  de Madame  Françoise MEYERS  BETTENCOURT. Ils sont depuis cette date sous-main  de justice et ont été largement exploités tout au long de l'instruction.

Ils sont dès lors insusceptibles de disparaître et le risque de « dépélrissemmt des preuves» que vous brandissez, est inexistant.

Ce n'est que postérieurement, le 16 juin 2010, que MEDIAPART a commencé à publier les retranscriptions des enregistrements clandestins. Il est  donc faux de prétendre dans votre article du 5 juillet  2013, que la Justice s'est « ensuite saiside ces informations.

Si MEDIAPART n'a  cessé de me  présenter jusqu'à ce jour comme un coupable alors que je n'ai pas encore été jugé, j'espère que vous vous  attacherez, à l'avenir,  à exercer votre  mission  d'information dans le respect de la présomption d'innocence et, comme vous y invite cette décision de justice, dans le respect de la vie privée. »

BOITE NOIRENous publions d'autant plus volontiers ce droit de réponse de M. de Maistre que nous avions en juin et juillet 2010, puis dans les mois qui ont suivi, souhaité le joindre à de multiples reprises. Il n'avait alors jamais retourné nos appels ni accepté de rendez-vous. Mediapart a pour règle de systématiquement contacter avant publication les personnes mises en cause dans nos articles pour leur demander une réaction, un éclairage, des explications.

Par ailleurs, M. de Maistre croit lire dans cet arrêt de Versailles des éléments qui n'y figurent pas. Les lecteurs peuvent se reporter au texte des deux arrêts concernant Liliane Bettencourt (le lire ici en PDF) et Patrice de Maistre (là ce second arrêt).

Enfin, s'il est exact que les enregistrements ont été remis à la police judiciaire le 10 juin 2010, soit six jours avant la publication de notre premier article, leur sort judiciaire, c'est-à-dire leur utilisation, était alors plus qu'incertain – voire promis aux oubliettes – avec un Philippe Courroye, alors procureur de Nanterre, qui n'entendait pas faire prospérer la procédure. D'où le caractère décisif de cette publication qui a effectivement déclenché l'affaire et ses prolongements judiciaires.

A lire aussi sur le blog de Tuxicoman : Prostopleer déménage sur http://pleer.com


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