S’il faut citer une mesure qui symbolise tout à la fois les reniements de François Hollande en même temps que l’injustice de sa politique économique et sociale, c’est assurément à la hausse de la TVA que l’on pense en premier. Car cette hausse, qui va prendre effet le 1er janvier prochain et qui risque d’attiser encore un peu plus la colère dans le pays, est tout cela à la fois. C’est une mesure que le chef de l’État avait vivement condamnée du temps où Nicolas Sarkozy, sous des modalités à peine différentes, l’avait envisagée ; et c’est une mesure qu’il faut prendre le temps d’ausculter car elle est effectivement très gravement inégalitaire, frappant beaucoup plus les bas revenus que les hauts.
Dans un contexte marqué par une violente contestation fiscale venue de Bretagne, notamment contre l’écotaxe, ainsi que par la préparation par le Front de gauche d’une marche le 1er décembre prochain pour la « révolution fiscale » et notamment contre cette hausse de la TVA, il est en effet très éclairant d’établir ce double diagnostic : d’abord se souvenir précisément des engagements du candidat François Hollande dans le courant du premier semestre de 2012, pendant la campagne présidentielle ; ensuite, recenser les études disponibles qui attestent du caractère très inégalitaire de la TVA.
Voyons donc en premier lieu l’iniquité de cette disposition. D’abord, il coule de source que la hausse de la TVA va constituer une nouvelle et grave ponction sur le pouvoir d’achat des ménages, alors même que ce dernier enregistre une chute sans précédent depuis 1984. Dans son entretien récent avec Mediapart (lire « Il ne faut pas se tromper de colère »), Jean-Luc Mélenchon détaille l’onde de choc du crédit d’impôt de 20 milliards d’euros décidé sans contrepartie par François Hollande en faveur des entreprises et donne ces évaluations : « Ce sont 20 milliards d’euros qui vont être ponctionnés dans la poche des Français, soit 10 milliards sous forme de coupes dans les crédits publics, 3 milliards sous forme de fiscalité écologique et 7 milliards sous forme de hausse de la TVA. Dans le cas précis de la TVA, pour les Français, cela équivaut grosso modo à une ponction d’un peu plus de 100 euros par tête de pipe. »
C’est un chiffrage au doigt mouillé que présentait ainsi le porte-voix du Front de gauche, mais il est globalement exact. Initialement, le gouvernement avait prévu de relever au 1er janvier prochain la TVA de 19,6 % à 20 % dans le cas du taux normal (on peut consulter ici les principaux produits concernés), de 7 % à 10 % dans celui du taux intermédiaire, tandis que le taux réduit devait baisser de 5,5 % à 5 %. L’ensemble du dispositif devait conduire à une majoration nette de la TVA de 6,4 milliards d’euros. Mais, à l’Assemblée nationale, les députés ont voté en première lecture un projet de loi de finances qui maintient le taux réduit à 5,5 % et ils ont décidé d’affecter à une mesure plus ciblée l’économie ainsi générée de 750 millions d’euros. L’arrondi à 7 milliards d’euros que fait Jean-Luc Mélenchon, sous réserve des décisions qui seront prises au terme des navettes parlementaires, donne donc une mesure assez précise du nouveau « choc fiscal » que vont connaître les Français avant la fin de l’année. Un « choc fiscal » : la formule n’est de fait pas exagérée, puisqu'un prélèvement annuel moyen d’environ 400 euros pour un ménage avec deux enfants est une somme considérable dans un pays où le revenu mensuel médian des Français est de 1 630 euros par mois et où le nombre de pauvres approche désormais les 10 millions (lire Pourquoi la pauvreté et les inégalités explosent).
Ce formidable « choc fiscal », les Français n’en ont cependant pas encore pris l’exacte mesure, puisque toutes les rafales de hausses de prix que vont générer ces relèvements de TVA ne sont pas encore connues. L’exaspération dans le pays risque donc de monter encore de plusieurs crans, quand les ménages seront contraints de mettre la main à la poche pour financer les choix fiscaux de François Hollande.
Car toutes les études économiques disponibles attestent que dans le passé les hausses de TVA ont globalement été répercutées dans les prix par les entreprises. Établi en mai 2011, un très intéressant rapport d’un organisme incontestable, le Conseil des prélèvements obligatoires, qui est placé sous l’autorité de la Cour des comptes, le démontre. Intitulé « Prélèvements obligatoires sur les ménages : progressivité et effets redistributifs », ce rapport mérite d’être exhumé, car les constats qu’il dresse éclairent les effets pernicieux de la politique fiscale socialiste.
Voici ci-dessous ce rapport :
Aux pages 65 et 66, on peut ainsi vérifier que les hausses de TVA annoncées par le gouvernement ont toutes les chances de se traduire par des hausses de prix. Lisons : « S’agissant de la France, plusieurs études ont analysé l’effet sur les prix des modifications de la TVA depuis 20 ans, tant à propos de la hausse du taux normal de TVA, passé de 18,6 % à 20,6 % le 1er août 1995, puis à sa baisse de 20,6 % à 19,6 % le 1er avril 2000, qu’à propos de l’impact de deux baisses importantes de la TVA en France : la première, intervenue le 1er septembre 1987, a réduit le taux de TVA sur les automobiles de 33,33 % (ancien taux de luxe) à 18,6 % (valeur du taux normal à cette date) ; la deuxième, intervenue le 1er septembre 1999, a réduit le taux de TVA sur les travaux et réparations immobilières de 20,6 % (valeur du taux normal à cette date) à 5,5 % (valeur du taux réduit). Dans le premier cas, quatre mois après la baisse de la TVA, 77 % de celle-ci aurait été répercutée, sous forme de baisse des prix, sur les consommateurs dans le secteur (très concurrentiel) des travaux et réparations immobilières. Dans le secteur de l'automobile, 57 % de la baisse de la TVA a été répercutée dans le même laps de temps. Lorsque la répercussion d’une hausse de la taxation sur les prix n’est pas complète, que l’horizon temporel ne soit pas suffisant pour le constater où que les marchés ne soient pas suffisamment concurrentiels, interviennent alors les questions de second ordre concernant la répartition de cette charge résiduelle. »
Tout ce rapport du Conseil des prélèvements obligatoires est donc construit sur « l’hypothèse (…) d’un report intégral des taxes indirectes (et donc de leurs variations) sur les ménages, en fonction de leur consommation respective ». Voilà donc qui clôt le débat : la répercussion devrait être intégrale ou quasi intégrale.
Pour l’heure, les Français n’ont certes pas encore pris l’exacte mesure des conséquences concrètes de cette réforme. Et il n’y a guère que le président de la SNCF, Guillaume Pepy, qui a annoncé récemment la couleur : il a fait valoir que le relèvement de 7 % à 10 % du taux de la TVA applicable aux billets de train conduirait au 1er janvier à une hausse de 3 % de ces mêmes billets… « au bénéfice de l’État ».
Mais à cet « impôt sur les billets de train » – la formule est du même patron de la SNCF – viendront s’ajouter de nombreux autres. Dans tous les domaines de la vie quotidienne des Français. Des impôts en veux-tu, des impôts en voilà… Un seul autre exemple : la TVA pèse pour environ 15 % dans la facture moyenne d’électricité des Français.
Dans le schéma initial du gouvernement, avec un relèvement du taux normal de la TVA de 19,6 % à 20 % (qui s’applique à la consommation d’électricité) et un taux réduit qui aurait dû reculer de 5,5 % à 5 % (qui s’applique à la partie abonnement), la hausse des tarifs EDF aurait dû avoisiner + 1,6 % à compter du 1er janvier. Or, puisque le taux minoré de TVA ne baissera pas à 5 %, il est maintenant probable que les hausses de tarifs pour les consommateurs dépasseront + 2 % à compter du début de l’année, ce à quoi viendront s’ajouter les hausses de tarifs ordinaires, si l’on peut dire, de l’entreprise.
En bref, c’est bel et bien un impôt sur la vie quotidienne des Français qui va entrer en vigueur.
Mais il y a encore beaucoup plus grave que cela. Non seulement cet alourdissement fiscal est choquant parce qu’il vient ponctionner un pouvoir d’achat des ménages qui déjà est en chute libre, mais de surcroît il est injuste parce qu’il va ponctionner relativement beaucoup plus les ménages modestes que les ménages à revenus élevés.
Ce vice majeur de la fiscalité indirecte et tout particulièrement de la TVA, qui est un impôt sur la consommation, est souvent évoqué dans le débat public. Il se trouve même des experts pour dire, de manière plus savante, que la TVA est un impôt dégressif (plus on est pauvre, plus on paie), à la différence de l'impôt sur le revenu qui est (même si c’est de moins en moins vrai) un impôt progressif (plus on est riche, plus on paie). Mais il est très rare que des chiffres soient versés dans le débat public, pour étayer l’intuition selon laquelle la TVA est une taxe profondément injuste.
C’est si vrai que dans la très abondante documentation budgétaire que les ministères des finances et du budget ont préparée pour présenter le projet de loi de finances pour 2014, on chercherait en vain des statistiques pour éclairer les effets socialement injustes de cette hausse de la TVA. C’est choquant mais c’est ainsi : dans une tradition perpétuelle d’opacité, Bercy se garde de publier les données statistiques qui permettent de cerner les vrais enjeux du débat fiscal.
Au bout du compte, l’idée qui est le plus souvent véhiculée dans le débat public, et colportée par beaucoup de médias, c’est que la TVA est peut-être un impôt pas franchement équitable mais qu’il est envers et contre tout « indolore » puisqu’il est intégré dans le prix des produits et que les Français le paient presque sans s’en rendre compte. Passez muscade ! Et c’est ainsi qu’un impôt très inégalitaire devient un impôt très convenable…
Et pourtant, des statistiques éclairantes, il en existe, et qui démontrent le caractère très profondément injuste de la hausse de la TVA. Sans doute s’agit-il de statistiques un peu anciennes – il serait urgent que l’Insee les réactualise – mais elles donnent malgré tout une mesure impressionnante du caractère dégressif de la TVA.
D’abord, en 2008, deux économistes, Alain Trannoy, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (ici sa bio) et Nicolas Ruiz, qui est chercheur à l’Institut d’économie publique, avaient publié dans la revue de l’Insee Économie et statistique (n° 413) une étude majeure, établissant le caractère dégressif de la TVA.
Cette étude, on peut la retrouver ici sur le site Internet de l’Insee, ou alors la consulter ci-dessous :
Dans cette étude, les deux chercheurs se sont appliqués à exploiter certaines des données de l’une des enquêtes les plus lourdes de l’Insee, celle qui a trait au « budget des familles », et qui est réalisée une fois tous les cinq ans. C’est sur l’enquête de 2001 qu’ils ont pu s’appuyer. Les chiffres sont donc anciens, mais ce qu’ils révèlent est accablant et toujours d’actualité, sinon dans la précision statistique du moins dans les ordres de grandeur.
Le caractère dégressif de la TVA est tout entier contenu dans les tableaux ci-dessous (extrait de la page 27 du rapport, cliquer pour l'agrandir).
Dans ces deux tableaux, on découvre donc que les Français ont payé en 2001 en moyenne 3 088 euros de fiscalité indirecte dont 2 239 euros de TVA. Mais dans l’un et l’autre cas, les revenus modestes ont payé relativement plus que les revenus élevés. Ce montant de 2 239 euros de TVA payés en moyenne par les consommateurs recouvre donc de très fortes disparités : les 10 % des Français les plus pauvres (le premier décile) ont payé en moyenne 1 308 euros de TVA, tandis que les 10 % les plus riches ont versé 3 588 euros.
Ce que les statisticiens appellent le « taux d’effort », c’est-à-dire la somme payée au regard du revenu disponible brut du contribuable concerné, est beaucoup plus important pour les revenus modestes que pour les revenus élevés. Pour la TVA, tous taux d’imposition confondus, le taux d’effort est donc de 11,52 % pour les 10 % des ménages les plus modestes, et il baisse continûment quand on monte dans l’échelle des revenus pour tomber jusqu’à seulement 5,92 % pour les 10 % des Français les plus riches.
Toute l’injustice de la TVA est donc dans cette statistique : en proportion de leurs revenus, les Français les plus modestes paient une TVA deux fois plus importante que les 10 % des Français les plus riches.
Dans le prolongement de cette première étude, publiée en 2008, une seconde a vu le jour en 2011 : c’est précisément ce rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, que nous venons d’évoquer tout à l’heure, et que l'on peut consulter en bas de la première page de notre article. Il y a d’ailleurs une continuité d’une enquête à l’autre : coauteur de la première étude publiée par Économie et statistique, Alain Trannoy est par ailleurs membre de ce Conseil des prélèvements obligatoires et a été très impliqué dans la confection de cette seconde étude. On y trouve donc d’autres séries statistiques qui viennent conforter ce diagnostic initial.
Ces seconds chiffrages (que l’on peut retrouver à partir de la page 121 du rapport) ne sont pas strictement comparables aux premiers, pour deux raisons. D’abord, ils ont été établis à partir de l’enquête « budget des familles » suivante de l’Insee, celle de 2006. Ces statistiques sont donc plus récentes. Et puis surtout, le rapport étudie l’impact de la fiscalité indirecte et notamment de la TVA non pas en proportion du revenu disponible brut des ménages mais en proportion du niveau de vie, c’est-à-dire après redistribution. Le mode de calcul a beau être légèrement différent, il aboutit envers et contre tout à un résultat quasi identique : plus les ménages sont riches, moins leur taux d’effort est élevé. CQFD ! La TVA est bel et bien une taxe fortement dégressive.
Le rapport fournit ainsi un premier graphique qui est très éloquent et que l’on peut consulter ci-dessous :
Ce graphique montre le taux d’effort des ménages lié à la fiscalité indirecte en général, en fonction de leur niveau de vie net. Il établit qu’en 2009, le taux d’effort pour les 10 % des Français les plus modestes dépasse 50 %, alors que pour les 10 % les plus riches il est inférieur à 10 %. Toute l’injustice du système fiscal français est consignée dans cet écart ahurissant. Commentaire du rapport : « Le taux d’effort particulièrement élevé des ménages appartenant au 1er décile ne résulte pas seulement du caractère régressif de la fiscalité indirecte mais du fait que le niveau de consommation de ces ménages (qui dépend de leur revenu disponible) est, en moyenne, très supérieur à leur niveau de vie net puisque ce dernier est augmenté par les transferts dont ils bénéficient. C’est également le cas, à un moindre degré, s’agissant des ménages appartenant au deuxième décile. »
Poursuivant sa démonstration, le rapport ajoute : « La fiscalité indirecte est également dégressive par rapport à la consommation, mais moins nettement que par rapport au revenu. Cette dégressivité reflète la structure de consommation qui n’est pas uniformément taxée. Par exemple, la consommation de tabac, d’alcool et de carburant, fortement taxée, a un poids plus lourd dans le budget des ménages modestes que dans celui des ménages aisés. À l’inverse, la consommation de biens culturels, à la taxation réduite, par exemple 2,1 % pour la presse, est plus importante (relativement à la consommation) chez les ménages aisés, que parmi ceux appartenant au 1er décile. »
Et à l’appui de cette démonstration, un autre graphique est publié qui est tout aussi parlant et que l’on peut consulter ci-dessous :
Et, pour finir, le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires présente le rapport entre la seule TVA et la consommation, par niveau de vie. Et là encore, la TVA apparaît dégressive. Voici le graphique en question :
Pour décrypter ce dernier graphique, le rapport fait les commentaires suivants : « Rapportée à la consommation, la TVA apparaît approximativement proportionnelle jusqu’au 8e décile et est nettement dégressive au-delà. La consommation des deux derniers déciles, et surtout du dernier, est sensiblement moins taxée au titre de la TVA que celle de tous les autres déciles. Ceci signifie que la consommation des ménages appartenant à ces deux derniers déciles de la distribution se porte davantage sur des biens et services dont le taux de TVA est plus faible comme par exemple les services de transport ou les biens ou services culturels (livres, spectacles..). Ceci signifie aussi que, compte tenu de leur champ, les taux réduits de TVA n’atténuent pas le caractère dégressif de la TVA, ce qui semble constituer une particularité française. »
Bref, par quelque bout que l’on prenne le problème, et quel que soit le mode de calcul – en référence au revenu disponible brut ou en référence au niveau de vie net – le constat est invariablement le même : la TVA est un impôt profondément injuste, qui obéit à un vieux et détestable principe fiscal : « Pourquoi faire payer les riches ? Faisons payer les pauvres ! Ils sont beaucoup plus nombreux… »
Du coup, on comprend mieux pourquoi la TVA n’est pas seulement l’impôt de l’injustice mais aussi l’impôt du… reniement ! Car de très longue date, la gauche en général et les socialistes en particulier ont toujours dénoncé la TVA, lui reprochant précisément son caractère dégressif. Et François Hollande lui-même a toujours, avec verve et vivacité, fait siennes ces critiques contre cet impôt injuste. Cela a même été l’un des moments forts de sa campagne présidentielle – l’un des moments qui ont marqué, avec l’annonce d’une taxe à 75 % (qui n’est plus aujourd’hui que l’ombre de ce qu’elle devait être) et la promesse (tout aussi vite oubliée) de faire rendre gorge à la finance.
Que l’on se souvienne ! Le 29 janvier 2012, Nicolas Sarkozy, qui craint d’être battu, sort précipitamment de son chapeau l’idée de faire un immense cadeau aux patrons en créant un « choc de compétitivité ». Le dispositif qu’il propose vise à alléger fortement les charges sociales des employeurs et à financer le dispositif en relevant notamment le taux normal de TVA de 1,6 point. Par antiphrase, il parle de « TVA sociale », mais en vérité, il s’agit d’une TVA antisociale : faire un cadeau sans contrepartie aux entreprises, en le faisant financer par l’un des impôts les plus injustes.
Dès le lendemain, le 30 janvier 2012, à l’occasion d’une conférence de presse à Brest, François Hollande tourne donc en dérision ce dispositif, comme on peut en retrouver trace avec la vidéo ci-dessous (à visionner surtout entre 9’ et 16’) :
À cette occasion, François Hollande dénonce donc le principe même de ce choc de compétitivité, faisant valoir qu’il est totalement absurde d’apporter de telles aides y compris aux entreprises qui ne sont pas exposées à la concurrence internationale. Et, fidèle à l’ancienne doctrine socialiste, il dénonce le recours à la TVA : « Je la considère inopportune, injuste, infondée et improvisée. Cela fait beaucoup. Et c’est pour cela que si les électeurs en décident et si je suis appelé aux responsabilités du pays, et si d’aventure le dispositif avait été adopté, je demanderai au Parlement de l’annuler. C’est en effet inopportun d’augmenter la TVA d’1,6 point au moment même où la croissance se ralentit (…). C’est ensuite injuste au moment où il y a tant d’inégalités dans notre pays, où il y a eu tant d’avantages fiscaux qui ont été accordés aux plus favorisés (…), demander aux Français de payer un impôt de plus, c’est aggraver encore l’injustice qui caractérise le mandat de Nicolas Sarkozy. C’est infondé : la compétitivité n’est qu’un faux prétexte. »
Au passage, François Hollande fait une digression sur l’impopularité dont souffre à l’époque son rival – et qui avec le recul prend une très forte résonance : « Il n’y a aucun courage à demander aux Français de payer davantage d’impôts. »
À de nombreuses reprises, tout au long de la campagne présidentielle, François Hollande enfonce le clou. Dénonçant le « choc de compétitivité » que veut organiser Nicolas Sarkozy, il brocarde la hausse de la TVA, qui a été votée par le Parlement et qui doit entrer en vigueur seulement le 1er octobre suivant. La TVA est ainsi l’objet de l’une des passes d’armes remarquées du face-à-face qui oppose le 2 mai 2012 les deux candidats, entre les deux tours de l’élection présidentielle :
À cette occasion, François Hollande dénonce donc une nouvelle fois la politique fiscale inégalitaire de Nicolas Sarkozy et promet qu’il annulera la hausse de la TVA qui a été votée mais qui n'est pas encore appliquée : « Cette TVA que vous voulez imposez, elle va prélever du pouvoir d’achat. J’ai fait le calcul : 300 euros pour un couple de smicards… voilà ce que va être le prélèvement annuel que vous allez infliger », s’insurge-t-il.
Or, on sait ce qu’il en est finalement advenu. Si la hausse de la TVA, telle qu’elle avait été dessinée par Nicolas Sarkozy, a été annulée, François Hollande a finalement tourné casaque et a décidé de mettre en œuvre le « choc de compétitivité », qu'il critiquait auparavant. Et pour financer les 20 milliards d’euros apportés aux entreprises sous des modalités remaniées, celles non plus d’un allègement de charges mais d’un crédit d’impôt, il a ressorti un projet de hausse… de la TVA, juste un peu moins forte.
C’est donc pour cela que cette hausse de la TVA apparaît aujourd’hui comme un symbole de la politique fiscale de François Hollande. Un symbole d’injustice, car il s’agit d’une taxe sur les pauvres. Et puis un symbole de reniement. Car en ce domaine, comme en de nombreux autres, le dirigeant socialiste a fait ce qu’il y a de pire en politique : après avoir beaucoup promis durant la campagne, il a fait ensuite l’exact contraire de ce qu’il avait dit. Après avoir suggéré qu’il conduirait une politique fiscale de gauche, il a mis radicalement le cap à droite.
Quelle est donc la cause de l’exaspération qui parcourt aujourd’hui tout le pays ? Dans le cynisme, la désinvolture ou la morgue qui ont conduit le pouvoir socialiste à promouvoir un impôt qu’ils savent eux-mêmes très injuste, il y a une part de la réponse…
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