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Ce qu’il faut retenir de la transparence des parlementaires

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Ils sont députés ou sénateurs, mais pas que. Cela peut parfois leur rapporter gros ou les placer dans des situations de conflit d’intérêts. Restées confidentielles jusqu’ici, ces informations sont désormais (en partie) publiques après la mise en ligne, jeudi 24 juillet, par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), créée après le choc de l’affaire Cahuzac, des déclarations d’intérêts des 925 parlementaires français.

Leur consultation sur le site de la HATVP est particulièrement fastidieuse : les déclarations sont remplies à la main dans l’immense majorité des cas et rarement homogènes – il y a ceux qui publient leurs émoluments en net, d’autres en brut, certains raturent, d’autres débordent des cases… Pour y voir un peu plus clair, Mediapart met l’accent sur plusieurs situations particulières. En cas de conflit d'intérêts, la HATVP pourra saisir le bureau de l'Assemblée ou du Sénat (une instance très politique), mais a été privée par la loi du moindre pouvoir d'injonction à l'égard des parlementaires.

  • JEAN-FRANÇOIS COPÉ, L'AVOCAT MILLIONNAIRE
Jean-François Copé a touché près de 2 millions d'euros comme avocat.Jean-François Copé a touché près de 2 millions d'euros comme avocat. © Reuters

En 2009, alors président du groupe UMP à l’Assemblée nationale, Jean-François Copé a commis un ouvrage baptisé Un député, ça compte énormément (Albin Michel). Il y expliquait les raisons du cumul de son activité parlementaire avec celle d’avocat d’affaires, d’abord au sein du cabinet Gide-Loyrette-Nouel puis à son compte. « On reproche souvent aux hommes politiques d’être complètement déconnectés du monde du travail. Avoir un pied dans le privé me permet aussi de me confronter à la réalité de l’entreprise », écrivait-il. Grâce aux déclarations d’intérêts rendues publiques par la HATVP, on sait désormais combien cette « réalité de l’entreprise » fut pour lui sonnante et trébuchante.

Ainsi, entre 2007 et 2013, Jean-François Copé déclare avoir perçu 1 864 784 € liés à ses activités d’avocat d’affaires, en plus de ses émoluments de député et maire de la ville de Meaux (Seine-et-Marne), lesquels représentent environ 75 000 €/an. Le cumul du mandat de député avec des activités d’avocat d’affaires par Jean-François Copé a suscité la polémique à plusieurs reprises ces dernières années.

Mais si l’on sait désormais combien cette activité censée lui prendre « plusieurs heures par semaine » (selon le même livre) fut immensément rémunératrice, le geste de transparence de la HATVP ne permet pas d’en savoir plus, au nom du secret professionnel, sur la liste de ses clients. Celle-ci aurait pourtant permis de mettre au jour, ou pas, de possibles situations de conflit d’intérêts de celui qui fut au service d’intérêts privés pendant qu’il faisait ou défaisait la loi. 

Empêtré dans l’affaire Bygmalion, Jean-François Copé a dû démissionner en juin dernier de la présidence de l’UMP. Quelques jours plus tard, son « entourage » faisait savoir à la presse qu’il allait reprendre ses activités d’avocat d’affaires, qu’il avait cessées en 2013.

  • PHILIPPE BRIAND, L'HOMME AUX 37 SOCIÉTÉS

Trésorier de campagne de Nicolas Sarkozy en 2012, ce qui lui vaut d’être lui aussi placé dans la lumière de l’affaire Bygmalion, le député d’Indre-et-Loire Philippe Briand fait figure de recordman des parlementaires actionnaires d’entreprises privées. D’après sa déclaration d’intérêts, Philippe Briand est lié directement à 37 sociétés, dont 32 sont des sociétés civiles immobilières (SCI).

Fondateur du réseau d’administrateurs de biens Citya immobilier (le n° 3 en France), le député Briand est un homme richissime. Sa participation financière directe dans la holding baptisée Arche SAS est évaluée à… 120 000 000 €, d’après les éléments fournis à la HATVP. L’homme perçoit par ailleurs de copieux émoluments au titre de ses activités diverses. Pour la seule année 2013, l’ancien trésorier de Sarkozy a déclaré un salaire de 101 643 € comme chef d’entreprise et 361 200 € de dividendes. Ceux-ci avaient atteint jusqu’à 1 749 050 € en 2011.

  • PATRICK BALKANY OUBLIE SA FEMME

Isabelle Balkany n’existe plus, du moins pour son mari. Le député des Hauts-de-Seine Patrick Balkany, cerné par plusieurs affaires financières (fraude fiscale, prise illégale d’intérêts, emploi fictif…), a écrit « NÉANT » dans la case de sa déclaration d’intérêts consacrée à l’« identification du conjoint ou partenaire ». Isabelle Balkany, sa première adjointe à la mairie de Levallois-Perret, est actuellement mise en examen pour « blanchiment de fraude fiscale » dans le cadre d’une vaste enquête internationale sur le patrimoine caché du couple, notamment au Maroc et dans les Antilles.

Pour le reste, le député Balkany, qui n’est pas connu pour vivre chichement, ne déclare aucun émolument, si ce n’est 24 900 € annuels comme maire de Levallois et 14 000 € de droits d’auteur pour son livre Une autre vérité, la mienne.

  • GÉRARD LONGUET, UN MÉLANGE DES GENRES ASSUMÉ

Il se revendique lui-même comme un militant du cumul public/privé. Le sénateur UMP de la Meuse et ancien ministre Gérard Longuet a déclaré pour l’année 2013 une rémunération de 42 000 €, en plus de ses activités parlementaires, comme président de sa société de conseil Sokratès Group. Il est aussi l’administrateur, en France et en Afrique, de la société de manutention portuaire Sea Invest, mais également du groupe Cockerill Maintenance et Ingénierie (CMI), qui lui ont rapporté environ 50 000 € de jetons de présence. 

En janvier dernier, Gérard Longuet, qui fut le ministre de la défense de Nicolas Sarkozy durant la guerre contre le régime de Mouammar Kadhafi en 2011, s’est discrètement rendu dans une Libye en ruines pour y prospecter de bonnes affaires commerciales, notamment dans le domaine portuaire auquel il est donc lié professionnellement. Gérard Longuet était invité par un riche homme d’affaires établi à Genève, Mohamed Benjelloum. « Je n’avais pas de clients. Il est évident que si j’avais découvert une pépite, j’aurais réfléchi à l’exploiter », a-t-il fait savoir, sans ciller, à Mediapart. 

  • L'OUBLI DE JEAN-NOËL GUÉRINI
Jean-Noël Guérini, multi-mis en examen.Jean-Noël Guérini, multi-mis en examen. © Reuters

En sus de ses rémunérations de sénateur, et de président du conseil général des Bouches-du-Rhône, Jean-Noël Guérini touche chaque année 5 400 € de jetons de présence pour siéger au conseil de surveillance de la Compagnie nationale du Rhône (CNR) dont le département des Bouches-du-Rhône est actionnaire à hauteur de 5 %. Entre 2005 et 2010, même si cela n’apparaît pas sur sa déclaration, il a empoché 24 400 € pour représenter le département à la CNR. Les a-t-il reversés au PS ? Jean-Marc Coppola (FDG), qui a représenté la région Paca à ce même CNR jusqu’en 2010, se souvient qu’il reversait ses jetons de présence à son parti. De même que les représentants des salariés les reversent à leur syndicat. Le sénateur touche également 15 700 €/an, depuis qu’il a pris la présidence du service départemental d’incendie et des secours (Sdis 13).

Jean-Noël Guérini détient par ailleurs 22 300 € de parts dans la Socoma qu’il copréside avec Charles-Émile Loo, 92 ans. Il s’agit d’une coopérative ouvrière créée après guerre par ce dernier et d'autres proches de Gaston Defferre pour contrer la CGT et les communistes sur le port de Marseille. S’il mentionne bien que sa femme Martine Aelion-Guérini est avocate, Jean-Noël Guérini oublie de préciser qu’elle défend l'office HLM 13 Habitat, qu'il a présidé jusqu’en 1998 et qui dépend toujours du département des Bouches-du-Rhône, comme l'avait révélé Le Point en 2011.

L’une des deux assistantes parlementaires de Jean-Noël Guérini, Magali Le François, travaille également à mi-temps à son cabinet au Conseil général. Et jusqu'en 2011, elle a cumulé sa fonction d'assistante parlementaire avec celle de secrétaire générale de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône, alors présidée par Jean-Noël Guérini. 

  • JEAN GLAVANY ET LE GROUPE BOLLORÉ

Député socialiste des Hautes-Pyrénées, et ancien ministre de l’agriculture dans le gouvernement de Lionel Jospin, Jean Glavany est réputé depuis longtemps pour avoir de très nombreux liens avec les milieux d’affaires. Sa déclaration d’intérêts le confirme. Elle fait d’abord apparaître qu’à la date de son élection, en 2012, il cumulait deux activités extra-parlementaires. D’abord, il était le salarié d’une société organisatrice d’événements sportifs et culturels, dénommée Angel Developpement, pour une rémunération de 61 506 € – on peut supposer que c’est une rémunération annuelle même si l’élu ne le précise pas. Ensuite, elle indique qu’à la même date, il était avocat au cabinet dénommé Parme Avocats, pour une rémunération de 60 935 €. Sur le site de ce cabinet, on ne trouve pas mention de cette collaboration.

L'ancien ministre PS Jean Glavany, sur les bancs de l'Assemblée.L'ancien ministre PS Jean Glavany, sur les bancs de l'Assemblée. © Reuters

Mais c’est à la fin de cette déclaration d’intérêts que l’on trouve les précisions les plus intéressantes. À la rubrique « Observations », Jean Glavany apporte une référence sur un volet de ses activités dont il n’a jamais aimé parler. « Je ne vois pas dans ce questionnaire où je pouvais indiquer qu’en 2012-2013 (et depuis 2001), j’étais membre du "comité stratégique" du groupe Bolloré, structure informelle s’apparentant à un "think thank" mais qui ne fait de moi ni un salarié, ni un dirigeant, ni un actionnaire de ce groupe. » Lapsus cocasse : au lieu d’écrire « think tank », le parlementaire use du mot « thank ». Comme dans « thank you very much »…

Ces liens discrets entre l’ancien ministre de l’agriculture et l’un des plus grands patrons français, qui possède des actifs immenses dans des activités du même secteur, par exemple dans le domaine des bois précieux en Afrique ou en Asie, ont en effet souvent fait jaser. Car Vincent Bolloré est l’une des grandes figures du capitalisme de connivence à la française, et a affiché une très grande proximité avec Nicolas Sarkozy tout au long de son quinquennat. Au sein de ce comité stratégique du groupe Bolloré, Jean Glavany a donc longtemps côtoyé Antoine Veil (aujourd’hui décédé), l’une des figures du capitalisme parisien, ou encore Alain Minc, qui y siège toujours et est resté le principal conseiller de Nicolas Sarkozy, tout comme celui de Vincent Bolloré.

A la suite de cette notule, Jean Glavany nous a fait parvenir une réponse, que vous trouverez sous l'onglet Prolonger.

  • GILBERT COLLARD, LA FORTUNE D'UN AVOCAT

Le député “Rassemblement bleu marine” a déclaré 393 599 € en 2012, somme liée à ses activités d'avocat. En 2013, il déclare une rémunération de 16 013 € mensuels (comme avocat), soit plus de 192 000 €, et des droits d'auteur et contrats d'édition pour des montants « non encore connus ». Entre 2008 et 2012, il a perçu, comme avocat, d’après sa déclaration, 2 027 477 €, et 110 092,77 € comme « auteur de livres et de récit d’affaires pour la télévision ».

  • AYMERI DE MONTESQUIOU, LES FRUITS DE LA TERRE

Le vice-président (UDI) de la commission des finances du Sénat est un agriculteur heureux : Aymeri de Montesquiou déclare 93 464 € de revenus annuels pour l’exploitation agricole à ses initiales, la SCEA ADM. Mais il maîtrise parfaitement le grand écart, puisqu’il est aussi membre du conseil de surveillance de la banque d’affaires Delubac & Cie, ce qui lui a rapporté la bagatelle de 120 000 € pour l’année 2013. Et quid des quatre autres années censées être couvertes par la déclaration d’intérêts ? On ne le saura ni pour son exploitation, ni pour son travail à la banque, puisqu’il s’est contenté d’indiquer « selon activité de la société » et « selon AG votées ».

Autre mystère : dans sa déclaration d’intérêts au Sénat de 2012, il se déclarait par ailleurs membre du conseil de surveillance de la société Petroplus Holdings France, qui chapeautait alors au moins une raffinerie en activité en France, à Petit-Couronne, en Seine-Maritime. Depuis, la raffinerie a déposé le bilan, et la mention de Petroplus a disparu du CV du sénateur. En 2012, il se déclarait aussi gérant de la société de conseil East South. Aujourd’hui, il indique seulement posséder une participation financière de la société. Le gérant est désormais Francis de Montesquiou.

  • JEAN-PIERRE RAFFARIN ET FRANÇOIS FILLON, SUPER-CONFÉRENCIERS

Côté rémunération, certains savent capitaliser sur leur nom et leurs fonctions. L’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin déclare ainsi entre 40 000 et 78 500 € annuels au titre des conférences qu’il donne. Il faut y ajouter les droits d’auteur de ses livres (entre 32 500 et 52 500 €/an) et ses cours à l’école de commerce parisienne ESCP (plus de 20 000 euros par an). Plus curieux, le sénateur était jusqu’au 30 avril 2013 président de… l’Association centrale des laiteries coopératives des Charentes et du Poitou, ce qui lui rapportait tout de même 18 000 euros par an.

L'ex-premier ministre de Nicolas Sarkozy, François Fillon, désormais membre du triumvirat qui assure la direction intérimaire de l'UMP, déclare avoir touché 70 000 € en 2012 et 142 500 € en 2013 au titre de sa société de conseil en conférences EURL 2F Conseil, créée en juin 2012, quelques jours seulement avant son élection à la députation de Paris.

Son attachée de presse officielle, Caroline Morard, est par ailleurs rémunérée par l’Assemblée en qualité de collaboratrice du député du Val-d’Oise Jérôme Chartier, qui est l’un de ses soutiens les plus proches.

  • SAMIA GHALI, RETRAITÉE À 40 ANS

Une bizarrerie pour Samia Ghali. Née en 1968, la sénatrice des Bouches-du-Rhône a donc 46 ans, mais elle se déclare « retraitée de la fonction publique territoriale », alors que la retraite n’est théoriquement pas possible à cet âge pour les fonctionnaires. (Mise à jour – 21 heures : comme suggéré en commentaires, elle a pu bénéficier d'un départ à la retraite anticipé, autorisé jusqu'en 2011 pour les mères de trois enfants ou plus.)

La sénatrice a par ailleurs bien indiqué que son époux Franck Dumontel était directeur de cabinet du président de Marseille Provence Métropole au moment de son élection en 2008. Mais elle n’ajoute pas qu’après avoir été débarqué en décembre 2010, Franck Dumontel a depuis créé sa société de conseil aux collectivités locales, qui a par exemple remporté en décembre 2012 un marché public lancé par la communauté d’agglomération communiste d’Aubagne et du pays de l'Étoile.

  • JACQUES MYARD : « À BAS L'INQUISITION ! »

L’UMP Jacques Myard est réputé pour ses coups de gueule, et il n’a pas manqué à sa réputation, même sur papier. Se présentant comme « député-maire », il a agrémenté cette information d’une déclaration de son cru : « Et vive le cumul ! » Puis, au rang des observations, dernier espace où les parlementaires peuvent s’exprimer, il n’a pas hésité : « Néant – À bas l’inquisition ! »

  • HENRI GUAINO, RIEN À DÉCLARER SAUF À L'ÉLYSÉE

Député UMP des Yvelines, Henri Guaino a rempli une déclaration d’intérêts qui ne retient guère l’attention, car la mention « NÉANT » figure presque à toutes les colonnes. Tout juste y trouve-t-on le rappel d’une information qui, lorsqu’elle avait été connue, avait déclenché une très vive polémique sous le précédent quinquennat : le parlementaire indique qu’en sa qualité de conseiller spécial auprès de Nicolas Sarkozy à l’Élysée, il percevait la somme de 17 851,41 € net mensuels, traitements et primes compris. L’énormité de la somme avait fait débat.

  • PIERRE CHARON, L'ARGENT SOUS SARKOZY

Le sénateur UMP de Paris Pierre Charon a gagné plus de 186 000 euros en 2013 avec ses activités de conseil. Mais on y découvre surtout que lorsqu’il était conseiller de Nicolas Sarkozy, il a perçu 101 000 euros en 2009 et 90 000 euros en 2010.

  • LUC CHATEL, QUI SONT SES CLIENTS ?

Le député et secrétaire général de l’UMP Luc Chatel déclare, en 2013, 183 135 euros liés à ses activités annexes de « conseil en communication et accompagnement stratégique ».

  • PHILIPPE MARINI, L'ULTRA-CUMULARD DANS LE PRIVÉ

Président UMP de la commission des finances du Sénat, Philippe Marini a la réputation d’avoir toujours sa porte grande ouverte aux lobbies, notamment ceux du patronat (Medef et Afep) et d’entretenir des liens de grande proximité avec les milieux de la finance. Sa déclaration d’intérêts ne le dément pas : le sénateur apparaît en effet comme l’un des élus qui a les activités extra-parlementaires les plus fournies.

D’abord, il déclare être le gérant d’une EURL (entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée) dénommée Aigle, qui lui procure bon an mal an un peu plus de 30 000 €/an – 33 042 € de revenus imposables par exemple en 2012. Cette structure un peu énigmatique se présente comme le « conseil stratégique » depuis 1994 d’une société, aussi peu connue, dénommée CIPM, structure dont Philippe Marini est par ailleurs administrateur.

Philippe Marini, sénateur et champion toutes catégories du cumul. Philippe Marini, sénateur et champion toutes catégories du cumul. © Reuters

Le sénateur est aussi membre du conseil de surveillance d’une société beaucoup plus connue, dénommée Gimar-Finances, rebaptisée récemment Gimar et Cie. Créée en 1999 par le banquier d’affaires Christian Giacomotto, cette structure financière est spécialisée dans les fusions-acquisitions et est fréquemment intervenue sur des dossiers qui concernaient directement l’État ou des entreprises à capitaux publics, qu’il s’agisse de dossiers liés dans le passé à la Caisse des dépôts, aux Caisses d’épargne ou encore à Areva. Autrefois proche de Philippe Séguin, il a beaucoup joué les entremetteurs entre la sphère publique et les milieux d’affaires, organisant des deals à chaque fois que cela fut possible et empochant de confortables commissions.

Certaines de ses interventions ont même été épinglées par la Cour des comptes. Le président de la commission des finances du Sénat peut-il défendre le bon usage des fonds publics, tout en siégeant dans un établissement financier qui est parfois en affaires avec l’État ou ses pupilles ? Dans sa déclaration, Philippe Marini dit vouloir poursuivre à l’avenir toutes ses activités.

Et ce n’est toujours pas tout. Philippe Marini déclare avoir perçu environ 20 000 €/an de 2008 à 2011 en sa qualité de membre du conseil de surveillance du distributeur alimentaire Guyenne et Gascogne (absorbé depuis par Carrefour). Il dit enfin percevoir en moyenne 4 000 €/an pour ses fonctions d’administrateur de la Compagnie financière privée (COFIP). Plus connue autrefois sous le nom de Didot-Bottin, qu’elle a dans le passé absorbée, la COFIP est une société d’investissement : elle mène des activités en association avec Gimar ou notamment avec la société de vente en ligne Price Minister, dirigée par Pierre Kosciusko-Morizet.

  • JEAN-MICHEL BAYLET, LES MILLIONS DE LA PRESSE

À la date de l'élection de 2004 au Sénat, le sénateur du Sud-Ouest déclare 678 298 € de rémunérations, dont 416 966 € en tant que PDG du groupe La Dépêche du Midi, 20 189 € en tant que président de la SAS Nouvelle République des Pyrénées, 133 365 € comme président de SAS Occitane de Communication et 107 777 € en tant que président de la SA Midi Olympique.

Pour l'année 2013, les rémunérations s'élèvent à 700 880 €, dont 377 159 € (La Dépêche du Midi), 23 575 € (La Nouvelle République des Pyrénées), 144 983 € (Occitane de Communication) et 155 163 € (Midi Olympique). Ce membre du parlement déclare envisager de conserver ces activités. S'ajoutent, toujours pour 2013, 56 389 € d'indemnités en tant que sénateur du Tarn-et-Garonne et 27 990 € en tant que président du conseil général du Tarn-et-Garonne, soit 84379 € d'indemnités parlementaires.

  •  FRANÇOIS PUPPONI, UNE AFFAIRE DE FAMILLE

Le député et maire PS de Sarcelles, François Pupponi, déclare trois collaborateurs parlementaires, parmi lesquels sa compagne, Marie-Claude Chabé, également membre du cabinet de la mairie de Sarcelles. Ce proche de Dominique Strauss-Kahn, à qui il a succédé dans le Val-d’Oise comme au Palais-Bourbon, puise aussi dans son enveloppe pour rémunérer un chauffeur à temps partiel. Plus étonnant : ce chauffeur est également employé au sein de Leyne Strauss-Kahn & Partners (LSK), une banque d’affaires luxembourgeoise présidée depuis octobre 2013 par… DSK.

  • ALAIN MARSAUD, ENTRE CASINO ET VEOLIA

Alain Marsaud déclare gagner à son élection 13 800 € brut mensuels en tant que « directeur de société de Casino Guichard-Perrachon ». Cela correspond à 165 000 €/an. Ces cinq dernières années, au même titre, il déclare avoir gagné 26 000 € brut mensuels. Soit 1 500 000 € en cinq ans. Il est aussi – à titre bénévole – administrateur indépendant de Veolia Water and Technology, Veolia Voda (Veolia en République tchèque) et Sidem (Veolia désalinisation).

Il n’a pas déposé d’amendement sur la grande distribution, mais a déposé onze amendements dans le cadre de la loi de « transition vers un système énergétique sobre, tarification de l’eau et éolienne ». Il a aussi déposé un amendement au projet de loi de finances pour 2014 concernant les taxes sur les agences de l’eau.

  • CHRISTOPHE BORGEL, LE CONFORT DE L'ACADÉMIE

Député socialiste de la Haute-Garonne, et membre de la garde rapprochée de Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS, Christophe Borgel indique qu’au titre des activités professionnelles lui ayant procuré des rémunérations au cours des cinq dernières années, il y a eu celle-ci : « Inspecteur de l’académie de Paris, chargé d’une mission d’inspection générale », pour une rémunération de « 4 450 euros net par mois ».

Cette mention fonctionne comme un rappel : ancien président de l’Unef, Christophe Borgel est l’un des responsables socialistes que Lionel Jospin avait promus par décret, dans la fonction d’inspecteur d’académie de Paris. La Cour des comptes avait vivement critiqué certaines de ces promotions, faisant valoir qu’elles ouvraient droit à une très confortable rémunération, pour un travail assez léger, pour ne pas dire inconsistant.

  • DOMINIQUE TIAN, UNE PLUS-VALUE À 15 MILLIONS

Le député UMP des Bouches-du-Rhône, premier adjoint au maire­­ de Marseille, en charge de l’emploi et des transports urbains, est également le président d’une clinique de soins et est l’associé unique de la Holding Over Line. L’élu a eu besoin de 8 pages d’annexes pour détailler ses participations dans divers SCI, hôtels, cliniques ou centres de loisirs (au total, 14 participations financières et 16 dans la gérance). En dehors de ses deux mandats d’élu, Dominique Tian a gagné plus de 700 000 € en 2013, dont 668 449 € de dividendes. Surtout, il déclare une « plus-value latente » de 15 millions d'euros avec sa holding. Il est par ailleurs administrateur délégué d'une société anonyme de droit belge, Interbuilding (hôtellerie), domiciliée à Bruxelles.

  • JEAN-LOUIS CHRIST ET SON COLLABORATEUR VOLANT

Le député UMP du Haut-Rhin déclare parmi ses collaborateurs parlementaires Éric Chomaudon, le secrétaire général adjoint de Force républicaine, la formation de François Fillon. L'assistant travaille pour Jean-Louis Christ « à temps partiel » car il se partage avec « un autre député ». Comme l’avait raconté Mediapart, Éric Chomaudon avait été rémunéré entre septembre 2012 et février 2014 comme assistant à temps partiel de l'eurodéputé UMP Alain Cadec, tout en travaillant bénévolement pour Fillon. Une manière pour l’ancien premier ministre de conserver son fidèle collaborateur, qu'il n’a pu rémunérer jusqu'en novembre 2013.

  • BONUS : COMMENT SE MOQUER DE LA TRANSPARENCE

Il y a ceux qui comptent en zlotys (monnaie polonaise) pour embrouiller le lecteur (ici le sénateur des Français de l'étranger Jean-Yves Leconte) :

Ceux qui renvoient pour plus d'informations à une déclaration de revenus non publique (ici le sénateur Jean-Pierre Cantegrit) :

Ceux qui narguent la HAT en cachant l'identité de leurs collaborateurs parlementaires (ici le député Michel Vauzelle) :

Enfin ceux qui découragent les curieux à coups de ratures (le député Éric Jalton) :

 




BOITE NOIREFabrice Arfi, Lucie Delaporte, Louise Fessard, Dan Israel, Mathilde Mathieu, Laurent Mauduit, Ellen Salvi et Marine Turchi ont contribué à la rédaction de cet article.

Prolonger : Retrouvez toutes nos informations complémentaires sur notre site complet www.mediapart.fr.

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